La société de conseil et d’investissement spécialisée dans le repositionnement d’actifs au sein du Grand Paris met en avant l’énorme économie de carbone que permet la transformation de bureaux en logements, comparée à la construction neuve. Des arguments qui semblent particulièrement adaptés dans la perspective du zéro émission nette et du zéro artificialisation nette. A fortiori dans une région capitale caractérisée par l’importance de son volume de locaux tertiaires obsolescents ou en voie de l’être.
La transformation de bureaux en logements a le vent en poupe. Singulièrement en Ile-de-France. Les dirigeants de Kareg, créée en 2018 par Raphaël Tréguier, rejoint depuis notamment par Benoit Labat, ancien directeur de l’immobilier de la Société du Grand Paris, et Xavier Lépine, président de l’Institut de l’épargne immobilière et foncière (IEIF) et de Paris-Ile-de-France Capitale économique, sortent une batterie de chiffres pour démontrer à quel point la mutation d’une partie du parc tertiaire francilien, obsolescent ou en voie de l’être, est la solution pour réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction, un des principaux émetteurs.
Raphaël Tréguier rappelle en préambule que la construction d’un mètre carré habitable neuf produit en moyenne une tonne d’équivalent carbone. La construction des 300 000 logements qui constituent le déficit francilien estimé, à l’instant T, représentent 20 000 000 m², soit 20 000 000 tonnes d’équivalent CO2, poursuit-il. Or la capacité d’absorption de l’ensemble des forêts en Ile-de-France (72 500 ha de forêts) s’élève à 435 000 tonnes d’équivalent CO2 par an. Autrement dit, il faudrait 40 ans pour absorber l’empreinte carbone ainsi générée.
« Or réhabiliter divise par deux l’empreinte carbone de la construction », résume l’ancien directeur général de Cegereal, foncière de bureaux cotée. Selon les chiffres de Kareg, la réhabilitation générerait 460 kg d’équivalent carbone par m2, la construction bois 660, la construction neuve exemplaire aux normes de la RE2020 740 kg par m2 et une construction neuve classique 900 kg…
Un pipeline de foncier d’1,5 million de m2 par an
« L’Ile-de-France dispose d’un pipeline de foncier considérable de 1,5 million de m²/an issus de l’obsolescence naturelle du parc tertiaire en Ile-de-France (parc de 55 millions de m²) », ajoute Benoit Labat, directeur du développement de Kareg. Des locaux mutables facilement pour la plupart d’entre eux, la transformation des dalles en balcons permettant de passer des profondeurs standards de bureaux, de 18 m de long, à celle des logements, de 15 m de long.
L’intensification de la transformation de bureaux en logements, encore confidentielle (*), permettra en outre à la région de respecter les impératifs de zéro artificialisation nette (ZAN), alors que 22 % de son territoire est déjà artificialisé, soit quatre fois la moyenne nationale. « Nous souhaitons enfin offrir aux Franciliens des logements adaptés, aux familles monoparentales, au télétravail. Il faut construire l’habitat du futur », poursuit Raphaël Tréguier. « L’essor du télétravail a accéléré l’obsolescence du parc tertiaire, réduisant les surfaces nécessaires à l’accueil des salariés », ajoute Xavier Lépine, senior advisor de Kareg.
« Décloisonner les compétences »
Les managers de la société mettent aussi en avant l’absence de traumatisme que provoque immanquablement la destruction d’un immeuble, la plus grande acceptabilité des projets de transformation, les moindres nuisances occasionnées par des chantiers moins longs, moins bruyants, moins poussiéreux.
« Kareg entend décloisonner les compétences entre les acteurs du secteur immobilier, identifier et partager les datas critiques aux prises de décisions, créer des passerelles entre les modèles économiques du bureau et du logement et encourager l’utilisation par les collectivités des outils juridiques comme la loi Elan », ajoute Raphaël Tréguier. Orientée investissement, Kareg travaille avec les promoteurs sous forme de contrat de promotion immobilière. La société a réalisé de nombreuses études de faisabilité pour les propriétaires de bureaux en quête de solution. Elle a déjà monté une opération de 7 000 m² à Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) vendue à In’li, incluant du logement intermédiaire, du logement social et du coliving. Leur société de gestion Kareg Reim est en train de créer deux fonds, ciblant chacun une taille initiale de 50 millions d’euros : un fonds court terme qui se concentrera sur l’acte de transformation de bureaux en logements et un fonds long terme qui transformera et conservera ses logements vertueux sur le long terme.
(*) 65 opérations de transformation de bureaux en logements recensées en Ile-de-France, soit 420 000 m2 de logements issus de la transformation de bureaux.