« Près de 800 lieux de diffusion du spectacle vivant (théâtres, salles de concert, centres culturels, MJC, médiathèques, etc.) et 130 festivals musicaux attendent qu’on parle d’eux en banlieue, où vivent 9 730 186 spectateurs potentiels, soit l’équivalent de la population de l’Autriche », souligne Vianney Delourme, cofondateur d’Enlarge your Paris.
On peut avoir plus de 20 siècles et continuer de grandir. Paris en est l’illustration. Avec la création de la métropole le 1er janvier, la ville vient de vivre une poussée de croissance comme elle n’en avait plus connu depuis Haussmann. La différence avec l’époque du baron est qu’aujourd’hui il ne s’agit plus pour elle de digérer ses voisines mais de mieux cohabiter avec elles. Il est fini le temps où chacun vivait de son côté du périph’. Désormais, le tiers de la population active parisienne officie en banlieue alors que dans les années 1970, l’essentiel des Parisiens travaillaient dans Paris. Comme le fait remarquer Frédéric Gilli, co-fondateur de metropolitiques.eu et chercheur à Sciences Po, « la métropole est une réalité pour les habitants depuis longtemps mais il faut toujours du temps pour que les institutions mesurent l’intensité des attentes et soient en mesure de conduire les changements profonds d’organisation ».
S’affranchir des limites du périph’
Toutefois, le Grand Paris n’est pas qu’une question de meccano administratif. Il s’agit aussi d’un récit commun. Le problème est qu’aujourd’hui, c’est Paris qui tient la plume. Nul n’ignore les richesses culturelles et patrimoniales du cœur de la métropole. En revanche, qui connaît celles de sa corolle en dehors du château de Versailles et de Disneyland ? Les banlieusards eux-mêmes s’en remettent à Paris intra-muros pour les étonner.
Comment leur en vouloir ? L’image qu’on leur renvoie de leur territoire est misérabiliste. Il suffit de taper le mot « banlieue » dans Google images pour se retrouver plongé dans un univers de voitures en flammes et de tours décrépies. C’est pourquoi il est grand temps que l’imaginaire de Paris s’affranchisse des limites du périph’ pour faire rayonner ce qui se passe à Saint-Denis, Vitry, Issy, Fontainebleau, Massy, Enghien ou encore Versailles-hors-les-murs-du-château.
Près de 800 lieux de diffusion du spectacle vivant (théâtres, salles de concert, centres culturels, MJC, médiathèques, etc.) et 130 festivals musicaux attendent qu’on parle d’eux en banlieue (1), où vivent faut-il le rappeler 9 730 186 spectateurs potentiels (2), soit l’équivalent de la population de l’Autriche. Outre la culture, la banlieue c’est aussi la verdure. On le sait peu mais l’Ile-de-France est recouverte à 28 % de bois et forêts et 21 % d’espaces urbains, le reste du territoire étant quant à lui dédié à l’agriculture.
Tourner le dos à l’outre-périphérique revient donc à passer à côté de quatre parcs naturels (Haute vallée de Chevreuse, Vexin, Oise-Pays de France, Gâtinais), de domaines forestiers deux fois plus grands que Paris intra-muros (Rambouillet et Fontainebleau) et de parcs encore plus vastes que Central Park himself. Avec ses maigres 350 ha, le jardinet new yorkais arrive loin derrière ses homologues banlieusards comme le parc de Versailles (815 ha), le parc de Saint-Cloud (460 ha) et le parc de La Courneuve (410 ha). Après, tout est question de centralité. L’enjeu est là pour le Grand Paris : doper l’attractivité des quartiers situés extra-muros. Les ingrédients sont réunis. Il n’y a plus qu’à.
1 : sources Arcadi, Cnv, Irma, Sacem
2 : source Insee