Dans la proposition de loi, rédigée par Pacôme Rupin et Guillaume Gouffier-Cha, respectivement députés de Paris et du Val-de-Marne, que Le journal du Grand Paris s’est procurée, les deux parlementaires LREM proposent de transformer la métropole du Grand Paris en pôle métropolitain et les Territoires en établissements publics de coopération intercommunale. Une petite bombe que ses auteurs souhaitent voir débattue avant les prochaines élections régionales.
Le projet de proposition de loi, rédigé par Pacôme Rupin et Guillaume Gouffier-Cha, tient en trois articles. Le premier entérine la suppression, dans le code général des collectivités territoriales (CGCT), de la métropole du Grand Paris et des établissements publics territoriaux, en prévoyant un délai d’un an après la promulgation de la loi pour la mutation des EPT en EPCI à fiscalité propre. Le deuxième précise les modalités de retour des EPT dans le droit commun des EPCI en conservant les mêmes périmètres géographiques. « Toutefois, il sera possible pour les communes d’adhérer à des EPCI voisins si elles le souhaitent, en accord avec les communes membres de ces EPCI et les représentants de l’État dans les départements concernés », est-il écrit.
Enfin, l’article 3 organise la création d’un pôle métropolitain sur le territoire de la zone dense, afin de permettre une coopération renforcée ou une mutualisation de certaines politiques publiques entre les intercommunalités dans cette zone, ainsi qu’avec Paris, la Région et les Départements, « dans l’attente d’une réforme institutionnelle d’ampleur ».
Un calendrier incertain
Les parlementaires souhaiteraient voir cette proposition de loi inscrite à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale avant les prochaines régionales, dont la date pourrait être décalée à juin 2021. « Force est de constater que la métropole du Grand Paris ne parvient pas à prendre la place qui était attendue et qu’elle reste très méconnue des citoyens franciliens et grand-parisiens, estiment Pacôme Rupin et Guillaume Gouffier-Cha, respectivement député de la 7° circonscription de Paris et de la 6° du Val-de-Marne, dans l’exposé des motifs. Les inégalités territoriales constatées ne se résorbent pas, en particulier du point de vue de la répartition des richesses, de la localisation des emplois et des pôles d’attractivité économique. Au contraire, elles ne cessent de s’accroître, poursuivent les parlementaires. Si la construction du Grand Paris express, impulsée par l’État, peut apporter une première réponse pour désenclaver certains territoires, le pilotage n’est pas institutionnel et les travaux ne se termineront pas avant plusieurs années », estiment-ils également.
Le même exposé des motifs décrit des transports en commun saturés, un manque de cohérence des stratégies de mobilités des différentes strates. Face aux enjeux climatiques, « l’enchevêtrement institutionnel et la lourdeur administrative freinent l’ensemble des acteurs publics comme privés. Le même constat peut être fait sur la question de la transition numérique et du développement des nouvelles technologies dans tous les territoires du Grand Paris », considèrent les élus.
« Le Grand Paris manque aussi de logements accessibles à toutes les catégories sociales et la mixité devient de plus en plus difficile à défendre. Du point de vue de l’urbanisme, il n’y a pas davantage de stratégie stable à long terme entre la densification et l’étalement urbain », soulignent-ils encore.
Le Scot et le PMHH « indéfiniment reporté »
« Enfin, le Grand Paris ne parvient pas à aboutir sur le plan institutionnel et politique, jugent les députés marcheurs. Trop complexe sur le plan institutionnel, trop faible financièrement et en matière de compétences, la MGP ne dispose pas de prérogatives claires lui permettant d’assurer une cohésion sociale, incarner une puissance publique et développer l’attractivité internationale de la Capitale du pays. L’opposition des élus au transfert de moyens financiers à la Métropole témoigne d’un blocage provenant de conseillers métropolitains eux-mêmes et empêche la réalisation du projet métropolitain. Le report indéfini de l’adoption du plan métropolitain pour l’habitat et l’hébergement (PMHH) et du Scot atteste, à titre d’exemple, de l’impuissance de la MGP », arguent-ils.
