PLU bioclimatique : un premier arrêt adopté avant l’été

Stéphane Lecler a indiqué lors d’une conférence sur le PLU bioclimatique de Paris organisée jeudi 9 mars au Pavillon de l’Arsenal qu’un premier arrêt du document ferait l’objet d’une présentation en conseil municipal avant l’été. Le directeur de l’urbanisme de la Ville a rappelé ses grands objectifs et détaillé ses principales mesures.

Si les écologistes ont récemment fait savoir « que le compte n’y était pas », dénonçant l’emprise « des tenants du béton » qui auraient eu gain de cause lors des ultimes arbitrages, le plan local d’urbanisme (PLU) bioclimatique de Paris devrait bel et bien être adopté avant l’été. C’est en tout cas ce qu’affirme l’exécutif parisien. Lors d’une conférence professionnelle organisée au Pavillon de l’Arsenal jeudi 9 mars 2023 en début de journée, Stéphane Lecler, directeur de l’urbanisme de la ville de Paris, a indiqué qu’un premier arrêt de ce PLU serait adopté soit lors du conseil municipal prévu en juin, soit avant ou un peu après lors d’une séance extraordinaire, mais avant l’été en toutes hypothèses.

Plus tard dans la matinée, lors du traditionnel point presse pré-Conseil de Paris, le premier adjoint d’Anne Hidalgo Emmanuel Grégoire a indiqué à son tour qu’il était « en contact permanent avec les écologistes » et que « tout se passait bien ». « Si ce PLU bioclimatique n’était pas adopté, on reviendrait à l’actuel », a-t-il résumé une nouvelle fois, semblant toutefois ne pas croire à la probabilité de ce risque.

Stéphane Lecler (Paris), Michèle Raunet (Cheuvreux notaires) et Raphaël Ménard (Arep). © Jgp

Stéphane Lecler (Paris). © Jgp

En attendant, la troisième conférence organisée au Pavillon de l’Arsenal a permis de mieux comprendre les subtilités du futur PLU de la Capitale. Pour rappel, ce dernier vise à la fois à mettre l’urbanisme parisien en ligne avec l’Accord de Paris et les exigences du défi climatique et à accélérer le rééquilibrage de la municipalité, dans la répartition des logements sociaux d’une part et celle des bureaux d’autre part.

Sur ce dernier point, le directeur de l’urbanisme de la Ville s’est montré parfaitement clair : « nous souhaitons stopper la création de bureaux », a-t-il martelé. Alors que Paris pensait que la pandémie pénaliserait l’immobilier tertiaire, il ne s’est jamais mieux porté dans la Capitale, à l’ouest en particulier, avec un taux de vacance inférieur à 3 %. « Nous voulons partager cette richesse avec les autres communes de la Métropole, et en finir avec la monofonctionnalité de certains quartiers », a indiqué Stéphane Lecler.

Pastillages et servitudes

Cette conférence a permis d’y voir plus clair sur les dispositions du PLU qui doivent permettre à la mairie de procéder au rééquilibrage souhaité : le pastillage d’un certain nombre de bâtiments d’une part et les servitudes de mixité, fonctionnelle ou sociale, d’autre part. Le pastillage désigne des immeubles où le PLU définira des emplacements réservés pour accueillir un certain pourcentage de logements ainsi qu’un pourcentage par types de logements (social, abordable, en bail réel solidaire). Les propriétaires de ces parcelles seront tenus de se conformer à ces réserves en cas de restructuration lourde de leurs biens – le PLU définira ce qu’est une restructuration lourde -, de cession ou de changement de destination. En aucun cas ces obligations seront déclenchées par des simples travaux de rénovation énergétique, a-t-il été précisé.

Les propriétaires concernés bénéficieront d’un droit de délaissement, leur permettant de mettre en demeure la Ville d’acquérir leur bien, à un prix de marché qui ne tiendra pas compte des réserves du pastillage. Si la mairie renonce à acquérir ce bien, alors le propriétaire concerné, ou le futur propriétaire si la vente est maintenue, se verra délié des obligations du pastillage.

