Un ensemble d’urbanistes, élus, historiens… livrent des analyses complémentaires dans un ouvrage à paraître mi-octobre. Avec l’ambition de ranimer la flamme du débat autour du Grand Paris. Car à leurs yeux, l’existence dans les faits de la métropole représente la condition sine qua non pour qu’elle se hisse à la hauteur des actuels enjeux sociaux et environnementaux.
« La question du Grand Paris est un enjeu géopolitique national qui travaille la France depuis deux siècles », affirme Bernard Landau, architecte voyer honoraire de la Ville de Paris, et à la manœuvre de la production d’un ouvrage collectif visant à retracer l’histoire de Paris, de ses contours, de ses jardins autant que de ses places les plus célèbres, ou encore des enjeux sociétaux, économiques et climatiques contemporains.
Depuis deux ans et demi, dans ce but, des auteurs se sont rapprochés et ont créé un collectif, baptisé Fluctuat. Ces géographes, historiens, élus, urbanistes, économistes, sociologues…, tous amoureux déçus ou heureux de la capitale française, veulent relancer le débat autour de la métropole, ce Grand Paris qui, pour l’heure, est surtout de papier, à leurs yeux, plus qu’une réalité tangible.
Paris, une exception dans le monde ?
Le moment d’apporter leurs pierres à l’édifice du débat autour de Paris extramuros ne doit rien au hasard. Il s’inscrit 50 ans après la transformation de la préfecture de Paris en municipalité, 8 ans après la naissance de la métropole et 2 ans avant les prochaines élections municipales. « Paris a une histoire singulière, contextualise Bernard Landau. Dans leur croissance, les principales métropoles mondiales des pays développés, notamment en Europe, ont dépassé leurs limites de la ville historique du XIXe siècle, et trouvé des réponses adaptées et spécifiques, à l’échelle de l’agglomération, pour leur gouvernance technique, administrative, politique ; elles ont fait tomber leurs murailles. » Inversement, aux yeux du grand public notamment, le Grand Paris se limite au métro éponyme.
Dès lors, les auteurs se fixent pour objectif de donner des éléments de compréhension pour que le débat se réouvre. « Nous espérons que ce livre, dans la situation d’impasse actuelle et du peu d’intérêt manifeste des élus depuis quelques années, permette de prendre de la hauteur, d’inscrire la réflexion dans le temps long de l’histoire et de relancer un débat nécessaire », revendique Bernard Landau, qui fait aussi observer que les rythmes de construction ont été très différents entre Paris et sa banlieue. Son espoir à terme : voir les villes mieux se coordonner, agir ensemble, sans que les maires œuvrent chacun sur leur territoire sans lien avec leurs voisins. Et il y a urgence, pour mieux se saisir des évolutions à mettre en œuvre : « Aucun objectif bioclimatique n’est par exemple atteignable dans Paris seul », indique Bernard Landau, entre autres auteurs d’un long article sur le plan local d’urbanisme bioclimatique.
Au risque de la polémique
Cet ouvrage collectif propose donc une approche la plus complète possible des sujets à débattre dans le cadre du nécessaire déploiement de Paris hors de ses frontières, symboliquement encore si marquées par le périphérique. Le tout en amenant le lecteur à se questionner lui-même, et sans donner de recette toute faite, d’autant que les opinions exprimées par leurs auteurs ne s’accordent pas toutes. Mais toujours, règne le souci de la précision, et un grand soin pris pour se montrer pédagogue et précis dans les références sur lesquelles se sont appuyés les rédacteurs. Au total, plus de 200 illustrations accompagnent une vingtaine d’articles qui, s’ils sont bien sûr ordonnés, peuvent aussi se lire indépendamment les uns des autres en fonction des centres d’intérêt.
Une réflexion sur les lieux de résidence, une présentation de l’histoire des jardins pour les inscrire aussi dans leur avenir, une comparaison avec Tokyo, voilà quelques-uns des angles d’attaque du débat sur le Grand Paris proposés par le livre. Et le collectif ne s’interdit pas de risquer la polémique, avec certains articles très critiques, sur la place prise par les grands noms du luxe dans la gestion du patrimoine, l’utilisation regrettée par l’auteur de la Concorde pour des manifestations sportives ou culturelles, ou une forme de défense et illustration de la place de l’automobile dans les rues parisiennes au sein d’un article sur les mobilités.
Un livre… et après ?
Comme Paris ne saurait se circonscrire à ses contours intramuros, le débat sur le Grand Paris ne doit pas, aux yeux de Bernard Landau, se limiter à la lecture et la rédaction de cet ouvrage, pourtant conséquent. Il pointe d’abord son caractère non-exhaustif. Le livre n’aborde en effet pas le récent et important développement des mobilités douces, à vélo en particulier. Ensuite, Bernard Landau espère débattre au cours de signatures en librairie, ou pourquoi pas en prolongeant l’ouvrage par un blog, susceptible de continuer à recueillir diverses contributions. « En somme, notre souhait consiste à remettre de l’utopie et de la prospective à la hauteur des enjeux sociaux, sociétaux, environnementaux, économiques, urbanistiques… »
Pour en finir avec le petit Paris – ouvrage collectif – Editions Archicity – 388 pages – 28 €.
Déjà disponible en commande : https://archicity.fr/produit/pour-en-finir-avec-le-petit-paris/