1er classement Le journal du Grand Paris / Simco : Les dotations communales, révélatrices d’inégalités

A l’occasion du Congrès des maires, Le journal du Grand Paris et Simco dressent un portrait financier de la métropole du Grand Paris au travers des dotations perçues par les communes qui la composeront.

Mairie de Clichy-sous-Bois. @ Judith Amalric

Mairie de Clichy-sous-Bois. @ Judith Amalric

Clichy-sous-Bois, avec 870 euros de dotations de l’Etat par habitant se situe en tête du classement Le journal du Grand Paris/Simco. Vélizy-Villacoublay, avec 45 euros par habitant, se place à l’autre extrême des 133 communes. Avec 10 % de la population nationale, la future métropole assume en 2014, 18 % de la baisse des dotations du bloc communal, proportionnelle aux recettes réelles de fonctionnement de chaque collectivité. Elle contribue par ailleurs à 39 % de la péréquation communale nationale quand elle n’en récupère que 3 %.

Des éléments qui peuvent sembler contradictoires mais qui s’expliquent par les différences de richesse des villes qui la composent. Si Paris ou certaines municipalités des Hauts-de-Seine se trouvent dans des situations confortables, 80 des 133 communes de la future métropole sont éligibles à la dotation de solidarité urbaine (DSU), versée aux territoires en difficulté. La prise en compte de cette dotation dans la lecture de la situation du territoire permet d’éviter les conclusions hâtives, puisqu’elle fait figurer plusieurs de celles qui la perçoivent en tête du classement ici proposé. En effet, si neuf communes de Seine-Saint-Denis figurent dans les dix premières, cela ne signifie pas qu’elles sont riches. Au contraire, cela veut dire que des mécanismes ont été mis en place pour leur venir en aide.

Dix premières et dix dernières communes de la future métropole en fonction de leurs dotations.

Dix premières et dix dernières communes de la future métropole en fonction de leurs dotations.

« Pour les neuf premières communes du classement, le niveau de dotation représente plus de deux fois la moyenne par habitant de la métropole. Toutefois, contrairement à la métropole dans son ensemble, la composante « historique » des dotations de l’Etat reste à un niveau comparable à la moyenne nationale tandis que la DSU et le fonds de péréquation régional représentent à eux seuls un tiers de la dotation globale de fonctionnement (DGF) perçue sur ces communes. », indique Bryann Mahé, co-fondateur de Simco.

Car le décryptage des dotations perçues nécessitent de rappeler leur forte composante historique, les réformes successives de ces dotations ayant contribué à figer des situations acquises, à l’instar de la réforme de la DGF en 1993 qui a ainsi gelé la répartition de la composante de base des dotations jusqu’en 2005. Ainsi, la commune d’Orly figure au dixième rang du classement en raison du niveau « exceptionnellement élevé » de la composante « historique » de ses ressources, notent les experts de Simco.

De l’autre côté du spectre, les mécanismes de péréquation et la contribution à la baisse des dotations appliquées depuis 2013 par l’Etat pénalisent les communes qui apparaissent comme les moins bien dotées. « Pour les dix dernières du classement, le niveau de contribution aux fonds de péréquation ainsi qu’au redressement des finances publiques représente plus d’un tiers de leur DGF initiale », remarque Bryann Mahé. Leur niveau de dotations est environ trois fois inférieur à la moyenne de la métropole. « La dernière commune, Vélizy-Villacoublay afficherait même un niveau négatif de DGF par habitant du fait de sa contribution à la péréquation régionale, si la DGF par habitant de l’intercommunalité à laquelle elle appartient ne ramenait toutefois le niveau global au-dessus de zéro », ajoute-t-il. Le fait de ne pas appartenir à des intercommunalités pénalise cinq des dix dernières communes du classement qui ne bénéficient pas de ce « rattrapage » intercommunal.

Ces données font naître des interrogations par rapport aux changements à venir. « Alors que le territoire de la future métropole concentre une partie importante de l’activité économique et de la population du pays, on constate que les dotations attribuées par l’Etat sont en grande partie liées à des composantes historiques qui ne prennent plus en compte ni les évolutions démographiques ni les charges de centralité », note Etienne Cailly, co-fondateur de Simco.

Les curiosités des mécanismes des finances locales ne s’arrêtent pas là, puisque les municipalités les mieux dotées sont celles qui perçoivent la DSU. Or ce bénéfice est contrebalancé par la baisse des dotations qui touche indistinctement les communes du classement car elle repose sur l’unique critère des recettes réelles de fonctionnement, sans tenir compte de leur situation.

Des écarts lissés

« Les communes qui bénéficient de recettes plus importantes, mais qui doivent également faire face à des charges importantes, sont de fait pénalisées, observe le directeur général de Simco. Les communes et intercommunalités de la future métropole se situent précisément dans cette catégorie. Le projet de loi de finances pour 2015 tente de corriger cette situation en renforçant la DSU. Reste à savoir si ces mesures seront suffisantes jusqu’en 2017. »

Les effets de la construction métropolitaine devraient aussi être sensibles pour les municipalités abritant les populations les plus pauvres. Les écarts importants de dotations que fait apparaître ce classement constituent un point de discussion pour la future métropole et les relations financières qu’elle devra entretenir avec ses communes membres. Etienne Cailly, fait valoir qu’en effet, « les critères actuels de répartition de dotation, en incorporant la richesse fiscale de l’intercommunalité dans la richesse fiscale estimée des communes, risquent de lisser les écarts de potentiel financier* des communes membres, les rendant pour certaines artificiellement plus riches ». Ce handicap, conséquence de leur intégration à la métropole, sera sans doute un motif pour obtenir des compensations de la part du nouvel ensemble.

Les points de discussion ne manqueront pas, notamment en termes de fiscalité. Si la cotisation foncière des entreprises était affectée au niveau métropolitain, les écarts de taux (de 13 % pour Marnes-la-Coquette à 49 % pour Le Blanc-Mesnil), sans compter les différentes politiques d’exonération, devraient par exemple faire l’objet d’intenses négociations si certaines mairies ne veulent pas se mettre à dos les entrepreneurs implantés sur leur territoire.

* Indicateur consistant à objectiver les ressources fiscales mobilisables sur un territoire donné utilisé pour la répartition des dotations de péréquation versées aux communes.

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