Assises du Grand Paris – Les JOP, véritable accélérateur de projets urbains

Les infrastructures olympiques dont la construction s’achève ont bénéficié de règles spécifiques permettant de réaliser les projets en un temps record. Procédures allégées, permis à double état : serait-il possible de répliquer ces dispositifs pour faire face à la crise du logement ? Les acteurs impliqués dans la construction des Villages des Jeux échangeaient sur cette possibilité et évoquaient leurs expériences respectives lors de la première matinée des Assises du Grand Paris 2024, mardi 27 février à la Fnaim Grand Paris.

Inauguré officiellement par Emmanuel Macron jeudi 29 février 2024 et remis entre les mains de Paris 2024 début mars, le Village des athlètes, véritable ville dans la ville, aura mis quatre années à sortir de terre. A quelques centaines de mètres et sur une surface équivalente s’établit, à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), la ZAC des Docks, pour la réalisation de laquelle 20 ans auront été nécessaires. « C’est dire à quel point l’aventure olympique a été un vecteur d’accélération ! », constate Jean-Luc Porcedo lors de la deuxième table-ronde de la matinée du mardi 27 février. Un challenge qui aura pu être relevé « grâce à la mobilisation pleine et entière de tous les partenaires et de la puissance publique », poursuit le directeur général de Nexity transformation des territoires et président de Villes et projets.

Jean-Luc Porcedo, président du pôle transformation des territoires de Nexity. © Anh de France

Procédures allégées, instructions de permis de construire accélérées, permis à double état… « Le tout en étant réglementaires et en laissant place aux éventuels recours ! » Une efficacité d’autant plus notable que la phase de construction des infrastructures olympiques aura eu à traverser les crises du Covid et de la guerre en Ukraine ainsi que l’inflation. « Nous avons en outre mobilisé des filières qui n’étaient pas encore structurées, à l’instar du bois », souligne Jean-Luc Porcedo.

Richard Curnier, directeur régional Ile-de-France de la Banque des territoires, retient pour sa part une accélération « en termes d’innovation juridique, mais également technique, comme pour le bâtiment « Cycle » du Village olympique, recyclant l’ensemble des eaux usées noires et grises. »

Philippe Jung, directeur général immobilier de Demathieu Bard, et Richard Curnier, directeur régional Ile-de-France de la Banque des territoires. © Anh de France

Une aubaine pour les territoires comme pour les acteurs

Un effet accélérateur qui représente une véritable aubaine pour les collectivités locales aux prises avec un contexte de resserrement des finances publiques. « Au Bourget actuellement, il n’y a que des travaux ! », déclare Jean-Baptiste Borsali, vice-président de Terres d’Envol et maire du Bourget (Seine-Saint-Denis). « Des rénovations de voirie ont été financées par l’Etat, et la quasi-totalité des infrastructures sportives rénovées sans que la ville n’ait à dépenser le moindre sou. Les démarches administratives comme la recherche de financements : tout s’est débloqué ! »

Jean-Baptiste Borsali, vice-président de Paris Terres d’Envol et maire du Bourget. © Anh de France

A l’heure où 22 territoires « engagés pour le logement » (où les procédures d’urbanisme seront allégées afin de construire plus rapidement) ont été désignés par le gouvernement, se pose la question de la pérennisation des dispositifs ayant permis la réalisation des structures olympiques. « L’interrogation est de savoir s’il y aura le même consensus général sans le délai contraint de la cérémonie d’ouverture », observe Philippe Jung, directeur général immobilier de Demathieu Bard. De l’avis d’Eric Groven, la réplicabilité de mesures d’exception apparaît particulièrement intéressante, « d’autant que l’accélération des procédures ne s’oppose pas au respect du droit des parties prenantes ! »

S’inspirer de la dynamique olympique

Eric Groven, président de Sogeprom. © Anh de France

Le président de Sogeprom fait néanmoins preuve de réserve quant au fameux permis à double état, lequel assure la réversibilité des bâtiments, et d’une certaine manière, leur seconde vie. « Le permis à double état présente l’avantage de faire bénéficier aux acquéreurs du statut de logement neuf, ouvert notamment au Pinel. Il sécurise aussi le promoteur, puisqu’il n’aura pas besoin de redéposer un permis et pourra trouver les investisseurs de toute nature qui lui achèteront les lots au moment de la phase héritage. Cet aspect s’avère donc pratique à condition que l’affectation du bien immobilier soit déjà définie ! Cela a tout de même inspiré de nouvelles formes de permis, comme le permis sans affectation, dont le premier dossier a été déposé à Bordeaux, permettant d’envisager une affectation future avec, pour le promoteur, davantage de manœuvrabilité que le permis à double état. »

Si l’ensemble des intervenants s’accorde à dire qu’il est peu probable de reproduire à l’identique cette dynamique de construction une fois clos le chapitre olympique, celui-ci aura permis de démontrer que la France était capable de produire des centaines de milliers de mètres carrés de surface de plancher en quatre ans et de transformer ou construire de l’espace public avec des ambitions environnementales inédites. Aux professionnels de tirer les enseignements qu’il convient et de s’en inspirer.

« On a progressé sur de nombreux sujets comme le béton bas carbone et les produits mixtes, estime Philippe Jung. Les JOP auront été un puissant vecteur d’innovation. Il nous faut aborder le bas carbone sans dogmatisme, en trouvant le moyen d’être efficace tant en termes d’empreinte que de faisabilité économique et technique. » Et Eric Groven de conclure : « Nous ne sommes qu’au début de l’histoire ! »

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