Dans une note d’analyse détaillée, l’Atelier parisien d’urbanisme dresse le portrait d’un Paris de plus en plus marqué par les inégalités sociales, territoriales et économiques. Si certains indicateurs restent meilleurs qu’ailleurs, l’aggravation des précarités, notamment dans l’est parisien, appelle une vigilance renforcée.
La vitalité démographique et économique de Paris ne suffit plus à masquer les profondes fractures sociales qui traversent la Capitale. Dans sa dernière note, l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) met en lumière une série d’indicateurs préoccupants : montée de la pauvreté, inégalités d’accès au logement, surreprésentation des familles monoparentales et persistance de poches de grande précarité, notamment dans les 18e, 19e et 20e arrondissements.
Le taux de pauvreté s’élève désormais à 16,5 % dans Paris intra-muros, un chiffre qui reste en deçà de la moyenne nationale (14,5 %), mais qui traduit un recul par rapport aux années précédentes. La crise du logement, aiguë, alimente ces fragilités : 30 % des Parisiens sont locataires du parc social, mais la part des logements sur-occupés ou inadaptés progresse. L’Apur souligne également la précarisation croissante des jeunes et des étudiants, notamment dans les quartiers périphériques.

Alors que les arrondissements centraux concentrent les ménages les plus aisés et les cadres, l’est parisien cumule les difficultés. Le marché de Belleville. © Jgp
Sur le plan territorial, les écarts se creusent. Alors que les arrondissements centraux concentrent les ménages les plus aisés et les cadres, l’est parisien cumule les difficultés : faible taux d’activité, moindre accès aux soins, forte dépendance aux minimas sociaux. La géographie de la pauvreté épouse celle de la vacance scolaire et des difficultés d’insertion.
Des actions plus systémiques nécessaires
Autre enseignement saillant : la part croissante des travailleurs pauvres et des ménages dépendant d’emplois précaires ou discontinus. Cette précarité laborieuse touche particulièrement les femmes, les jeunes et les immigrés récents, accentuant les clivages au sein même de la population active.
Pour les auteurs de la note, ces constats doivent servir de boussole aux politiques publiques à venir. La ville de Paris dispose d’atouts – un tissu associatif dense, une offre de services publics étendue, un effort de construction de logements sociaux soutenu – mais l’ampleur des inégalités nécessite une action plus systémique. Il s’agira notamment de lutter contre la ségrégation résidentielle, de mieux accompagner les familles fragiles et de garantir un accès équitable à l’éducation, à la santé et à l’emploi.
En dressant ce diagnostic, l’Apur rappelle que Paris, au-delà de son image de ville-monde, demeure un territoire habité, traversé par des vulnérabilités fortes qu’il devient urgent de considérer dans leur complexité.
* 16,5 % de taux de pauvreté à Paris, contre 14,5 % au niveau national (Insee 2021).
* 30 % des Parisiens sont logés dans le parc social (PLS, PLUS, PLAI).
* 8 % des logements parisiens sont considérés comme sur-occupés.
* 28 % des familles parisiennes (taux supérieur à la moyenne nationale).
* 7,2 % de chômeurs à Paris au 3e trimestre 2023, mais supérieur à 10 % dans certains quartiers de l’est.
* 12 % des ménages parisiens perçoivent au moins une prestation type RSA ou Aspa (allocation de solidarité aux personnes âgées).
* Près de 40 % des 18-24 ans vivent sous le seuil de pauvreté dans les quartiers populaires.
* 20 % des Parisiens déclarent avoir renoncé à des soins pour raisons financières en 2022.
* Plus de 50 % des immigrés arrivés après 2010 résident dans l’est parisien.