H. Milot (EDF) : « L’enjeu, en Ile-de-France, réside dans la conjugaison de solutions énergétiques plurielles »

Hélène Milot, nouvelle déléguée régionale d’EDF en Île-de-France, détaille les multiples facettes de l’engagement de l’énergéticien pour une région neutre en carbone.

Pouvez-vous nous rappeler quel est votre parcours ?

J’ai près de 30 ans d’expérience au sein du  groupe EDF, où j’ai eu la chance d’effectuer un parcours très varié. J’ai travaillé pour la R&D, la distribution, ainsi que dans les métiers  support, exerçant une multitude de missions : de la fonction RH à la conduite de projets de transformation… Je prends aujourd’hui comme une sorte de consécration le fait de pouvoir représenter le groupe en Île-de-France, dans la diversité de ses facettes. Une région caractérisée par une multitude de projets, dans un contexte extrêmement porteur avec le plan de relance, les JOP 2024, la constitution du Grand Paris, du Grand Paris express. On rencontre un tel foisonnement de grands projets au mieux une ou deux fois dans une vie et ces perspectives représentent de formidables opportunités de développement pour le leader de l’énergie que nous sommes. Rappelons qu’EDF rassemble dans la région 30 000 emplois, sur près de 150 sites.

Hélène Milot. © JGP

Quel regard portez-vous sur la pandémie et son impact ? 

Concrètement, le premier confinement a provoqué une baisse de 15 à 20 % de la consommation d’électricité en France. Avant le second confinement, RTE prévoyait une décrue de 5 % pour l’ensemble de l’année. Aujourd’hui RTE indique « que la consommation actuelle est 3 à 4 % inférieure à la consommation électrique depuis le reconfinement ». La situation que nous vivons actuellement avec cette crise sanitaire a mis “en lumière” la capacité de résilience du modèle actuel sur l’ensemble du territoire, dont l’Île-de-France. Une nouvelle fois, il est indispensable que chacun puisse se nourrir, s’approvisionner, que les chaînes logistiques fonctionnent, que les hôpitaux, et c’est primordial, ne connaissent aucune coupure : c’est à cela que s’emploient les salariés du Groupe au quotidien. Cela rappelle la force du modèle industriel d’une entreprise intégrée sur toute la chaîne de valeur de l’électricité, de la production jusqu’aux services. Ces derniers mois ont également contribué à renforcer la prise de conscience générale de l’enjeu climatique. 

Dans quel sens ?

Le premier confinement a conduit comme vous l’avez entendu les habitants des grandes métropoles à s’interroger sur la qualité de l’air qu’ils respirent quotidiennement dans leur ville. Vous voyez qu’il ne s’agit plus d’un objet de débat, mais d’une réalité, qui s’impose à chacun d’entre nous. Comme l’ont rappelé les intervenants de la récente COP Ile-de-France, la température va s’élever de 4 degrés à la fin du siècle si l’on n’agit pas plus vite et plus fort ! C’est un des défis majeurs pour notre Groupe. C’est pourquoi nous nous engageons à développer encore plus  de solutions qui permettent d’atteindre la neutralité carbone, en apportant des solutions toujours plus décarbonées. 

Quelles formes ce combat prend-il en Île-de-France ? 

Je citerais trois grands leviers : le développement des énergies renouvelables, tout d’abord, qui prend une acuité particulière en Île-de-France, où la densité est supérieure à 1 000 habitants par km2. Bâtir de grands parcs de panneaux photovoltaïques ou d’éoliennes n’est donc pas évident. Le foncier est rare. EDF Renouvelables vient toutefois de mettre en service un premier parc éolien, au sud des Yvelines. Cela montre que l’on peut produire de l’énergie renouvelable en Île-de-France. Nous venons, au plan national, de répondre à un appel d’offres de l’Armée, visant à placer des panneaux photovoltaïques sur une série de bâtiments militaires. Le site de l’ancienne base aérienne 217 de Brétigny-sur-Orge est concernée. Nous travaillons, avec la Région, sur la création d’une grande centrale solaire, qui fait l’objet d’une des 192 propositions de la COP Ile-de-France. Plus globalement, nous étudions comment combiner des énergies renouvelables avec d’autres solutions énergétiques. Nous réalisons des projets mixant, par exemple, des panneaux solaires et de la géothermie. Je pense également au développement de l’hydrogène, particulièrement mis en avant dans le plan de relance gouvernemental. 

