Détecter des innovations de toute nature se heurtant aujourd’hui à un blocage normatif dans le but de passer d’une logique de moyens à une logique de résultats. Telle est la vocation du « Permis d’innover », appel à manifestation d’intérêt lancé en décembre 2017, au Simi, par Euromediterranée, Grand Paris aménagement et Bordeaux Euratlantique soutenus par le ministère de la Cohésion des territoires. Ses huit lauréats viennent d’être désignés.
La loi du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine, (art. 88-II) permet de ne pas respecter les règles, qu’elles soient réglementaires ou législatives, afin de faire mieux, qu’il s’agisse d’environnement, de délais de réalisation, de performances diverses. C’est précisément l’esprit de l’AMI « Permis d’innover », lancé par Euromediterranée, Grand Paris aménagement et Bordeaux Euratlantique le 6 décembre 2017 au Simi, soutenus par le ministère de la Cohésion des territoires.
Le 1er mars 2018, 37 offres avaient été déposées. 8 lauréats ont été désignés au ministère de la Cohésion des territoires, jeudi 6 septembre 2018. Ces innovations peuvent parfois concerner plusieurs territoires d’application.
Le jury, composé de Bordeaux Euratlantique, Euroméditérannée, Grand Paris aménagement – Orly Rungis-Seine Amont, a retenu les lauréats suivants :
- Canal architecture pour leur proposition de conception de bâtiments réversibles en termes d’usages dans le cadre d’un permis de construire évolutif.
- Cerib pour leur projet de construction en béton recyclé permettant d’incorporer des granulats de béton recyclés issus de la déconstruction à des taux d’incorporation élevés dans des parties d’ouvrage en béton.
- Cyme + FCBA (regroupement de deux candidats) : le regroupement de Cyme et du FCBA va être proposé pour innover dans la construction bois. Le projet Cyme évite le traitement chimique du bois de construction et le FCBA innove sur la durabilité biologique des structures bois (risque fongique et risque insectes).
- Daquin Ferriere et associés pour l’innovation Phyte’up, système de récupération d’utilisation des eaux grises et des eaux de pluie à l’intérieur du bâtiment. Elle porte également sur une stratégie de réduction des impacts de l’artificialisation des sols.
- Dauphins Architecture pour plusieurs innovations visant à favoriser la synergie entre conception et production du logement comme par exemple : la dérogation à la norme RT2012 pour améliorer la qualité de l’air et le confort en été ; des modes constructifs innovants pour permettre une vraie réversibilité partielle ou totale du bâtiment.
- Hub Architectes pour son « village vertical », qui propose des logements évolutifs et performants sur le plan énergétique, à travers une conception bioclimatique.
- Zabox Edelen start-up dont l’innovation consiste à remplacer les boîtes aux lettres normalisées à ouverture totale par un ensemble combinant des boîtes aux lettres plus petites et des boîtes à colis mutualisées, connectées et sécurisées.
Les EPA ont par ailleurs convenu d’examiner de manière plus approfondie, en dehors du cadre de l’AMI à ce stade, les propositions des candidats suivants :
- Chedemois + Roberta + Safer + Indiggo pour leur projet de pôle agricole de proximité.
- Champenois Architectes et son projet de serre bioclimatique.
- CTICM pour leur projet de laboratoire du réemploi.
Les EPA vont désormais engager un travail avec les lauréats et des opérateurs immobiliers pour permettre le déploiement de leur innovation au sein d’un projet d’aménagement.
Des innovations de toute nature
« Les projets sélectionnés proposent des innovations très différentes (techniques et technologiques, d’usages, architecturales). Les thématiques abordées démontrent la pertinence du dispositif du Permis d’innover qui permet de dépasser les freins normatifs bloquant aujourd’hui la construction d’une ville plus durable, plus résiliente, plus adaptée aux usages actuels », faisaient valoir Euroméditerranée, Bordeaux Euratlantique et Grand Paris aménagement à l’issue de la cérémonie de présentation des lauréats.
« Le projet de loi évolution pour le logement, l’aménagement et le numérique (Elan) élargira le permis d’innover pour l’étendre aux grandes opérations d’urbanisme et aux opérations de revitalisation des territoires pour mettre l’innovation au service de la restauration des villes moyennes, des centres-bourgs, de la préservation du patrimoine pour l’amélioration du cadre de vie des habitants », rappelle le ministère de la Cohésion des territoires. « L’objectif est de faciliter la créativité dans les champs de la transition écologique, du numérique, de l’évolution des usages ou encore des bâtiments modulables », ajoute le ministère.
Sortir des clous
« Il ne s’agira pas, cette fois, de mettre les projets dans les clous mais de nous proposer les clous qui permettent la mise en œuvre de vos projets », avait résumé Thierry Lajoie, directeur général de Grand Paris aménagement, en présentant l’Appel à manifestation d’intérêt « Permis d’innover », le 6 décembre 2017 au Simi. Le Permis d’innover « est l’affirmation du primat de l’usage sur les normes », estimait Hugues Parant, directeur général d’Euroméditerranée. « Le chemin vers l’innovation n’est pas simple, ni sans risque, ni sans surcoût », faisait valoir Stéphane de Faÿ, directeur général de Bordeaux Euratlantique d’où le rôle d’éclaireur joué par les aménageurs publics, par définition moins exposés que les opérateurs privés. « Si l’on veut respecter les objectifs du Grenelle de l’environnement et construire des logements abordables pour tous, il faut bousculer les règles », avait déclaré pour sa part François Bertrand, sous-directeur de l’aménagement durable à la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP).