Le tour de Rungis en compagnie de son maire, Bruno Marcillaud

Le journal du Grand Paris entame une série de visites des communes d’Ile-de-France, en suivant leur meilleur guide : leur maire. Cette semaine, Rungis (Val-de-Marne), connue pour son marché d’intérêt national plus que pour sa qualité de vie résidentielle. Où le maire, Bruno Marcillaud (SE), s’est fait élire notamment pour stopper les projets de construction de logements.

« Nous sommes une ville de 5 700 habitants, indique en préambule Bruno Marcillaud, maire (SE) de Rungis (Val-de-Marne) depuis 2020. Avec 40 000 emplois et le budget d’une commune de 50 000 », ajoute-t-il aussitôt. Si le produit des impôts économiques – cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et cotisation foncière des entreprises (CFE), qui ont remplacé feu la taxe professionnelle – vont désormais aux intercos (métropole du Grand Paris pour l’une, Grand-Orly Seine Bièvre pour l’autre), les mécanismes de garantie, qui font que chaque commune continue à percevoir le niveau de ressources fiscales qui était le sien avant son entrée dans ces structures intercommunales, expliquent l’aisance financière de la ville.

Bruno Marcillaud, maire (SE) de Rungis depuis 2020, dans son bureau. © Jgp.

La ville accueille les pépinières de la ville de Paris. © Jgp.

Le MIN de Rungis. © Jgp

En l’occurrence, posséder sur son périmètre une petite partie de l’aéroport d’Orly et une grande partie du marché d’intérêt national (12 000 emplois), ainsi que la plateforme logistique de Sogaris, présentée comme la plus grande d’Europe, n’est pas neutre. Sans oublier le vaste parc tertiaire Icade, ex-Silic (25 000 emplois), qui abrite les sièges de nombreuses grandes entreprises mondiales, à l’image de Thalès, Lidl, Ricoh ou System U.

Nouveau conservatoire

Faire le tour de la ville avec le nouveau maire c’est donc constater cette aisance au gré des équipements et des projets : nouveau conservatoire de musique, un programme d’une dizaine de millions d’euros dans une ancienne ferme-abbaye, vaste théâtre de 500 places, véloroutes, etc. C’est aussi parcourir une ville comptant, outre les vastes emprises d’activités, de nombreux espaces verts, dont les pépinières où poussent les arbres et les fleurs de la ville de Paris. Une verdure que le maire ne voudrait pour rien au monde céder aux promoteurs. « Lorsqu’ils viennent me voir, je les emmène faire un tour de la ville, puis je leur demande : alors, où voulez-vous construire ? Et ils passent leur chemin… », raconte Bruno Marcillaud, qui fut lui-même à la tête d’une des plus importantes agences immobilières de la région, spécialisée dans les cafés-hôtels-restaurants.

« Je me suis fait élire sur l’arrêt du programme de construction de 450 nouveaux logements, l’agroquartier Montjean ouest, qui aurait complètement changé la physionomie de la ville après la construction, non loin de là, d’une première tranche de 250 logements opérée par Nacarat et Valophis, toujours en cours, raconte l’élu. Nos habitants vivent dans une ville entourée d’aéroports et d’autoroutes et on voudrait bétonner les espaces verts dont ils bénéficient et auxquels ils sont encore plus attachés après le Covid ». Pas de culpabilité de ne pas participer à l’effort régional de construction de logements, compte tenu de la pénurie francilienne ? Pas du tout, répond-il. « Les habitants ne souhaitent pas voir la commune se densifier davantage, d’autant que la ville dispose déjà de 24 % de logements sociaux ». Pour autant, Bruno Marcillaud indique reconstruire la ville sur la ville, dans le diffus, en saisissant chaque occasion de construction offerte dès lors qu’une dent creuse apparaît.

36 ha de terres agricoles

Rungis possède, c’est peu connu, 36 ha de terres agricoles gérées avec l’Agence des espaces verts (AEV), sur lesquelles devait s’élever le projet immobilier stoppé et où le maire est fier de montrer une ferme en permaculture louée par la commune à une permacultrice. Un projet de piste cyclable traversant la plaine de Montjean, qui s’étend sur quelque 200 ha à cheval entre Rungis, Wissous et Fresnes, est à l’étude. L’agroquartier Montjean ouest, projet dont Grand Paris aménagement devait être l’aménageur, est en cours de rétrocession à l’AEV. « Nous sommes une petite pépite dans le Val-de-Marne, sans problèmes d’emplois, ni sociaux, où les entreprises viennent d’elles-mêmes », poursuit Bruno Marcillaud, qui cite par exemple l’Ecole Lenôtre, inaugurée le 9 septembre dans le parc Icade, au sein duquel le maire assure que le taux de vacance est très faible.