Quelle est votre action dans le domaine de l’hydrogène ? 

Notre filiale, Hynamics, étudie et porte des projets, y compris en Île-de-France, d’hydrogène propre, par électrolyse, résultant donc, je le rappelle, de la séparation de la molécule de l’eau, H2O, et non pas du craquage du gaz fossile. Des centres de production franciliens sont à l’étude. Il est encore un peu tôt pour vous citer des réalisations mais nous sommes certains que c’est l’affaire de quelques mois… 

Travaillez-vous également sur la baisse de la consommation énergétique ? 

Tout à fait. La maîtrise de nos consommations énergétiques constitue le second levier d’action face à l’urgence climatique, en améliorant les performances  énergétiques des bâtiments et, plus globalement, l’utilisation de l’énergie. Nous bénéficions en l’occurrence de tout le savoir-faire de Dalkia, qui propose des contrats de performance énergétique, avec un engagement de résultats pour réduire les consommations et un partage gagnant-gagnant des économies réalisées. Nous fournissons des solutions intégrées, notamment  à l’intention des copropriétés privées, très nombreuses en Île-de-France. 

Un des atouts de notre groupe est justement de conjuguer ces compétences et savoir-faire  pluriels et multiples et de jouer un rôle d’ensemblier. C’est une des fonctions de la délégation régionale de fédérer tous les métiers du Groupe et ses filiales pour apporter à nos clients des solutions globales clé en main. 

Effectuez-vous également un travail de pédagogie ? 

Nous réalisons, en effet, tout un travail d’accompagnement de nos concitoyens, afin qu’ils soient acteurs de leur consommation d’énergie, notamment par leurs usages. Cela passe par des actions dans les écoles, chez les ménages, en particulier les plus précaires, via nos partenariats avec de nombreuses associations en Île-de-France, comme dans les entreprises, petites et grandes, et les collectivités territoriales. Nous disposons d’un panel très large d’actions pour diffuser les bonnes pratiques, pour expliquer que le KWh le moins cher est celui que l’on ne consomme pas. 

Et bien sûr, nous proposons de nouvelles offres et des solutions énergétiques pour accompagner tous nos clients vers une réduction de leur facture et de leur consommation énergétique. Je pense, par exemple, à l’offre « Mes Jours Zen » permettant d’adapter sa consommation d’électricité selon les jours de la semaine afin de faire des économies. 

Proposez-vous des outils de maîtrise de l’énergie ? 

La transition énergétique et écologique réussira grâce à l’innovation. Nous avons par exemple développé une application, baptisée « E.quilibre », avec des modèles d’intelligence artificielle, qui permet à nos clients particuliers de comparer leur consommation énergétique par grande typologie. Concrètement, nous donnons ainsi à un couple avec deux enfants  résidant dans un trois pièces le niveau de consommation moyen des foyers comparables, ce qui leur permet de prendre pleinement conscience du sujet de la consommation énergétique et de favoriser ainsi les éco-gestes voire le remplacement de leur électro-ménager.

Œuvrez-vous également en faveur de la substitution des usages ? 

Oui, je dirais que pour l’Île-de-France c’est notre troisième levier et le premier s’agissant du développement de la mobilité électrique. Les voitures demeurent globalement très polluantes. La mobilité propre, électrique, représente un des sujets majeurs de la transition énergétique, sur lequel nous travaillons via notre filiale Izivia. Celle-ci exploite déjà près d’un quart des bornes de recharge électrique franciliennes. Nous sommes l’opérateur du Syndicat intercommunal pour le gaz et l’électricité en Île-de-France (Sigeif), auquel une cinquantaine de communes ont recours pour opérer leur réseau de bornes. Izivia équipe également PSA en bornes de recharge pour sa flotte sur ses sites de Poissy et de Rueil notamment. Rappelons que d’ici 2023, la Région a fixé comme objectif l’implantation de plus de 12 000 bornes de recharge pour véhicules électriques et que nous en exploitons déjà près de 1 600 en Île-de-France. 

