Transformations pavillonnaires contre crise de l’habitat

Retour sur l’exposition du Pavillon de l’Arsenal qui présentait huit projets d’extension pavillonnaire. La start-up Iudo est à l’origine de l’initiative, le potentiel est de 140 millions de m² de droits à construire résiduels à l’échelle de l’Ile-de-France, soit 2 millions de logements de 70 m².

L’exposition « Transformations pavillonnaires » (14 décembre-10 février) possède les apparences de la modestie, mais l’ambition de son propos est immense : régler la question du logement en Ile-de-France en réalisant dans la première couronne des mini-opérations de promotion immobilière sur le terrain de maisons individuelles. Point de départ de la démonstration : au premier étage du Pavillon de l’Arsenal étaient présentés les maquettes, plans et images de huit projets de transformation d’une parcelle pavillonnaire.

©Erwan Bonduelle

©Erwan Bonduelle

©Erwan Bonduelle

Habitat intergénérationnel

L’idée est d’ajouter de nouveaux bâtiments, des extensions ou des surélévations susceptibles d’accueillir des logements. Ici, un « habitat intergénérationnel » : une femme est propriétaire d’une maison et y vit seule depuis le départ de ses deux filles. Proche d’une retraite dont le montant ne sera pas élevé, elle souhaite trouver un complément de revenus. Sans sortir de la légalité. L’opération prévoit de créer une extension pour accueillir deux chambres d’étudiant et créer un espace de vie commun.

Là, un couple bientôt à la retraite. Le garage situé au fond du jardin est surélevé pour accueillir des logements autour d’une cour partagée…. Les huit parcelles sont toutes situées à Arcueil, ainsi que l’explique Benjamin Aubry, l’un des trois cofondateurs architectes de la start-up iudo, à l’origine de ce projet pilote lauréat du programme FAIRE : « La ville nous a autorisés à lancer une campagne de communication pour un appel à manifestation d’intérêt. En 48 h, nous avions une vingtaine de retours. Nous avons sélectionné huit personnes et établi avec chacune d’elle un diagnostic : a-t-elle un objectif financier, un projet de vie, quel montant de complément de revenu attend-elle, que peut-elle investir ? Nous établissons ensuite un cahier des charges avec une volumétrie globale, un métrage carré, un coût et un programme. Ces projets devraient, pour une grande part, être réalisés. »

©NBisensang

© NBisensang.

©NBisensang

Les fondateurs de iudo. © DR.

La conception en a été confiée à des agences d’architecture, ce que iudo n’est pas. « Nous nous définissons comme des assistants à maîtrise d’ouvrage. Notre objectif est d’accompagner les propriétaires dans le montage des opérations. Nous prenons en charge les aspects financiers et juridiques. »

Un foncier qui se raréfie

Avant de créer cette entreprise en 2016, les fondateurs ont développé depuis plusieurs années une réflexion préalable aboutissant aux bienfaits de la transformation pavillonnaire, qui part de trois constats. « Ce qui explique la crise du logement en Ile-de-France est d’abord un foncier qui se raréfie et est de plus en plus difficilement mobilisable, indique Benjamin Aubry. Parallèlement, il n’y a jamais eu autant de petits propriétaires. Aujourd’hui, le foncier privé individuel représente 80 % du foncier habité en région parisienne, soit 96 520 ha. Une surface correspondant à neuf fois Paris. Enfin, la population des propriétaires de maisons individuelles est sujette à de fortes mutations : vieillissement de la population, baisse de la taille des ménages, des retraites. Un propriétaire sur deux est âgé de plus de 55 ans et plus d’un tiers est retraité. Et une maison sur deux est occupée par une personne seule ou en couple ».

A partir de ces éléments, Benjamin Aubry estime qu’il existe des solutions d’avenir à la fois pour ces personnes. « Pour compenser la baisse des revenus, de plus en plus louent une chambre pour un étudiant. Mais ils pourraient aller plus loin. Ils ont un capital, qui est leur terrain. S’ils construisent dessus, cela leur coûte de 30 à 50 % moins cher que s’ils achètent un appartement neuf en locatif. Cet effet de levier permet de faire une petite opération immobilière qui se révèle vite rentable. »

140 millions de m2 de droits à construire

Fort de cette réflexion, iudo en a tiré des conclusions qui ne manqueront pas d’intéresser les collectivités locales franciliennes : « En extrapolant sur les droits à construire individuels d’une vingtaine de communes, il est possible de bâtir, en plus de ce qui existe, 100 m² de surface de plancher par parcelle sans compter les surélévations, tout en gardant 60 % des jardins. Cela représente environ 140 millions de m² de droits à construire résiduels à l’échelle de l’Ile-de-France, soit 2 millions de logements de 70 m². Notre crise de l’habitat peut être soldée par là. Il suffirait d’ajouter un logement sur seulement 5 % des terrains individuels pour répondre à l’un des objectifs de la loi du Grand Paris, qui est de créer 70 000 logements en plus par an. »

Auteur

Sur le même sujet

Top