Grand Paris Grand Est : s’inventer un avenir commun

Né dans la douleur, constitué de 14 villes dont 12 travaillaient en solitaire, le territoire de Grand Paris Grand Est s’est néanmoins mis au travail avec beaucoup d’application. Reste à lui trouver un destin partagé, entre le pôle d’activité de Noisy-le-Grand, celui de Rosny-sous-Bois et les communes résidentielles qui le constituent.

Nous sommes un peu le ventre mou de la Seine-Saint-Denis ». Michel Teulet, maire (LR) de Gagny et président de Grand Paris Grand Est (Seine-Saint-Denis), n’a pas peur de le reconnaître : alors que son voisin, Terres d’envol, situé sur l’axe Le Bourget-Aéroport Charles de Gaulle, trouve naturellement sa voie de porte d’entrée vers Paris, son territoire, lui, n’a pas de destin tout tracé. C’est, en outre, un territoire où les maires avaient, jusqu’à présent, choisi le travail en solitaire : les 14 communes qui le composent étaient pour 12 d’entre elles des communes non affiliées à une intercommunalité. Seules exceptions : les deux villes de Clichy et de Montfermeil, qui collaboraient depuis 1998 dans une communauté d’agglomération, et dont les services font du reste aujourd’hui office de services du nouveau territoire.

Au-delà des frontières

Ce regroupement n’a, en outre, pas fait beaucoup d’heureux : certaines villes du nord du territoire se sentaient plus d’affinités avec leurs voisines aujourd’hui intégrées dans Terres d’Envol. Quant aux municipalités du sud, elles collaboraient déjà largement avec leurs voisines du Val-de-Marne, voire de Seine-et-Marne. Deux d’entre elles (Neuilly-Plaisance et Rosny-sous-Bois) étaient du reste membre de l’Actep, syndicat mixte d’études et de projets de l’Est parisien, regroupant 14 communes essentiellement val-de-marnaises. Brigitte Marsigny (LR), la nouvelle maire de Noisy-le-Grand – ville un temps membre de l’Actep – résume : « Nous nous trouvons à la lisière de trois départements – le 93, le 94 et le 77 – et il est naturel que nous collaborions au-delà des frontières administratives ! »

Quelques communes ont du reste ouvert un contentieux administratif pour annuler leur rattachement au territoire. Pour couronner le tout, certains maires n’arrivent toujours pas à digérer la loi NOTRe. Tel Xavier Lemoine, édile de Montfermeil : « la logique profonde de cette réforme territoriale est la disparition des maires que nous sommes. Quant à la centralisation des circuits financiers, elle prive les territoires de tout intérêt au développement économique ! »

ZAC des Coteaux Beauclair à Rosny-sous-Bois.

ZAC des Coteaux Beauclair à Rosny-sous-Bois. © JGP

Ce contexte délicat aurait pu présager du pire. Et pourtant… de Clichy à Noisy-le-Grand, de Gagny à Montfermeil, tous les maires du territoire se réunissent chaque lundi, et ce, depuis le mois de septembre, pour préparer la réforme. « Et on s’entend plutôt très bien », assure la maire de Noisy-le-Grand, Brigitte Marsigny.

« Ça se passe plutôt pas mal », confirme Olivier Klein, maire (PS) de Clichy-sous-Bois. « Puisque nous allions être obligés de travailler ensemble, nous avons eu la sagesse de commencer à le faire d’autant plus tôt que nous étions novices en la matière », résume sobrement Michel Teulet. Pour faciliter la transition et bien ancrer l’action du territoire sur le terrain, le bureau est constitué des 14 maires de Grand Paris Grand Est. Pour l’instant, le territoire s’occupe essentiellement de la mise en place des compétences obligatoires que sont la gestion des déchets et de l’assainissement. Avec notamment, une cartographie des déchetteries existantes pour mieux mailler le territoire.

« La Défense de l’est parisien »

« On n’en est pas encore aux projets de développement économique », reconnaît Olivier Klein. En la matière, tout est, là aussi, à créer. Le territoire n’a guère de tradition industrielle ou de vocation naturelle. Ses deux seuls centres économiques de taille se situent à Rosny-sous-Bois et à Noisy-le-Grand, avec son quartier d’affaires, Mont d’Est et son centre universitaire et de recherche à cheval sur les communes de Noisy et de Champs-sur-Marne (cluster Descartes). Une ville qui compte bien s’affirmer encore plus comme « La Défense de l’est parisien » avec notamment le développement du cluster Descartes, mais aussi le projet Maille Horizon près du lycée international qui va sensiblement augmenter l’offre de locaux d’activités et de logements.

Reste à savoir si ce dynamisme aura un effet d’entraînement sur le reste du territoire. « Les transports en commun sont pour l’instant inadaptés, et en voiture, il faut passer l’unique pont sur la Marne », témoigne Michel Teulet. Mais côté transports, l’offre sera bientôt totalement renouvelée : extension de la ligne 11 du métro, T4, et nouvelles gares du Grand Paris express. « Cela va sans nul doute contribuer à fédérer le territoire, et à augmenter les déplacements entre les différentes villes, estime Olivier Klein. Et certainement, à créer un véritable bassin de vie. »

Top