La logique est la même avec les servitudes de mixité fonctionnelle ou sociale, sauf que celles-ci ne prévoient pas de droit de délaissement et qu’elles s’appliquent systématiquement à partir d’une certaine taille d’immeubles et non plus en fonction d’un pastillage ciblé. En cas de gros travaux également, les immeubles concernés devront accueillir des logements, en prévoyant là encore leur répartition par type, ou des équipements divers (services publics, espaces verts, infrastructures).

Stéphane Lecler a indiqué que le nombre de pastilles contenues dans le futur PLU allait être multiplié par trois par rapport à l’actuel, passant de 300 à près de 1 000. D’où l’inquiétude des investisseurs qui redoutent une dépréciation de leurs actifs.

Des critères « scientifiques »

Le directeur de l’urbanisme a détaillé les critères « scientifiques » sur lesquels s’est fondé le choix des immeubles qui feront l’objet de ce « pastillage ». Il a rappelé que l’ensemble des propriétaires concernés en avait été informé, les échanges avec eux se poursuivant. « Ce qu’aucun texte nous imposait et ce qui n’avait pas été fait en 2006 », a souligné Stéphane Lecler.

Les immeubles « pastillés » ont été choisis notamment en veillant à ce qu’ils soient monopropriétaires, ou possédés par des copropriétés peu nombreuses, pour des raisons de simplicité et de délais. Ce choix repose également sur la densité de logements sociaux des quartiers concernés, selon qu’ils soient hyper-déficitaires (moins de 10 % de logements sociaux), déficitaires ou pas. La taille de ces bâtiments est également prise en compte, les bailleurs sociaux n’opérant que les lots d’une certaine importance, à partir de 500 m2 de surface en l’occurrence.

« Il reste des points à préciser, à clarifier le plus vite possible, notamment en matière de calendrier, a souligné Me Michèle Raunet (Cheuvreux notaires). Nous menons un travail passionnant, pour que les exigences de ce PLU ne signent pas un arrêt de l’économie, mais permettent de continuer à vendre et à louer », a poursuivi la notaire, qui figure parmi les conseils de la Ville sur ce dossier.

Le futur PLU bioclimatique protégera par ailleurs les arbres, qui ne bénéficient pas pour l’heure d’une protection particulière, exigeant une surcompensation en cas d’abattage inévitable. Il proscrira tout aménagement à proximité du périphérique. Ce document d’urbanisme encouragera tout ce qui favorise la biodiversité, à l’instar de la mise au jour de la Bièvre. Il prévoit par ailleurs la multiplication des places de stationnement pour vélos. Une entrée « santé » est également annoncée, afin de garantir un maillage de la ville en services de proximité, accessibles à tous, c’est-à-dire au rez-de-chaussée des artères commerciales. La démographie médicale à Paris, vieillissante, fait en effet craindre une pénurie de praticiens dans les prochaines années.

Une enquête publique d’importance

Le PLU durcira encore la réglementation des locations touristiques de courte durée, interdisant toutes nouvelles mises en location de ce type dans certains quartiers. Un nombre accru de bâtiments remarquables et patrimoniaux bénéficieront d’une protection. La secteur de Montmartre fera ainsi l’objet d’un plan de valorisation architecturale et patrimoniale (PVAP). Les dark stores et autres dark kitchens seront régulés par ce plan, qui prévoit aussi l’organisation des différentes échelles de desserte de logistique urbaine.

3e conférence de présentation du PLU bioclimatique de Paris à l’intention des professionnels, au Pavillon de l’Arsenal jeudi 9 mars. © Jgp

L’enquête publique qui débutera après l’adoption du premier arrêt du PLU s’annonce déterminante. Sur un plan politique, c’est sur le plafonnement de la hauteur des constructions, le statut de la Petite ceinture, l’aménagement des portes de Paris ou les parcelles à partir desquelles un seuil minimal de pleine terre sera exigé que se concentrent les débats au sein de la majorité. Concernant les plafonds de hauteur, ils dépendront de la largeur des voies mais aussi du contexte. La surélévation ne sera autorisée que pour construire des logements, notamment sociaux.

Si le PLU est bien présenté en conseil municipal avant l’été, il pourrait être opérationnel courant 2024, au terme de l’enquête publique et après une nouvelle délibération l’adoptant définitivement. On n’y est pas encore.

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