Paris-Ile de France Capitale Économique (PCE) propose de changer de perspective sur la crise du logement en se penchant sur l’engagement des entreprises au sein d’un groupe de travail présidé par Xavier Lépine (PCE) et Laurent Permasse (Sofiap). Son objectif est de faciliter la mise en place de dispositifs efficaces, rapides à mettre en œuvre et qui renforcent l’attractivité des entreprises.
La crise du logement en France et plus particulièrement dans la zone tendue du Grand Paris n’est plus un secret et les entreprises ont décidé de prendre position. Conscientes que l’aide au logement des salariés représente un levier puissant pour attirer et fidéliser leurs collaborateurs, elles se mobilisent pour résoudre ce défi croissant.
Le mois dernier, Patrice Vergriete, ministre délégué chargé du Logement, déclarait au Monde : « Notre but est d’amortir le choc : maintenir une production en priorité dans les zones tendues, où on a le plus besoin de logements, en travaillant sur les fondamentaux de la demande – l’accession à la propriété, l’investissement locatif, le logement social ». Le projet de loi de finances 2024 prévoit des mesures telles que le recentrage du prêt à taux zéro, le financement des rénovations, ou encore la fin de la loi Pinel… mais rien sur le rôle essentiel des entreprises pour répondre à cette crise.

Patrice Vergriete, ministre du Logement. © Jgp
C’est pourquoi Paris-Ile de France Capitale Économique (PCE), le think & do tank qui porte la voix des entreprises de dimension internationale et des territoires sur les enjeux d’attractivité du Grand Paris, propose de changer de perspective sur la crise du logement en se penchant sur l’engagement des entreprises au sein d’un groupe de travail présidé par Xavier Lépine, président de PCE, et Laurent Permasse, du directoire de la Société financière pour l’aide à l’accession à la propriété (Sofiap), filiale de La Banque postale et de la SNCF qui propose un dispositif innovant pour l’accession à la propriété des salariés (le prêt immobilier subventionné par les entreprises). Son objectif est de faciliter la mise en place de dispositifs efficaces, rapides à mettre en oeuvre et qui renforcent l’attractivité des entreprises.
Se loger ou ne pas se loger, telle est la question
Lors de la première séance du groupe de travail, qui s’est tenue en octobre, Xavier Lépine a posé le diagnostic : « Le CNR logement a principalement porté sur l’offre : comment bâtir plus ? Quand il y a un problème de demande, on a toujours répondu par la subvention qui contribue à alimenter l’inflation. On arrive désormais dans une crise profonde et structurelle, avec une crise de l’offre chronique et renforcée par une crise de la demande. En France, on est passé de 25 % de propriétaires en 1945 à 50 % en 1980 ; depuis, le nombre de propriétaires a augmenté de 8 %. Avec 58 % de propriétaires en France, on est en dessous de la moyenne européenne. On est passé progressivement d’un logement facteur d’insertion sociale à un logement facteur d’inégalités sociales. L’accès à la propriété ne doit plus reposer sur l’économie de l’endettement. Il faut casser les codes : ce n’est plus à l’Etat ni aux banques de régler le problème ; les entreprises ont aussi un rôle à jouer. »
La relation entreprise-logement s’est longtemps résumée à l’enjeu de réduction du temps de trajet domicile-travail, avec toutefois une originalité notoire dans le Grand Paris : l’inconvénient d’un temps de trajet plus long en moyenne a longtemps été compensé par l’avantage des opportunités offertes par la richesse exceptionnelle de ce bassin d’emplois. De plus, l’inauguration des nouvelles lignes du Grand Paris express, ce projet d’infrastructure majeur, ouvre aujourd’hui des perspectives d’amélioration considérables.
Aujourd’hui, cet enjeu se trouve dépassé par un autre enjeu, bien plus alarmant : face à la chute du pouvoir d’achat immobilier (- 20 % en Ile-de-France, sans baisse des prix de vente significative pouvant servir de compensation) et à la tension sur le marché locatif, les salariés, notamment en zone tendue du Grand Paris, ne peinent pas seulement à se loger à un temps de trajet raisonnable de leur lieu de travail, ils peinent à se loger tout court.