Quels sont les enjeux de la construction des quartiers autour des gares du Grand Paris express pour EDF ?  

Au moment de ma prise de fonction, je suis frappée par le rôle que ces gares et les quartiers alentours vont jouer dans le développement et la rénovation urbaine. À voir les chantiers en cours à Champigny-sur-Marne ou à Clamart par exemple, il y a de quoi imaginer comment cela va changer notre rapport à la ville. Les infrastructures, et les gares en premier lieu, sont des objets essentiels d’application d’innovations énergétiques et sanitaires – je pense ici au conditionnement de l’air, dont la pandémie actuelle nous a fait prendre conscience à quel point ce sujet est vital, alors même que la pollution de l’air était depuis longtemps déjà un défi majeur pour les politiques franciliennes. Et puis il y a le dynamisme de la construction résidentielle et tertiaire autour de ces gares, les hubs de mobilité, la logistique de proximité, tous sujets pour lesquels l’usage de l’électricité répond aux enjeux et attentes, en déclinaison de la stratégie nationale bas carbone et du plan de relance.

Pourquoi avez-vous souhaité soutenir les JOP 2024, en devenant un de ses principaux partenaires ?

Les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 seront des jeux responsables, durables, solidaires et ouverts à tous. A ce titre, ils constituent un formidable laboratoire pour montrer l’ensemble de nos savoir-faire et innover sur les sujets de transition énergétique et de développement durable. Nous avons répondu à différents appels d’offres de la Solidéo et obtenu quelques beaux résultats. Je pense au Centre aquatique olympique de Saint-Denis, réalisé par un groupement dont Dalkia est membre. J’en profite pour souligner l’importance et l’intérêt qu’il y a à répondre en groupement à ces consultations, afin d’être à même d’apporter des solutions intégrées, globales, aux questions posées, qui intègrent à la fois la conception, la construction et l’exploitation des bâtiments. On peut également citer l’Arena 2, Porte de la Chapelle, où Dalkia a aussi remporté le contrat concernant l’exploitation du projet, qui passera par une solution de géothermie. 

Pourquoi avoir récemment signé une convention avec Plaine commune ? 

Il s’agit d’une convention organisant, avec d’autres entreprises et Île-de-France mobilités, le lissage des horaires de nos salariés, afin de réduire les pics de fréquentation dans les transports en commun, notamment ceux de la ligne 13. Deux de nos sites sont situés à Saint-Denis, celui de Cap Ampère et celui de Smart Side, qui emploient près de 3 000 salariés. Nous avons signé une charte similaire sur le secteur de Paris La Défense. Cette convention prendra tout son sens quand nous serons sortis de la crise sanitaire car, comme vous le savez, toutes nos activités tertiaires sont actuellement intégralement en travail à distance. La sécurité et la santé des salariés et de nos prestataires sont notre priorité.

Quel est l’objet du partenariat que vous venez de signer avec le Pavillon de l’Arsenal ?  

L’innovation est totalement intégrée dans nos organisations et nos process. Elle est indispensable dans nos métiers où les transformations sont profondes et où il nous faut imaginer et construire des solutions nouvelles. Nous organisons chaque année le concours « Prix start-up EDF Pulse », pour encourager et accompagner les start-up dans nos métiers et singulièrement dans les enjeux de transition énergétique (voir ci-dessous le programme des Electric days). Le partenariat avec le Pavillon de l’Arsenal et leur accélérateur « Faire » s’inscrit dans cette logique. Ce programme orchestré par la ville de Paris effectue des appels à projets, soutient des démarches diverses et pas seulement urbanistiques, intégrant ces enjeux de transition énergétique et de développement durable, de mieux-être pour la ville de demain. Nous voulons, avec les collectivités territoriales, contribuer à l’émergence de solutions pour la transition énergétique au plus près des territoires et des populations, en tenant compte de l’histoire et de la géographie de chacun.

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