Après un lancement plutôt réussi, l’initiative collaborative pour repenser l’économie d’après-crise qui devait initialement être temporaire va finalement s’inscrire dans la durée. Les encouragements de la secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire venue clôturer la première session de débats le 13 mai 2020 devraient conforter les fondateurs dans leur démarche.
Six débats en ligne, 483 idées récoltées, 57 000 visites… La plateforme Recovery lancée en avril par Philippe Zaouati (Mirova) et Stéphane Distinguin (Fabernovel) a déjà réussi le pari de la mobilisation. Reste à savoir si l’initiative réussira aussi celui de permettre une reprise économique plus durable. Alors que la démarche devait se limiter à nourrir la réflexion et réunir des pistes et des engagements dans un manifeste qui sera remis à l’Etat, Recovery va finalement poursuivre ses activités. Ainsi, les débats continueront une fois par mois sur chacun des sept sujets clés identifiés (lire ci-dessous). La prochaine rencontre virtuelle aura lieu le 16 juin sur le thème « impact environnemental/impact social, les enjeux d’une généralisation du télétravail ».

Brune Poirson, ici lors d’un déplacement à Carrières-sous-Poissy en novembre 2019, a clôturé le mercredi 13 mai la session de lancement de la plateforme Recovery. ©Jgp
Les fondateurs de Recovery peuvent se targuer d’avoir une ambassadrice de poids, en la personne de Brune Poirson. Invitée le mercredi 13 mai à participer au débat de clôture de la session de lancement de la plateforme, la secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire a vanté la démarche. « Nous sommes clairement au bout d’un modèle, a-t-elle assuré, il faut donc le repenser et le transformer, à l’instar de ce que fait Recovery, mais sans tomber dans des solutions faciles où on finit par opposer écologie et social sinon on va dans le mur ».
D’autant qu’il faut empêcher qu’après le déconfinement, suive une période de creux et ensuite « une plongée dans de telles affres économiques et sociaux que l’on en oublie la transition écologique ». Mais Brune Poirson en est convaincue : il est possible de combiner économie et écologie. « Il faut écologiser, enjoint-elle, c’est-à-dire faire le lien entre le business et l’écologie » et milite en faveur d’un rapprochement entre Bercy et son ministère.
« Il faut nous piéger et nous forcer à agir »
Déplorant un certaine forme d’immobilisme du Medef qui « envoie les mêmes messages depuis dix ans », elle préconise aux membres de Recovery de créer un « Medef alternatif », « pour ne plus aller sur le plus petit dénominateur commun » et apporter de nouvelles idées notamment en matière de fiscalité. « Bercy traite toujours avec les mêmes interlocuteurs, souvent de grandes entreprises qui se sont organisées autour de la fiscalité telle qu’elle est actuellement et qui rendent les choses encore plus difficiles », a lâché la ministre.
« Outre les pistes que vous évoquez et qui sont très concrètes, il faut creuser le sujet de la fiscalité, car tant que l’on n’y touchera pas en profondeur, on ne réalisera pas la transition écologique », a-t-elle prévenu. Sauf qu’après le traumatisme de la taxe carbone, les politiques ont besoin qu’on leur « redonne confiance » dans ce domaine. Certes, le système de bonus-malus en fonction de l’impact environnemental des produits prévu dans la loi sur l’économie circulaire constitue une avancée, « mais on peut aller encore plus loin », assure la secrétaire d’Etat auprès de la ministre de la Transition écologique et solidaire. « Il faut que vous arriviez à exiger de l’Etat de la cohérence pour nous piéger et nous forcer à agir ». Une lettre de mission on ne peut plus claire pour les fondateurs de Recovery.
– penser la généralisation du télétravail ;
– encourager l’engagement des collaborateurs dans l’entreprise et à l’extérieur ;
– saisir la 2e chance offerte à la finance verte et aux investissements responsables après la 1re offerte par la crise de 2008 ; doit devenir l’outil du Green deal ;
– mettre en place des mondes de gouvernance différents et plus inclusifs ;
– adopter les logiques d’écosystème : la reprise se fera en équipe ;
– revoir les pratiques de la comptabilité qui sont aujourd’hui exclusivement financières pour intégrer les externalités liées aux activités humaines et environnementales ;
– déployer de nouveaux modèles économiques afin d’accompagner la nécessaire transformation des modes de production et de consommation.