V. Jeanbrun : « Je suis candidat à la présidence de la métropole parce que le statu quo n’est plus tenable »

Maire de L’Haÿ les Roses, président du Forum métropolitain du Grand Paris et vice-président du conseil régional, Vincent Jeanbrun explique les raisons de sa candidature à la présidence de la métropole du Grand Paris.

– Pourquoi êtes-vous candidat à la présidence de la métropole du Grand Paris ?

Je suis candidat parce que le statu quo n’est plus envisageable. Pour plusieurs raisons. La première provient du fait que la crise du Covid-19 va ruiner la métropole. Si l’on ne change pas de mode de gestion, et que l’on n’arrête pas la folie dépensière, la métropole va se retrouver en situation de faillite, ce qui l’obligera à réduire les attributions de compensation versées aux communes, tandis que les territoires seront obligés d’augmenter leur participation au fonds de compensation des charges territoriales (FCCT). Sur le moyen terme, on voit bien que le modèle actuel n’est pas viable.

Vincent Jeanbrun. © Jgp

– Pourquoi ?

Tous les ans, en loi de finances, le législateur doit sauver les territoires en dernière minute. Pendant ce temps, la métropole recrute à tour de bras, et se lance dans des investissements pharaoniques comme la piscine olympique, alors qu’elle n’en a pas les moyens sur le long terme. Il y a, là aussi, une absolue nécessitée de changer de méthode. Si on ne le fait pas, ce seront toujours les villes qui paieront la note.

Enfin, sur le long terme, je veux être le candidat de la réforme, celui qui, avec ses collègues maires, dessinera l’acte II du Grand Paris, rétablira le dialogue entre les villes et leurs agglomérations. Il faut transformer le territoire en un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre pour revenir dans le droit commun. Rendre aux maires deux libertés : celle de choisir leur intercommunalité et celle de définir leur plan local d’urbanisme (PLU). Cela dans un dialogue avec la Région, pour défendre un Grand Paris qui fasse sens, qui soit efficace, lisible pour les citoyens, ce que n’est absolument pas la métropole telle qu’elle a été définie par la loi NOTRe.

– Vous défendez l’idée d’un fonds d’investissement métropolitain doté de moyens plus importants que le fonds actuel ?

Tant que la métropole existe, il faut qu’elle vienne en soutien aux communes. Il faut donc un fonds d’investissement, dont les règles d’attribution mériteraient sans doute d’être plus transparentes, là encore plus lisibles. Il faudrait aussi que l’on fixe des critères qui soient acceptables par tous.

– Que répondez-vous à ceux qui vous reprochent votre proximité avec la présidente de Région Valérie Pécresse ?

Valérie Pécresse a montré que la Région pouvait être efficace dans l’exercice de ses compétences au quotidien. Je crois que tout le monde a senti les effets de l’alternance entre Jean-Paul Huchon et Valérie Pécresse. L’action de la présidente du conseil régional montre que quand il existe une volonté politique, on peut transformer une institution en quelque chose d’utile pour les communes. Pendant la crise, la Région a été mobilisée et efficace pour soutenir les communes. Où était la métropole ? Elle s’est réveillée après la bataille, quand tout ou presque était terminé, pour signer un chèque à l’intention de l’AP/HP, ce qui lui a valu l’abstention du groupe UDI, puisque cela n’était pas légal. La métropole ne dispose pas, en effet, de compétence en matière de santé. Elle n’avait pas à verser de l’argent à des hôpitaux.

On voit bien que l’on a deux mondes. Celui de la Région, qui est efficace dans la transparence, et celui de la métropole, où s’est installée une logique de saupoudrage. On doit pouvoir changer cela. Ma relation avec Valérie Pécresse est connue et assumée. Mais je ne suis pas le candidat de la présidente de la Région. Je suis le candidat des maires ! Car si l’on ne réforme pas la métropole, ce sont les mairies qui trinqueront.

