La région Ile-de-France organise, le jeudi 7 novembre 2019, une journée régionale de lutte contre les dépôts sauvages. A cette occasion, Jean-Philippe Dugoin-Clément, vice-président en charge de l’écologie, du développement durable et de l’aménagement revient sur ce fléau.
Le 7 novembre se déroule la journée régionale de lutte contre les dépôts sauvages, pourquoi un tel événement ?
Si nous organisons un tel événement, c’est parce que les dépôts sauvages constituent un problème majeur et pas uniquement en Île-de-France mais sur l’ensemble du pays, à l’image de cet été et de la tragédie à Signes (Var) où le maire, Jean-Mathieu Michel a été renversé par un fourgon en voulant empêcher son conducteur de jeter illégalement des gravats. En Essonne il y a un mois, un maire a été renversé dans des circonstances identiques. Il va mieux, mais la problématique des délinquants, – il n’y a pas d’autres mots, ce sont des délinquants qui pourrissent le territoire avec des dépôts sauvages- , nous y sommes confrontés partout. Avec une acuité supérieure en région francilienne, et cela pour deux raisons.
Premièrement, car l’Ile-de-France évolue massivement, avec une croissance importante notamment poussée par les très nombreux chantiers du Grand Paris express. L’activité y est très forte et par conséquent, le nombre de gravats et autres déchets y est plus important. Deuxièmement, la Région connait une croissance démographique plus soutenue qu’ailleurs alors que le territoire est très restreint. Les dépôts illégaux de déchets constituent donc une problématique forte et réelle.
Quelles sont les opérations de lutte contre les dépôts sauvages menées par la Région ?
Je tiens à préciser qu’en l’espèce, la Région n’est jamais maître d’ouvrage hormis dans certains cas particuliers. De manière générale, nous ne sommes pas opérateurs. Par contre, nous allons soutenir financièrement les collectivités et les acteurs que sont les maîtres d’ouvrage, comme les intercommunalités, les départements mais également les agriculteurs qui sont aussi victimes de ce phénomène. Pour ce faire, nous avons créé un fonds, Île-de-France propre qui, au mois de novembre, a permis de soutenir 118 projets en l’espace de deux ans pour un montant de 7,6 millions d’euros. Nous avons aidé les collectivités à nettoyer les points de dépôt sauvage ou nous les avons prévenu si un dépôt se trouvait sur leur territoire.
Vous savez, une des difficultés lorsque vous nettoyez une décharge sauvage réside dans le fait que si vous n’en condamnez pas l’accès à l’aide d’éléments physiques ou dissuasifs comme de la surveillance vidéo, vous risquez la renaissance de ce point. Et si vous le faites, dès que vous condamnez le site, les mêmes délinquants vont aller quelques kilomètres plus loin pour déposer une typologie identique de déchets et poursuivre ainsi leurs méfaits. Il faut donc mailler le territoire pour rendre de plus en plus compliqué l’accès aux sites et, surtout, durcir les sanctions potentielles, ce que le gouvernement est en train de faire, je l’avoue. Mais nous devons pouvoir en bénéficier dès à présent car il existe à l’heure actuelle une certaine forme d’impunité.
Vous étiez le 4 novembre avec Brune Poirson, secrétaire d’État auprès du ministre d’État, ministre de la Transition écologique et solidaire, en visite à la décharge sauvage de Carrières-sous-Poissy (Yvelines). Elle a notamment déclaré qu’il fallait renforcer le pouvoir de sanction des maires. Vous êtes également maire de Mennecy (Essonne), y êtes-vous favorable ?
Oui, en effet, cela va dans le bon sens et nous devons aller plus loin. Avant tout, il faut une poursuite systématique de la part des parquets et du ministère public. Car actuellement, nous assistons à un florilège de classements sans suite de ces affaires. Or ces délinquants gagnent de l’argent en jetant illégalement ces déchets. Car il ne faut pas oublier que c’est un business : des entreprises indélicates facturent le coût de retraitement des déchets illégalement répandus ensuite dans la nature. Il s’agit d’une véritable économie parallèle. En tant que maire, j’ai été confronté à ces classements sans suite. Le fait d’identifier l’adresse des personnes concernées dans les déchets ou de filmer les auteurs de ces délits descendre de leur voiture ne suffit pas à déclencher des procédures judiciaires.
Dernière chose, la question de la gratuité des déchèteries pour les professionnels avec la mise en place d’un système de financement par la filière qui doit faire des progrès sur les dépôts sauvages notamment dans le BTP. C’est la responsabilité élargie du producteur (REP) qui fait partie des amendements au projet de loi anti-gaspillage utilement adoptés par le Sénat. Une limite tout de même, c’est que l’on parle de déchets triés, or, le tri a un cout, Le risque est donc que l’on n’aille pas au bout de la logique, car le tri prend du temps.