J. Ramos : « Les collectivités locales doivent lancer dès à présent les chantiers du quotidien »

Le président de la Fédération régionale des travaux publics d’Ile-de-France (FRTP) redoute un premier semestre 2021 critique si les collectivités locales n’accélèrent pas le lancement des chantiers du quotidien.

Comment réagissez-vous au reconfinement ?

Globalement, aujourd’hui, nous nous sommes habitués aux mesures sanitaires, qui risquent, comme l’a indiqué le président de la République, d’être en vigueur encore des mois, sans doute jusqu’à l’été prochain, peut-être au-delà. On s’habitue à la Covid-19, on s’organise. Je constate d’ailleurs que l’on n’entend pas parler de cluster au sein des entreprises du BTP.

José Ramos. © Jgp

Mais aujourd’hui, c’est la fermeture des hôtels et des restaurants, dans le cadre du reconfinement, qui pose problème pour le personnel et les compagnons en grand déplacement. Je pense notamment aux chantiers du Grand Paris, sur lesquels œuvrent plusieurs milliers de compagnons. Si l’on veut, comme annoncé par le président, maintenir l’activité, c’est un point qu’il faut régler dans les jours qui viennent. C’est une problématique qui n’a pas été, semble-t-il, suffisamment prise en compte, d’autant plus en période d’hiver.

Redoutez-vous une baisse de l’investissement local ?

A la suite du renouvellement des équipes, après les élections municipales de juin dernier, les élus de communes, des Territoires et de la Métropole sont en place depuis septembre. Les périodes de début de mandat, toujours un peu complexes, sont rendues plus difficiles encore, cette fois, avec pour les élus les problématiques d’accueil des élèves dans les écoles, de soutien aux commerces, etc.

La baisse d’activité subie par certains secteurs économiques très présents en Ile-de-France, je pense à l’industrie automobile, à l’aéronautique, sans parler du tourisme, fait par exemple que les Départements vont être très impactés et faire face à une augmentation du budget qu’ils versent au titre du revenu de solidarité active (RSA). Cela se répercutera forcément sur les budgets d’investissement. Nous sommes donc très inquiets.

Vos adhérents subissent-ils des annulations de commandes ?

Certains oui, en effet, y compris de la part de certains grands maîtres d’ouvrage publics. Les hôpitaux, par exemple, doivent consentir à des achats supplémentaires en équipements sanitaires et risquent de réduire leurs budgets d’investissements d’autant. Aéroports de Paris connaît des difficultés importantes, et la totalité des crédits du contrat de plan Etat-Région (CPER) dédiés aux infrastructures a été consommée. Les collectivités du bloc communal doivent donc autant que possible lancer des chantiers, dès à présent, afin que nos entreprises aient de l’activité au premier semestre 2021, et soient encore en activité pour mettre en œuvre le plan de relance. Les appels d’offres publics ont accusé une baisse de 70 % en avril-mai dernier. On est à moins 35 % aujourd’hui. Tout cela se cumule. Et il faut en moyenne deux à trois mois, pour les chantiers du quotidien, entre leur lancement et le début des travaux.

Les mannes du plan de relance se mettent-elles en place ?

Rien ne démarrera avant trois à six mois. On est sur un plan de relance de longue haleine, qui va s’étendre sur plusieurs années, deux voire quatre ans. Ce dont nous avons besoin, c’est d’un plan de continuité, alors que l’impact de la pandémie s’ajoute au ralentissement lié au cycle électoral.

Cela ne concerne que les PME ?

Non. Les grands groupes sont également touchés, même s’ils sont astreints à des obligations de confidentialité. Aujourd’hui, mes adhérents dans les majors sont également inquiets pour le premier semestre 2021 si les collectivités locales ne sont pas au rendez-vous. Elles doivent l’être, car la commande privée est très faible. Les grands projets d’aménagement, mis à part les travaux du Grand Paris express, sont actuellement en sommeil. Or les entreprises locales travaillent pour 85 % de leur activité avec des marchés publics.

Chantier du Grand Paris express, à la gare de Pont de Sèvres. © Jgp

Les collectivités ont-elles suffisamment mis en place les outils leur permettant de maintenir l’activité en période de pandémie, je pense notamment à la dématérialisation des procédures ?

En réalité, la dématérialisation totale de nos activités n’est pas possible, pour les collectivités comme pour nos entreprises. Je dispose, dans mon entreprise, de plusieurs postes en VPN (virtual private network), mais cela ne concerne pas l’ensemble des postes, pour des questions de coûts mais aussi des questions liées à la cybercriminalité. Ajoutons que le travail en visio-conférence est moins efficace qu’en présentiel.

La transition énergétique constitue-elle des opportunités pour les entreprises ?

La mise en place de bornes de recharge pour véhicules électriques ou de parking de rabattement autour des gares constituent en effet autant d’opportunités, pour lesquelles il faudrait sans doute également accélérer le lancement des chantiers, encore relativement rares. Nous sommes souvent, sur ces questions, confrontés aux délais liés aux acquisitions foncières nécessaires, ce qui n’est pas le cas pour la Société du Grand Paris, dont les chantiers avancent aujourd’hui à leur vitesse de croisière, notamment grâce aux articles de loi spécifiques dont elle bénéficie. L’accent mis sur la rénovation énergétique des bâtiments peut indirectement nous concerner, dans le cadre de travaux de géothermie, de creusement de puits canadiens ou d’unité de méthanisation par exemple.

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