Pierre Veltz, Grand prix de l’urbanisme 2017 : « La civilité, essence même de la ville »

« Nous savons tous que la question des villes sera la question centrale du siècle qui commence », a indiqué Pierre Veltz après avoir reçu le Grand prix de l’urbanisme 2017 des mains de Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires.

« Je ne vais pas vous parler de moi, on en a évidemment assez parlé », a déclaré Pierre Veltz, après que Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, lui eut remis le Grand prix de l’urbanisme 2017, lundi 18 décembre 2017 au Palais Brongniart, place de la Bourse à Paris. « Je suis heureux que le jury de ce prix ait accepté une définition large de l’urbanisme, a poursuivi l’ancien président de l’établissement public d’aménagement de Paris Saclay. En choisissant un chercheur, un chercheur en sciences sociales qui plus est, et, je ne sais pas quel est le pire des qualificatifs, un ingénieur », a poursuivi le polytechnicien (1966), ingénieur des Ponts et chaussées (1969), docteur en sociologie (EHESS, 1980), habilité à diriger des recherches (université de Versailles Saint-Quentin, 1996).

« Je suis heureux que le jury de ce prix ait accepté une définition large de l’urbanisme », a déclaré l’ancien président de l’établissement public d’aménagement de Paris-Saclay. © Jgp

« Je me réjouis particulièrement de succéder dans cette liste prestigieuse à François Ascher (Grand prix de l’urbanisme 2009), premier représentant des sciences sociales à être récompensé par le prix », a ajouté Pierre Veltz, se félicitant également « de figurer dans ce palmarès aux côtés de Jacques Lévy, autre vieux complice en socio-géographie », a-t-il déclaré, saluant aussi Philippe Madec, architecte-urbaniste, qui figurait également dans la liste des nominés au Grand Prix, de même que le paysagiste Alfred Peter, « qui a, entre autres qualités; celle d’être un de mes compatriotes de l’Alsace bossue, des Basses-Vosges ».

« Nous savons tous que la question des villes sera la question centrale du siècle qui commence, a indiqué le président du conseil scientifique de l’Institut des hautes études en aménagement et développement des territoires en Europe (Ihedate). Cela ne concerne pas seulement les agglomérations géantes », a poursuivi l’ancien directeur de la mission région capitale auprès de Christian Blanc, rappelant que Hong-Kong – Shenzen rassemblait 66 millions d’habitants. Pour Pierre Veltz, la totalité des territoires habités est concernée par les problématiques d’urbanisation, « transformant profondément les conditions de vie, les horizons, et les modes d’existence, jusqu’aux campagnes les plus reculées. Cela n’est pas seulement vrai chez nous mais dans le monde entier », estime le chercheur.

« L’avenir physique, climatique, biologique de la planète »

« Cette urbanisation est une expérience inédite dans l’histoire de l’humanité, a-t-il également souligné. C’est là que se joue l’avenir physique, climatique, biologique de la planète. C’est là aussi que se joue la gouvernance mondiale, où les villes prennent de plus en plus le pas sur les Etats. Il est très intéressant à ce sujet de voir, aux Etats-Unis, comment les villes et les Etats sont en train de définir des politiques visant à contrer celle de l’Etat fédéral de Donald Trump », a-t-il également déclaré.

« C’est là enfin que se joue ce que nous avons de plus précieux, j’appelle cela la civilité, c’est-à-dire l’équilibre d’une vie collective pacifiée », a déclaré Pierre Veltz. © Jgp

« C’est là, aussi, que les inégalités vont croître le plus et créer des face-à-face potentiellement explosifs entre les plus riches et les plus pauvres. C’est là, enfin, que se joue ce que nous avons de plus précieux, j’appelle cela la civilité, c’est-à-dire l’équilibre d’une vie collective pacifiée, toujours un peu miraculeuse, dont les raisons ne sont plus données par le ciel, la tradition, les communautés déjà présentes, mais qui doit sans cesse être réinventée. C’est l’essence même de la ville, en particulier dans sa forme occidentale. »

« Les grands enjeux ne sont pas ici »

« Les grands enjeux ne sont pas ici, a poursuivi le Grand prix de l’urbanisme 2017. Ils se situent en Asie, en Amérique et en Afrique, mais nous concernent très directement. Notre territoire n’échappera pas au réchauffement climatique, à l’érosion de la biodiversité, et chacun de nos territoires est désormais partie prenante de la cogestion des biens publics mondiaux, essentiels », a-t-il encore fait valoir, observant que « l’avenir de notre pays comme puissance scientifique et économique dépend largement de la capacité de Paris et des réseaux urbains français à rester dans l’archipel mondial des pôles où s’invente le futur « .

Enfin et surtout, a-t-il ajouté, « notre sort est complètement lié à celui de l’Afrique, si proche à travers la Méditerranée qui nous rapproche et nous divise, avec tous les drames que nous connaissons. Tous ces sujets relèvent-ils de l’urbanisme ? A mon sens oui, a conclu Pierre Veltz, si l’on donne à ce terme un sens plus étendu, un sens qui me semble nécessaire si l’on veut éviter le repli sur notre territoire national ou pire sur nos terroirs locaux qui rêvent parfois d’autosuffisance. »

Les Grand Prix de l’urbanisme depuis 1989

  • 2017
    Pierre Veltz
  • 2016
    Ariella Masboungi
  • 2015
    Gérard Penot
  • 2014
    Frédéric Bonnet
  • 2013
    Paola Viganò
  • 2012
    François Grether
  • 2011
    Michel Desvigne
  • 2010
    Laurent Théry
  • 2009
    François Ascher
  • 2008
    David Mangin
  • 2007
    Yves Lion
  • 2006
    Francis Cuillier
  • 2005
    Bernard Reichen
  • 2004
    Christian de Portzamparc
  • 2003
    Michel Corajoud
  • 2002
    Bruno Fortier
  • 2001
    Jean-Louis Subileau
  • 2000
    Alexandre Chemetoff
  • 1999
    Philippe Panerai et Nathan Starkman
  • 1998
    Christian Devillers
  • 1993
    Bernard Huet
  • 1992
    Antoine Grumbach
  • 1991
    Jean Dellus
  • 1990
    Jean-François Revert
  • 1989
    Michel Steinbach
    (Source : Wikipédia)

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