Lamia El Aaraje – Sans filtre

Porte-parole du Parti socialiste et conseillère de Paris au CV politique déjà étoffé, Lamia El Aaraje décrit sans langue de bois son parcours, ses fidélités et ses bêtes noires.

Médiatiquement, Lamia El Aaraje est un symbole. Celui de la fragilité de l’accord conclu entre les tenants de la Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), en amont des dernières élections législatives. Elue en juin 2021 à l’Assemblée nationale, dans le siège laissé vacant suite à la nomination de George Pau-Langevin au poste de défenseure adjointe des droits, cette mère de deux enfants n’a pas été investie par la Nupes. Motif officiel : son élection comme députée de la 15e circonscription de Paris (est du 20e arr.) ayant été annulée en janvier 2022 à cause de la candidature d’un candidat se réclamant indûment de LREM, les dirigeants de la Nupes ne l’ont pas considérée comme sortante. « LFI souhaitait de toutes façons humilier le PS à Paris », dit-elle, le regard soudain un peu las, alors qu’il est habituellement lumineux et rieur à la fois.

Lamia El Aaraje. © Jgp

Cette docteure en pharmacie, intarissable sur l’éducation à la santé et sur le rôle que l’école pourrait jouer en la matière – un thème sujet qui constitua son sujet de thèse –, ne porte pas les Insoumis dans son cœur. « A-t-elle rendu son logement social ? », demande-t-elle, si on l’interroge sur Danielle Simonnet, qui l’a battue en juin dernier, au second tour des législatives. « Alors qu’elle n’a jamais dépassé les 15 % dans l’arrondissement », ajoute-t-elle aussitôt. Elle raconte le harcèlement qu’elle a subi de la part de militants insoumis la suivant haut-parleur à la main pour perturber ses campagnes électorales. Il faut la voir sur les marchés, écouter les gens lui confier leurs difficultés, pour mesurer à la fois son savoir-faire politique et la sincérité de son engagement au service des plus démunis. A l’image de ces parents maliens, qui lui vouent une reconnaissance éternelle, parce qu’elle s’est battue avec succès pour obtenir le rapatriement en France de leur enfant, malade et retenu dans son pays au péril de sa vie pour des raisons liées au contrôle de l’immigration.

Franco-marocaine de mère en fille

Cette militante de longue date a commencé sa carrière politique à Limoges, où elle fait ses études de pharma, tout droit arrivée de Rabat, qu’elle a quitté à l’âge de 17 ans. Cette franco-marocaine de mère en fille pourrait-on dire, puisque son grand-père maternel, marocain, a rencontré sa femme, française, après avoir servi dans l’armée française durant la seconde Guerre mondiale, et qu’elle est elle-même fille d’un couple franco-marocain, s’engage en politique à l’Unef. Pour combattre les inégalités. « J’étais boursière et je comparais ma situation à l’aisance d’autres étudiants, moi qui enchaînais les petits boulots », raconte-t-elle, avec la bonhomie qui la caractérise, ce sourire amical qui ne la quitte que quand elle évoque ses adversaires. « C’est une femme d’une grande intelligence, une militante cohérente et pugnace. Elle allie formidablement la force des convictions et la constance de l’engagement », dit à son propos Emmanuel Grégoire, premier adjoint d’Anne Hidalgo. Une maire de Paris avec laquelle Lamia El Aaraje se sent idéologiquement en phase. Les valeurs de progrès et de justice sociale, d’écologie ou de féminisme forgent son engagement. Elles ont guidé les actions menées tout au long d’une carrière publique déjà longue, passée avant son premier mandat par le cabinet de Catherine Lemorton, alors présidente de la commission des affaires sociales.

Elue conseillère d’arrondissement et maire adjointe en 2014 aux côtés de Frédérique Calandra, Lamia El Aaraje cite, au titre de son bilan, les maisons de santé dont elle a favorisé la création dans le 20e arrondissement.

Plus original, elle a contribué à la création de groupes d’intervention auprès de résidents de logements souffrant de troubles psychiatriques. « Nous avons formé les gardiens d’immeubles afin qu’ils signalent à un groupe formé de travailleurs sociaux, d’infirmiers psychiatriques et de psychiatres les cas de personnes en souffrance, pour qu’elles bénéficient de soins ». L’éducation à la santé revient dans sa conversation comme un sujet majeur. Elle s’inquiète des ravages de la pornographie, « hétéronormée et infiniment violente », sur ceux qui la consomme parfois dès l’école primaire. Elle se sent chez elle à Paris, où elle aime cuisiner pour ses amis, lire des romans historiques et s’occuper de ses deux bambins, quand son emploi du temps lui en laisse le temps. Un agenda qui s’annonce chargé dans les mois qui viennent avec le congrès du Parti socialiste dans lequel elle aura une voix à faire entendre et, peut-être, plus tard, le Palais du Luxembourg…

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