APL : les acteurs du logement social manifestent leur mécontentement

Face aux conséquences de la baisse des aides personnalisées au logement (APL) conjuguée à celle des loyers, les organismes HLM ont fermé leur bureau, le 17 octobre 2017, et ont manifesté devant l’Assemblée nationale.

Le mouvement HLM et les élus locaux ne décolèrent pas. Depuis l’annonce par le gouvernement de la réduction des APL et des loyers de solidarité, inscrites au projet de loi de finances (PLF) pour 2018 en cours d’examen à l’Assemblée nationale, le front d’opposition ne fait que se renforcer. L’alarme déclenchée notamment par l’Aorif (union sociale pour l’habitat d’Ile-de-France) en septembre a trouvé des échos au congrès de l’USH (Union sociale pour l’habitat), au sein de la métropole du Grand Paris ou d’autres collectivités locales franciliennes. Ces baisses conjointes doivent faire économiser 1,7 milliard d’euros au budget de l’Etat.

Logements

L’Aorif estime que la baisse des loyers entraîne la remise en question du financement de près de 19 000 nouveaux logements sociaux et la réhabilitation thermique de 12 000 logements sociaux par an en Ile-de-France. © JGP

Pour le gouvernement, le système des APL conduit les bailleurs sociaux à « fixer les loyers à des niveaux qui peuvent être considérés comme élevés au regard des moyens des locataires concernés et de la vocation même de ces organismes sociaux chargés d’une mission de service public sans but lucratif, est-il indiqué dans le projet de loi de finances (PLF). Il en résulte des niveaux de marge importants dégagés par les organismes de logement social, qu’il s’agisse de l’excédent brut d’exploitation (10,4 milliards d’euros, soit 50 % des loyers), de l’autofinancement net (2,2 milliards d’euros, soit 10,4 % des loyers) ou de l’autofinancement global (3,3 milliards d’euros, soit 15,8 % des loyers). La trésorerie du secteur a, par ailleurs, atteint 11 milliards d’euros fin 2014, soit l’équivalent de 7 mois de loyers et charges, » est-il également indiqué.

Mesures d’accompagnement

Le gouvernement a prévu, « pour accompagner les bailleurs dans cette réforme et éviter une dégradation de leur situation financière, des avantages économiques […] sous la forme d’un maintien du taux du livret A à son niveau actuel pendant deux ans ainsi que par un allongement de la maturité de certains prêts du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts ».

Parmi les différents effets attendus de cette réforme, l’Aorif signale la remise en question du financement de près de 19[insec]000 nouveaux logements sociaux et la réhabilitation thermique de 12[insec]000 logements sociaux par an en Ile-de-France.© Jgp

« Lorsque le gouvernement travaillait sur une baisse identique des APL et des loyers de l’ordre de 60 euros, les pertes de ressources des organismes HLM franciliens étaient évaluées à 350 millions d’euros, soit plus de 75 % de leur capacité d’autofinancement », rappelle Seine-Saint-Denis habitat. Le dispositif désormais envisagé prévoit que les bénéficiaires des APL, qui verront leur loyer minoré, verront en contrepartie leur APL minorée dans une proportion légèrement inférieure (comprise entre 90 et 98 %).

Parmi les différents effets attendus de cette réforme, l’Aorif signale la remise en question du financement de près de 19 000 nouveaux logements sociaux et la réhabilitation thermique de 12 000 logements sociaux par an en Ile-de-France. « L’accroissement des difficultés financières des organismes HLM affecterait directement les collectivités, qui sont les principales garantes des emprunts des organismes », observe également l’institution.

Suspension des demandes d’agrément

Des nombreux bailleurs sociaux de la région ont donc décidé de se mobiliser pour cette journée d’action. « Comme 120 autres offices, Val d’Oise habitat fermera ses portes l’après-midi du 17 octobre et participera à la manifestation organisée par l’ensemble du monde HLM », avait par exemple annoncé l’office public de l’habitat du Val d’Oise. Lors de sa séance du 25 septembre dernier, le conseil d’administration de ce dernier a pris une délibération à l’unanimité alertant sur le fait que la baisse programmée des loyers ne lui permettrait plus d’assurer l’entretien et le développement de son patrimoine.

Abraham Johnson, président de Valophis, le 5 avril 2017. © Jgp

Pour Valophis, groupement d’organismes de logement social principalement situés dans le Val-de-Marne, ces décisions conduiraient à « une perte de recettes dont le montant correspond aux travaux engagés chaque année ». Hauts-de-Seine habitat signale, pour sa part, que la réduction des loyers de solidarité entraînerait une chute de dix millions d’euros de son résultat d’exploitation qui viendrait impacter ses fonds propres. « Nous n’excluons pas de prendre des mesures conservatoires comme la suspension de nouvelles demandes d’agrément et de tous les projets de rénovation urbaine », fait valoir Damien Vanoverschelde, directeur général de l’office.

Impact négatif sur la production

Paris Habitat, premier bailleur social public de France dont près de 40 % des locataires sont bénéficiaires de l’APL, considère que le vote du projet de loi de finances en l’état se traduirait par une perte sèche des recettes locatives de plus de 30 millions d’euros par an. « La baisse significative de ses fonds propres qui en résulterait ne pourrait que négativement impacter la forte mobilisation de l’établissement dans la production de logements sociaux de qualité, dans la rénovation énergétique de son patrimoine et dans l’amélioration de sa qualité de service », a déclaré son président Roger Madec.

Du côté des élus, après Patrick Braouezec, président de Plaine Commune, c’est Patrice Bessac, maire de Montreuil qui est monté au créneau. « Pour l’OPH de Montreuil, une diminution des loyers de 60 euros entrainerait une baisse des recettes de 3,8 millions d’euros, soit l’équivalent de la part de fonds propres nécessaires à la construction de 200 logements, la réhabilitation de 500 logements par an ou encore, une baisse conséquente des budgets consacrés à l’entretien courant des immeubles », écrit-il dans un courrier aux locataires de cet office.

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