Le colloque sur la concertation citoyenne organisé par l’Amif le 19 septembre 2019 posait la question suivante : « au lendemain du Grand débat national, quelles perspectives pour la démocratie participative à l’échelle locale ». Si de nombreuses solutions existent, les intervenants ont dénoncé un retard de l’Ile-de-France spécifique à la région aux 1 200 communes.
La question est moins simple qu’il n’y paraît : « au lendemain du Grand débat national, quelles perspectives pour la démocratie participative à l’échelle locale ». Voila pour le thème du colloque concertation citoyenne organisé par l’association des maires d’Île-de-France (Amif) le 19 septembre. La journée était articulée autour de plusieurs tables rondes présentant les expériences innovantes en Ile-de-France, les outils de participation à disposition des maires, la conciliation entre démocratie représentative et participative ou encore les outils de la civitech et leur intérêt dans la transformation de la participation citoyenne.
« Grâce à ce colloque nous tentons d’analyser une manière d’adosser la démocratie élective des élus et la démocratie participative des citoyens afin de permettre une coconstruction de l’ensemble des politiques publiques », a résumé Stéphane Beaudet, président de l’Amif.
Réinventer le modèle communal
Avant cela, la journée avait débuté par le renouvellement de la signature de la convention entre l’Amif et la Caisse des dépôts, représentée par Marianne Louradour, directrice régionale Ile-de-France de la Banque des territoires. « Ce partenariat, nous l’avions signé en 2016 et nous y trouvons notre compte grâce à la coconstruction que nous y développons », a-t-elle souligné à son tour. Pour le président de l’Amif, « les conventions de partenariat permettent aux élus de travailler avec des experts sans lesquels ils seraient difficile de réinventer le modèle communal ».
La démocratie participative peine à toucher l’Île-de-France
« Nous avons testé beaucoup de dispositif de démocratie participative au sein de ma commune, des conseils de quartier ou des réunions publiques mais nous avons le sentiment que le résultat n’est guère satisfaisant, a introduit Stéphane Beaudet. Nous devons essayer de construire ou d’apprendre à mettre en place ce nouveau modèle. Les colloques servent à construire cette démarche et nous devons nous demander pourquoi nous faisons cela. La démocratie participative n’est pas un hasard de notre histoire mais un concept profond et enraciné », a-t-il fait valoir.
Plusieurs intervenants ont estimé que la démocratie participative peine à se développer dans la région Capitale quelque soit les modalités ou outils utilisés. « Pour le moment la région Île-de-France est frileuse vis-à-vis de la démarche, sur 2 000 communes concernées en France par la journée citoyenne, trois sont franciliennes », a déploré Michel Gonord, ambassadeur de la journée citoyenne en Île-de-France. Constant similaire pour Nathalie Poulet, cheffe adjointe du service développement durable des territoires et des entreprises à la Direction régionale et interdépartementale de l’environnement et de l’énergie (DRIEE), qui a rappelé que trop peu d’adhérents de la charte de la participation du public sont franciliens. Il en va de même pour les conseils de développement, très peu répandus en Île-de-France.
« Un enjeu de transformation de la culture politique »
« De manière générale, la mise en œuvre des conseils citoyens est difficile dans la plupart des quartiers en politique de la ville où ils sont obligatoires. Les différences avec les conseils de quartier sont nombreuses : ils sont plus autonomes vis-à-vis de la ville, sont mis en place par le préfet et non les élus locaux qui n’ont pas le droit d’y siéger, ils sont autonomes financièrement car financés par la préfecture et 50 % de leur composition est citoyenne, en tout cas sur le papier. Ces conseils auraient pu constituer une réelle innovation dans un pays où les institutions sont très présentes. Mais ils ont été rattrapé par la tradition française de fort contrôle des institutions avec des élus animateurs voire participant directement aux conseils et des citoyens très limités dans leur participation. Les conseils citoyens sont des spectateurs et non des acteurs des contrats de ville et vous allez avoir beaucoup de conflit entre les citoyens et les élus qui voient d’un mauvais œil l’autonomie des conseils.
Actuellement, dans la grande majorité des conseils citoyens, 75 % des habitants ont arrêté de participer car ils ont l’impression qu’ils ne servent à rien. Il existe des endroits où ça se passe bien mais il faut assumer le jeu de l’autonomie pour que cela fonctionne et leur laisser de la place. L’enjeu de ce type de dispositif est un enjeu de transformation de la culture politique qui anime notre pays, il faut accepter le jeu du désaccord, de la contradiction voire du contrepouvoir. Cette frilosité est spécifiquement française du fait d’une emprise unique au monde des institutions en France. Ne sachant quoi faire, nous sommes revenus vers une municipalisation des conseils de quartier mais ni les élus ni les citoyens sont à blâmés plus que de raison. »