« Peu concernés par le fait d’élire des conseillers métropolitains lors d’élections municipales où les candidats n’ont pas fait campagne sur la question métropolitaine, les Grand-parisiens n’ont pas eu davantage leur mot à dire dans le processus rocambolesque qui a conduit en juillet 2020, dans l’indifférence générale, à l’élection du Président de la MGP et de son bureau exécutif », ajoutent les auteurs de cette proposition de loi, qui estiment, en revanche, que les établissements publics territoriaux « commencent eux à mieux fonctionner ». « Outre la gestion des services publics du quotidien, ils sont porteurs de projets de développement pour l’avenir et permettent de renforcer la cohésion sociale et économique au sein des différents bassins de vie de l’espace métropolitain », écrivent-ils.
« Il ne s’agit pas d’opposer le Grand Paris des projets au Grand Paris institutionnel, affirment les parlementaires. Au contraire, c’est une clarification du rôle de chacun qui permettra la réussite des projets communs déjà lancés et ceux qui doivent être identifiés pour l’avenir. Il semble possible de « simplifier sans tout casser ». A l’aune de la crise sanitaire actuelle et de la mise en place du plan de relance, « cette clarification apparaît d’autant plus nécessaire ».
Ses auteurs présentent cette proposition de loi comme une étape. « Dans un second temps, concluent-ils, il devra être poursuivi par une réflexion approfondie sur les projets que le futur Grand Paris devra porter pour renouer avec les objectifs du projet visionnaire initial et sur le nouveau modèle de gouvernance approprié pour une réalisation efficace. Cette réflexion devra déboucher sur une réforme institutionnelle d’ampleur impliquant les EPCI, Paris, les départements et la région Ile-de-France ».
« En faisant rentrer les actuels EPT dans le droit commun, c’est-à-dire en les transformant en EPCI à fiscalité propre, le législateur met fin à une spécificité territoriale et à un modèle hybride qui n’a pas convaincu, jusqu’aux élus des EPT eux-mêmes, afin d’accroître leur efficacité, écrivent les deux auteurs de cette proposition de loi dans l’exposé des motifs. Il pérennise en outre le budget des intercommunalités et met un terme au schéma financier absurde qui conduisait la métropole du Grand Paris à percevoir et centraliser les ressources financières, mais à en reverser ensuite la quasi-intégralité directement aux EPT, au moyen d’un amendement devant être voté chaque année par le Parlement lors du Projet de loi de finances ».
« En transformant la MGP en pôle métropolitain, le législateur allège le mille-feuille territorial et consolide le bloc communal et intercommunal pour répondre aux problématiques locales, tout en conservant un niveau permettant une coopération entre EPCI, ainsi qu’avec Paris, les départements de petite couronne et la région Ile-de-France, selon les besoins. Au sein de la zone dense, les intercommunalités et les collectivités pourront ainsi choisir, si elles le souhaitent, de continuer de gérer des grands projets en commun ou de mutualiser des politiques publiques. Enfin, ce projet permet également de générer des économies sur le budget actuel de la Métropole qui englobe d’importants coûts de fonctionnement et la production de documents d’orientation déjà rédigés, de manière quasi-similaire, au niveau régional ou du bloc communal », est-il également considéré.
Défini par les articles L. 5 731-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, le pôle métropolitain, constitué sur la base du volontariat, « est un établissement public constitué par accord entre des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, en vue d’actions d’intérêt métropolitain, afin de promouvoir un modèle d’aménagement, de développement durable et de solidarité territoriale ».
Les conseils communautaires des membres du pôle métropolitain reconnaissent par délibérations concordantes l’intérêt métropolitain de certains projets et actions, ce qui en transfère la compétence au pôle métropolitain. Ces projets et actions relèvent des compétences suivantes : développement économique, promotion de l’innovation, de la recherche, de l’enseignement supérieur et de la culture, aménagement de l’espace par la coordination des schémas de cohérence territoriale, développement des infrastructures et des services de transport au sens des articles L. 1 231-10 à L. 1 231-13 du code des transports, afin de promouvoir un modèle de développement durable du pôle métropolitain et d’améliorer la compétitivité et l’attractivité de son territoire, ainsi que l’aménagement du territoire infra-départemental et infra-régional. Dénué de fiscalité propre, ses ressources proviennent notamment des cotisations des EPCI qui le composent.