« Les salariés, notamment en zone tendue du Grand Paris, ne peinent pas seulement à se loger à un temps de trajet raisonnable de leur lieu de travail, ils peinent à se loger tout court ». © Jgp
Ce constat accablant se double de la difficulté croissante des entreprises à recruter et à fidéliser leurs employés, accentuant l’urgence de l’action.
58 % des employeurs déclarent rencontrer des difficultés à attirer les salariés.
L’enquête par questionnaire menée par Paris-Ile de France Capitale Économique auprès de 41 entreprises, dont 14 grandes entreprises/ETI (plus de 250 salariés), révèle que :
– 58 % des employeurs rencontrent des obstacles pour attirer de nouveaux talents,
– 37 % des employeurs ont reçu des demandes de leurs employés en faveur de solutions de logement,
– pour 53 % des répondants, la direction de leur entreprise estime que la question du logement est soit importante (24 %) soit très importante (29 %).
– Selon 59 % des employeurs, les problèmes de logement affectent la productivité de leurs salariés et 56 % estiment que ces difficultés compliquent le processus de recrutement.
– Malheureusement, une majorité écrasante d’employeurs (78 %) ne propose actuellement aucune solution de logement, principalement en raison de contraintes budgétaires, du manque d’options adaptées, et du manque d’informations disponibles.
Ces résultats témoignent de l’urgence d’agir. L’aide au logement émerge comme un levier incontournable d’attractivité et de fidélisation pour les employeurs. Pourtant, il est frappant de constater que peu d’entreprises s’emparent de cette problématique.
Le logement grand absent des avantages en matière de ressources humaines
Alors que les entreprises proposent désormais des avantages tels que les tickets restaurants, les véhicules de fonction, ou les chèques Cesu, le logement demeure souvent absent de ces offres, même si c’est fréquemment la principale préoccupation des salariés. La raison de cette absence tient souvent à un manque de connaissance des solutions à leur disposition, à des difficultés à les mettre en oeuvre ou à la nécessité d’innover en proposant de nouveaux dispositifs sur mesure pour répondre à leurs besoins spécifiques.
Laurent Permasse déclare que « les entreprises souhaitent se réapproprier des politiques logement comme un nouvel avantage en complément des dispositifs plus classiques. Elles veulent un dispositif dans lequel l’entreprise est au coeur et elle a une responsabilité. Laissons l’entreprise choisir les avantages qu’elle met en place et finance pour ses salariés. »
Frank Ribuot, président de Randstad France et membre du groupe de travail, met ainsi en avant la nécessité d’adapter ces avantages en fonction des besoins réels des salariés et des spécificités géographiques. Il souligne que « la clé réside dans la possibilité d’offrir des options de substitution aux avantages « traditionnels » qui puissent s’adapter aux situations particulières : par exemple, de nombreux commerciaux dans la région du Grand Paris souhaitent remplacer la voiture de fonction par d’autres avantages, notamment des solutions de logement. »
Notre enquête, tout comme notre groupe de travail, montrent que les entreprises sont motivées à aller au-delà des dispositifs déjà existants, tels qu’Action logement, qui constitue déjà une contribution essentielle et significative des entreprises au logement.
Lancement d’un groupe de travail
Face à cette situation, le groupe de travail lancé par Paris-Ile de France Capitale Économique (PCE) a un double objectif : d’abord, démontrer que l’implication des employeurs dans le logement de leurs salariés permet de traiter concomitamment deux problèmes majeurs – le logement des employés et l’attractivité de l’entreprise. Ensuite, faciliter l’engagement des employeurs en faveur du logement des salariés en identifiant de nouvelles solutions.

Xavier Lépine, président de Paris-Ile de France Capitale Économique. © Jgp
Le groupe de travail présidé par Xavier Lépine et Laurent Permasse mobilise des entreprises, des établissements publics territoriaux, des associations et des experts. Il se concentre sur la création de solutions volontaires, directes et complémentaires à celles d’Action logement, permettant aux entreprises de réaffirmer leur engagement en matière de logement. Différentes approches, telles que le logement de fonction et le prêt subventionné, ont été étudiées, et de nouvelles solutions sont en cours de développement.
Les premiers résultats du groupe de travail seront présentés publiquement le 19 décembre lors d’un événement à la CCI Paris Ile-de-France, qui rassemblera des entreprises déjà engagées dans des solutions innovantes. Cet événement mettra également en avant un benchmarking international des solutions en matière de logement des salariés.
Les résultats de ce groupe de travail seront ensuite présentés au gouvernement en vue d’obtenir un cadre social et fiscal favorable pour les dispositifs d’aide au logement des salariés.
Le groupe de travail est encore ouvert aux candidatures. Entreprises intéressées par les dispositifs RH innovants, déjà pionnières ou désireuses d’en faire plus pour le logement de vos salariés : rejoignez le mouvement et contactez-nous (ajardin@gp-investment-agency.com) pour contribuer à la réflexion et participer au groupe de travail.