Pascal Chabot, membre du directoire de la Caisse d’Epargne Ile-de-France, constate, depuis cet été, une hausse des demandes de crédits et un regain d’optimisme de acteurs économiques qu’il relie au développement des projets du Grand Paris.
Quelle est la singularité de la Caisse d’Epargne d’Ile-de-France dans le Grand Paris ?
Ce qui nous intéresse le plus dans le Grand Paris, comme dans le développement de l’Ile-de-France dans son ensemble, c’est qu’il s’agit de sujets multidimensionnels. Certaines banques sont centrées sur le marché des entreprises, ou des particuliers ; nous avons une logique territoriale. C’est notre force. La Caisse d’Epargne Ile-de-France est sans doute la seule banque qui exerce son activité dans le périmètre strict de la région. Nous vivons, depuis longtemps, dans une logique de circuit court, avec une base de clientèle très large, fruit de notre histoire. Nous comptons trois millions de clients franciliens, tous marchés confondus. Cela nous donne une assise considérable, nous rendant relativement insensibles aux fluctuations des marchés financiers.
Nous avons aujourd’hui une totale couverture par nos ressources du financement de tous les projets que nous soutenons en Ile-de-France. Autrement dit, nous avons autant de crédit que de dépôt. Nous sommes d’ailleurs en train de mobiliser davantage notre capacité d’endettement pour la mettre au service de l’économie francilienne. Le Grand Paris nous intéresse en particulier parce que nous avons la capacité d’accroitre le financement de ses différents grands projets, grâce à la qualité de notre bilan. Il est aussi important de rappeler que l’ensemble des dépôts des franciliens chez nous sert à financer des projets de la région. C’est notre marque de fabrique.
Vous êtes une banque généraliste ?
Dans le cadre de cette approche territoriale, nous finançons tous les domaines de l’économie, sans exclusive. Auprès des particuliers, mais aussi des collectivités, pour le financement desquels nous sommes leaders. Et entre les deux, nous finançons tous les compartiments de l’économie francilienne : les entreprises, les acteurs de l’immobilier professionnel, les associations, le logement social, à travers le livret A, qui est également constitutif de notre histoire. Nous finançons tout l’écosystème francilien.
Notre conviction, c’est que le territoire se développera d’autant plus qu’il sera équilibré. Ce dont une PME a besoin pour se développer, c’est de la demande, d’être rentable, financée, mais il lui faut également loger ses salariés dans de bonnes conditions, bénéficier d’une bonne desserte en transport. C’est pourquoi nous allons renforcer encore notre intervention dans le financement des infrastructures, où nous sommes déjà très actifs. Il s’agit d’un facteur clé de la création d’emplois.
Vous prêtez à très long terme ?
N’ayant pas à nous refinancer massivement sur les marchés, nous pouvons financer en effet à long terme, même si la régulation bancaire nous impose des règles de plus en plus strictes. On peut financer sur des durées pouvant aller jusqu’à 25 ans, voire même 30 ans, sans difficultés.
Qu’est-ce qui change pour vous au 1er janvier 2016 ?
Finançant pratiquement toutes les collectivités d’Ile-de-France, les recompositions territoriales du Grand Paris nous impactent, ne serait-ce que pour que les contrats en cours tiennent compte des changements de périmètre. Nous cherchons également à identifier les projets de ces nouveaux territoires, leurs forces et leurs faiblesses, leurs stratégies. Nous souhaitons toujours comprendre les enjeux de nos clients, savoir comment ils fonctionnent.
Vous croyez à l’effet métropolitain ?
Sans réaliser de grandes études, on sent qu’il se passe quelque chose sur le périmètre du Grand Paris. Certes, le niveau de défaillance des entreprises demeure élevé en Ile-de-France, mais stable. Nous percevons, depuis cet été, une inflexion positive en termes de nouveaux projets, une vision de l’avenir plus optimiste. Les premiers résultats des enquêtes conjoncturelles de la Banque de France montrent une reprise en Ile-de-France plus forte que dans le reste de la France. Et c’est démontré au niveau mondial : chaque métropole tire l’économie de son territoire. Espérons que les événements récents ne vont pas freiner cette tendance. Nous constatons une hausse des demandes de crédit, qu’elles proviennent des entreprises, des infrastructures, du marché de l’immobilier, où l’on sent clairement une reprise ou des autres secteurs, publics ou privés.
Nous nous félicitons aussi, comme tout le monde, de l’effervescence de l’économie de l’innovation en Ile-de-France. Dans tous les secteurs, y compris par exemple, dans le secteur de l’économie sociale et solidaire ou encore du sanitaire et sociale, ou de nombreuses start-up émergent, innovent, avec des porteurs de projet qui montrent une forte logique entrepreneuriale, qu’il s’agisse d’économie circulaire, de réseau de distribution innovant ou de transition énergétique. Nous sommes très attachés, à la Caisse d’Epargne, à l’économie sociale et solidaire, à la santé, ou à l’éducation. Là aussi parce qu’il ne peut y avoir de développement pérenne et profitable sans renforcement du lien social. Nos valeurs, basées sur notre utilité, notre ancrage territorial, se sont réaffirmées après 2008.
Quel regard portez-vous sur la baisse forte des dotations de l’Etat aux collectivités ?
Elle peut pénaliser les territoires les plus en difficultés, qui ne pourraient financer les infrastructures et les équipements publics qui leur manquent. Cela peut être contraignant sur certains territoires qui ont de grands besoins et pas forcément les moyens de les financer.
« On constate une recrudescence des tentatives de fraudes, le développement d’internet diversifiant les modes opératoires », souligne Pascal Chabot. Les usurpations d’identités, par mails, par exemple, permettent de donner de faux ordres de virements à des services comptables croyant exécuter des consignes régulières. « Cela nécessite donc de sécuriser ses flux et de vérifier l’identité de ses interlocuteurs, poursuit-il. Le signalement par un fournisseur indiquant un changement de coordonnées bancaires doit être contrôlé. Les techniques du big data nous permettent de détecter des mouvements de fonds atypiques, mais la vigilance de chacun s’impose ».