20 ans de construction en Ile-de-France passés au crible par l’Institut Paris Region

L’Ile-de-France n’a pas attendu la loi climat et résilience d’août 2021 introduisant le ZAN pour réduire le rythme de l’artificialisation de ses sols, rappelle une étude de l’Institut Paris Region dévoilée le 22 mars 2023, qui atteste également de la dégradation de la qualité – et singulièrement de la superficie moyenne – des logements franciliens.

A l’heure où la Région planche simultanément sur une révision de son schéma directeur, désormais environnemental (Sdrif-e), et de son schéma régional de l’habitat et de l’hébergement (SRHH), l’Institut Paris Region a souhaité « faire un pas de côté », selon les mots de son directeur général Nicolas Bauquet, pour analyser les grandes tendances qui se dégagent de l’analyse de 20 ans de construction de logements. D’où il résulte notamment le constat que le renouvellement urbain, la fameuse reconstruction de la ville sur la ville, ne date pas d’aujourd’hui.

De la période 2001-2005 à la période 2016-2020, la proportion de logements construits en extension urbaine sur des surfaces naturelles, agricoles ou forestières, est passée de 24 à 19 %. Autrement dit, depuis des années, c’est sans artificialiser de nouvelles terres qu’environ 80 % des nouveaux logements voient le jour.

« De la période 2001-2005 à la période 2016-2020, la part de la mobilisation foncière des surfaces naturelles, agricoles ou forestières, pour construire du logement, mesurée en ha, est passée de 24 à 19 %. Depuis des années, c’est sans artificialiser de nouvelles terres qu’environ 90 % des nouveaux logements voient le jour. »

Entre 2016 et 2020, 51 % des logements construits le sont sur des opérations de renouvellement et/ou de densification, 16 % résultent d’un changement d’usage et 13 % ont été bâtis sur des dents creuses.

Globalement, les superficies foncières mobilisées pour la construction de logements sont passées de 1 075 ha par an entre 2001 et 2005 à 765 ha par an entre 2016 et 2020. Les surfaces artificialisées sont passées elles de 260 ha par an à 150 ha par an. D’où la réputation de bon élève dont bénéficie à juste raison la région Capitale en matière de sobriété foncière.

Jean-Philippe Dugoin-Clément, Nicolas Bauquet, respectivement vice-président et directeur général de l’Institut Paris Region, avec Martin Omhovère et Noémie de Andrade, co-auteurs de l’étude. © Jgp

L’étude de l’Institut Paris Region met également au jour une tendance à la réduction de l’étalement urbain, un étalement caractérisé par une croissance du volume des terres artificialisées supérieure à celle de la population. Autrement dit, la densité augmente, à tel point d’ailleurs que les logements sont de plus en plus petits : ils ont perdu, d’autres études l’avaient déjà constaté, 9 m2 en moyenne. Soit une pièce. L’augmentation continue des prix du foncier, celle des matériaux plus récemment, l’expliquent notamment, tout comme la décohabitation provoquée par une divortialité plus importante.

Des objectifs de construction dépassés entre 2017 et 2019

L’étude indique qu’après une décennie 2001-2010 lors de laquelle le rythme de la construction de logements en Ile-de-France s’est situé en-dessous de la moyenne nationale, les courbes se sont croisées au mitan de la décennie suivante. Le nombre de logements mis en chantier est ainsi passé de 420 000 entre 2001 et 2010 à 660 000 entre 2011 et 2020. L’objectif de construction fixé par la loi relative au Grand Paris de 2010 de 70 000 logements par an a même été dépassé en 2017, 2018 et 2019, a souligné Martin Omhovère, directeur habitat & société de l’institut et co-auteur de l’étude avec Noémie de Andrade.

D’une décennie à l’autre, la production de logements s’est concentrée géographiquement, augmentant de 79 % en petite couronne pour les appartements, contre 41 % en grande couronne. Le nombre d’appartements construit a crû de 78 %, celui de logements en résidence (étudiante ou sénior) de 142 %, tandis que le volume de maisons (individuelles et groupées) décroissait de 9 %.

Des loyers sociaux trop élevés

Près de la moitié des logements sociaux construits entre 2011 et 2020 l’ont été en grande couronne. 20 700 logements sociaux ont été mis en service chaque année entre 2011 et 2020, soit moins que l’objectif minimum de 32 000 unités. Et les loyers moyens du parc social demeurent trop élevés, les Plus (social) représentant 57 % des constructions de logements sociaux entre 2011 et 2020 contre 15 % pour les PLAI (très social).

Enfin, l’étude de l’Institut Paris Region constate l’émergence de nouveaux usages qui limitent l’impact de la construction. Le parc « inoccupé » représentait 640 000 logements en 2019, soit une hausse de 22 % depuis 2013. Les locations touristiques de courte durée sont passées par là. Les pieds-à-terre occasionnels et les résidences secondaires composent également ce parc.

En synthèse, l’étude de l’Institut Paris Region souligne des réussites propres à l’Ile-de-France : l’atteinte de l’objectif global de construction durant les années qui ont précédé la pandémie, ainsi qu’une trajectoire vertueuse de baisse des extensions résidentielles sur les espaces naturels et agricoles. Elle décrit des enjeux qualitatifs à traiter, la surface des logements, ainsi que leur abordabilité. Elle pointe aussi le développement des nouveaux usages au sein du parc existant, l’essor des locations saisonnières brèves en l’espèce, comme un point de vigilance.

 

Les ressorts d’une région bâtisseuse, 20 ans de construction de logements en Ile-de-France, mars 2023, à télécharger sur le site de l’Institut Paris Region.

Sur le même sujet

Top