La métropole du Grand Paris, la ville de Paris, l’établissement Seine Grands Lacs et l’OCDE se sont associés pour réaliser une étude prospective qui évalue les impacts socio-économiques d’une raréfaction de la ressource en eau. Une étude dévoilée en avant-première lors du 5e Sommet de l’axe Seine.
Le sujet de la gestion de la ressource en eau, l’établissement public territorial de bassin Seine Grands lacs le connaît bien, rappelle son président Patrick Ollier, également président de la métropole du Grand Paris. Cependant, ces dernières années, des besoins nouveaux ont émergé à l’aune du changement climatique. C’est tout l’enjeu de la Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) à propos de laquelle des synergies se mettent en place avec les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la vallée de la Seine, réunis au sein de l’Entente Axe Seine.
Mathilde Mesnard, directrice adjointe et coordinatrice de l’OCDE pour le climat et la finance verte, prévient : « l’Ile-de-France fait face à une menace sérieuse liée au changement climatique » en raison d’une variabilité accrue des phénomènes climatiques extrêmes. « Depuis 1990, la température moyenne a augmenté de 2°C, l’humidité des sols a reculé de 5 % et la durée des sécheresses a progressé de 20 % ». Une tendance bien partie pour s’aggraver, constate-t-elle, avec une diminution des précipitations en été et une évapotranspiration des sols en forte croissance (+ 15 %) d’ici à 2050, ainsi qu’une diminution du débit des cours d’eau. Autant de phénomènes qui impactent lourdement l’agriculture et l’industrie, mais aussi le secteur de la construction avec des conséquences importantes liées au retrait-gonflement des argiles qui fragilise les bâtiments.
Face à cela, la région parisienne est-elle préparée ? Historiquement épargnée, elle bénéficie de l’action des grands lacs situés en amont de la Capitale ainsi que d’une consommation « relativement basse » en comparaison d’autres pays. Pour améliorer ses dispositifs de défense, Mathilde Mesnard préconise d’encourager la collecte des eaux de pluie ou encore le stockage naturel, solution qui passera par une meilleure connaissance de l’écosystème. Enfin, elle suggère d’inscrire une planification qui aille « au-delà de 2030 » afin de prendre le plus précocement possible les mesures adaptées.
Modifier les comportements
Pénélope Komitès, adjointe à la maire de Paris en charge de l’innovation, de l’attractivité, de la prospective et de la résilience, confirme que « le risque de sécheresse est déjà identifié » et ce depuis l’adoption en 2017 d’une stratégie de résilience dont la mise à jour se discute actuellement au Conseil de Paris. Dans ce cadre, la Ville appelle les industriels comme l’ensemble des acteurs du territoire « à modifier leurs comportements », la municipalité parisienne se fixant en retour la mission de « sensibiliser les Parisiens » et à mieux les informer sur la question des économies d’eau. Avec en ligne de mire, la perspective « d’une ville perméable » qui prenne mieux en compte la gestion des ruissellements. Dan Lert, adjoint en charge de la transition écologique, confirme : les étés chauds impactent la disponibilité de la ressource en eau. L’élu craint d’ailleurs que les tensions ne se multiplient à l’avenir, tant sur la quantité que sur la qualité de l’eau. Le Conseil de Paris va donc proposer un plan d’économie de la ressource en eau avec à la clé une économie de 15 % sur les prélèvements d’ici à 2030. « Un changement de paradigme complet » qui passera par « une révolution des usages à Paris », veut croire l’élu.
Multiplier la durée des périodes d’étiage
Du côté de Seine Grands lacs, « on devra retenir davantage d’eau en amont », estime Patrick Ollier, « et multiplier la durée des périodes d’étiage ». Quoi qu’il en soit, « une course contre la montre » est engagée et des actions communes se mettent en place à l’échelle de la vallée de la Seine avec les partenaires de l’Entente Axe Seine qui réunit 16 EPCI entre Paris et Le Havre. « Nous allons mener un diagnostic pour mieux connaitre la situation sur les thématiques de la Gemapi », explique Claire Beyeler, cheffe du service Gemapi au sein de la MGP, et déterminer « si les enjeux sont les mêmes » sur l’ensemble du linéaire de la Seine aval. Ce à quoi Hugo Langlois, représentant de la métropole de Rouen, rappelle que « la question de la marée » pèse plus dans les boucles de la Seine normande qu’à Paris. Un phénomène d’accélération des débits est également à l’œuvre, pointe l’élu, lié à la montée du niveau des océans ainsi qu’aux travaux de dragages engagés ces dernières années pour approfondir le tirant d’eau des accès au port de Rouen, « qui accélèrent le marnage ». Au niveau de l’Entente Axe seine, la métropole du Grand Paris a été désignée comme pilote des actions menées en termes de Gemapi, rappelle Daniel-Georges Courtois, conseiller délégué aux coopérations et aux relations territoriales de la métropole.