L’école Lenôtre vient d’être inaugurée au sein du parc Icade. © Jgp.

« Nous avons le sentiment d’être des oubliés en matière de transport », estime le maire. © Jgp.

La discothèque Métropolis enjambe l’A106. © Jgp.

Bruno Marcillaud en compagnie du directeur général adjoint des services de la ville Yves Le Goff. © Jgp

Rungis, où s’élèvera un jour la Cité de la gastronomie, accueille aussi, avec Métropolis, une des plus grandes discothèques d’Europe, qui surplombe l’A106. La population de la ville a doublé dans les années 90, après la construction de la ZAC des Antes, en centre-ville. Mal desservie aujourd’hui, Rungis bénéficiera d’une gare de la ligne 14, à Pont de Rungis. Une gare dont il se dit qu’elle pourrait accueillir également une gare TGV, celle prévue au sein de l’aéroport d’Orly se heurtant à des impossibilités techniques. « Mais nous avons le sentiment d’être des oubliés en matière de transport, avec une desserte très insuffisante pour 40 000 emplois », déplore le maire. Rungis bénéficie tout de même du RER C (gares Pont de Rungis et La Fraternelle), du tramway T7, du TVM (Trans-Val-de-Marne), bus à haut niveau de service, bientôt de la ligne 14 prolongée et de nombreuses lignes de bus. La création d’une gare TGV à Orly ou Pont de Rungis devrait améliorer les choses en libérant la ligne du RER C du passage des TGV, permettant dès lors un cadencement plus rapproché. De même, certains militent pour qu’Orlyval, qui relie aujourd’hui Antony à l’aéroport sans arrêt, soit transformé pour s’arrêter à Rungis la Fraternelle, Wissous et Antony.

Carré des eaux et aqueduc Médicis

La municipalité mène une réflexion en vue du réaménagement de la zone delta, qui comprend 800 des 1 000 chambres d’hôtels que compte la ville, dont le plus grand Mercure de France. La commune bénéficiera prochainement d’un réseau de chaleur, opéré par Dalkia, auquel seront rattachés l’ensemble des bâtiments municipaux, une partie de ceux du parc Icade et ceux de nombreuses entreprises. Un projet d’un montant de 6 millions d’euros, qui fera l’objet d’une délégation de service public.

Rungis, qui compte quatre écoles primaires et un collège (pour le lycée, direction Fresnes), est également une ville d’art et de patrimoine. Bruno Marcillaud cite le Carré des eaux d’où s’écoulaient, via l’aqueduc Médicis, les eaux alimentant les bassins et fontaines du Palais du Luxembourg, via Montsouris, ou encore le festival Piano-Piano dédié au répertoire pour deux pianos et quatre mains dont les vedettes sont Ludmila Berlinskaia et Arthur Ancelle, deux musiciens de renommée mondiale, résidents de Rungis. Le festival vient de se dérouler, donnant lieu à des concerts ambulants de pianos à quatre mains sillonnant la ville en camion ainsi qu’à trois concerts dans le théâtre municipal.

Street art chez Sogaris

Les différents partenaires et voisins de Rungis semblent apprécier la personnalité du nouveau maire. « Je viens de l’introniser au sein de la commanderie des gastronomes ambassadeurs de Rungis », dit Stéphane Layani, le président du MIN, pour illustrer les bonnes relations qu’il entretient avec Bruno Marcillaud. « Et il a largement contribué, tout comme Stéphanie Daumin, à la mise en place du vaccinodrome du marché », ajoute-t-il. « Nous partageons avec Rungis de nombreux enjeux urbains, économiques…, indique pour sa part Stéphanie Daumin, maire (PCF) de la commune voisine de Chevilly-Larue. Et Bruno Marcillaud est un partenaire fiable, avec lequel on travaille toujours dans un esprit constructif ».

« Tout comme la Semmaris, Icade ou ADP, Sogaris est un acteur historique de Rungis et, à ce titre, nous considérons que nous avons des responsabilités dans la manière dont la plateforme interagit avec son environnement direct, souligne le directeur général de Sogaris, Jonathan Sebbane. C’est pourquoi nous construisons notre projet de développement dans la durée, en prenant naturellement en compte les orientations, les demandes de la ville ». C’est, par exemple, dans ce cadre que Sogaris a confié à plusieurs artistes de street art la réalisation d’une série de fresques sur les façades les plus visibles des entrepôts d’une plateforme par ailleurs fermée au public pour des raisons de sécurité.

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