– La gouvernance partagée est-elle une bonne chose ?

Oui. Pour autant, gouvernance partagée ne veut pas dire qu’il revient à la gauche de désigner le président de la métropole du Grand Paris. La droite et le centre sont largement majoritaires, c’est à eux qu’il revient de désigner le président de la structure. Je ne peux pas croire, comme je l’entends dire, que Patrick Ollier entende se faire élire avec les voix de la gauche parisienne. Ce serait choquant. Regardez dimanche ce qu’ont donné les alliances contre-nature, notamment à Lyon…

– Vous souhaitez l’organisation de primaires internes à la droite et au centre ?

Je souhaite effectivement une primaire de la droite et du centre. C’est ce que je demanderai mercredi matin 1er juillet lors de ma rencontre avec le président des Républicains Christian Jacob.

– Après plus d’un an de présidence, jugez-vous utile de maintenir le Forum métropolitain du Grand Paris ?

Oui, car l’intérêt du Forum métropolitain du Grand Paris est qu’il représente toutes les strates du millefeuille institutionnel. Il est capable de mettre du liant, de la crème dans ce millefeuille. Lors d’un conseil d’administration, sont réunis la présidente de Région, la maire de Paris, le président de la métropole, les présidents de territoire, quelques présidents de département, des maires qui discutent dans un espace neutre, transpartisan et multi strates. Sa force est aussi sa capacité à discuter avec l’Etat. Heureusement à mon sens qu’une entité telle que le Forum permet de continuer à avoir des débats sur le fond et la gouvernance. Mais je regrette que l’on n’arrive pas à fonctionner à la métropole de la même manière.

De g. à dr. : Jean-Yves Le Bouillonnec, Jacques Paquier, Vincent Jeanbrun, Patrick Ollier et Michel Bisson lors des 10 ans du Forum métropolitain du Grand Paris, au Casino de Paris, le 18 septembre 2019. © DR

– Que reprochez-vous à l’organisation institutionnelle métropolitaine actuelle ?

Je trouve vraiment dommage que la métropole ne soit pas davantage en synergie avec la Région, avec les territoires métropolitains, qu’elle soit un peu bloquée dans son périmètre et n’arrive pas non plus à dialoguer avec les intercommunalités adjacentes. Comment regagner la confiance des citoyens dans ce contexte ? En prenant en compte les institutions européennes, ce millefeuille comprend sept couches en Ile-de-France. C’est incompréhensible. Il y a donc un enjeu de réforme majeur. Aussi, il faut désormais poursuivre le débat qui a lieu au Forum au sein de la métropole elle-même. La métropole doit se poser la question de sa propre réforme.

– L’évolution de la structure ne devait-elle pas être engagée par Emmanuel Macron ?

Si, mais le gouvernement n’a pas réussi à trancher, notamment parce que la tâche ne lui a pas été facilitée par les différents exécutifs locaux qui donnent tous une version différente de leur vision de la métropole pour la bonne raison qu’ils ne se parlent pas entre eux, sauf quand ils se voient au Forum. Notre enjeu à ce jour est de se dire que nous disposons de six années pour écrire le projet qui à défaut de faire l’unanimité fera majorité. Le prochain président de la métropole a cette mission de devoir relancer le débat institutionnel : quelle est la métropole que veulent les Franciliens à l’horizon de 2026 ? C’est indispensable pour aider le gouvernement quel qu’il soit à prendre une décision qui soit soutenue par les collectivités locales. Car la vérité est que le gouvernement n’engagera pas de réforme contre les maires en place.

Je crois beaucoup dans la proposition de Nicolas Sarkozy qui ferait vraiment sens en Ile-de-France, de mettre en place le conseiller territorial, c’est-à-dire un élu qui siège à un niveau local à portée d’engueulade et régional, qui est selon moi le meilleur échelon pour la métropole.

Propos recueillis par Fabienne Proux et Jacques Paquier

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