J.-C. Fromantin : « Derrière l’abandon de l’Exposition universelle se cache le sujet de la ligne 18 »

Les porteurs de l’organisation de l’Exposition universelle de 2025 ont fait part de leur déception, le 22 janvier 2018, à la suite de l’annonce du retrait de la candidature française.

C’est la consternation. Devant les journalistes et soutiens à la candidature française à l’organisation de l’Exposition universelle de 2025, réunis à l’Hôtel de l’industrie (4e arr.), Jean-Christophe Fromantin ne cache pas sa profonde déception. C’est le visage grave que le patron du comité de candidature explique avoir appris par la presse la décision du Premier ministre d’enterrer la candidature française.

Jean-Christophe Fromantin. © Cyrille George Jerusalmi

« Des arguments qui sont faux »

« Quand je lis les remarques qui nous sont faites sur un modèle économique qui ne serait pas solide, je rappelle qu’il a été validé par tous les partenaires, publics comme privés », remarque le maire de Neuilly-sur-Seine. Pendant près d’une heure, ce dernier a ainsi démonté la raison officiellement évoquée pour justifier ce retrait. « Ce sont des arguments qui sont faux, qui cachent tout simplement un autre sujet qui est celui de la ligne 18 », a finalement lâché Jean-Christophe Fromantin.

Le gouvernement doit en effet se prononcer dans les heures à venir sur le calendrier du Grand Paris express. Pour lui, comme pour François Durovray, le président du conseil départemental de l’Essonne également présent, il ne fait plus de doute que l’impossibilité de tenir une Exposition universelle sur le plateau de Saclay tienne au fait que la ligne 18, qui doit le desservir, soit remise en question.

Car sur le modèle économique, rien ne pourrait le justifier, considère Jean-Christophe Fromantin. Le président d’ExpoFrance 2025, l’organe chargé de porter la candidature, a ainsi rappelé l’originalité du projet ; l’absence de recours à des deniers publics. Le financement « entièrement privé » aurait ainsi été porté d’un côté par des opérateurs qui investissent dans les infrastructures et de l’autre par des opérateurs chargés de l’exploitation. L’exploitant reverse ainsi une redevance à l’organisateur (ExpoFrance 2025) qui lui-même verse un loyer aux porteurs des infrastructures. Sans intervention de l’Etat donc. L’hypothèse « conservatrice » retenue dans le dossier reposait par ailleurs sur 33 millions de visiteurs pour un ticket d’entrée à 34 euros.

En visite sur le plateau de Saclay en octobre 2017, Emmanuel Macron avait rappelé son soutien à la candidature française pour l’organisation de l’Exposition universelle. ©Jgp

Modèle économique validé, sans fonds publics

« Ce modèle économique a été validé, vérifié par des cabinets indépendants mais aussi par les services de l’Etat, plaide Jean-Christophe Fromantin. Par sécurité, le groupement d’intérêt économique nous a demandé de chiffrer d’autres hypothèses moins ambitieuses. » Un scénario dit « Milan », avec 21 millions de visiteurs et 20 euros par billet. Et surtout un scénario dit « point-mort », demandé le 15 janvier par le délégué interministériel chargé du projet d’Exposition universelle. Celui-ci tablant sur 25 millions de visiteurs à 34 euros le billet. Les recettes sont alors moins élevées mais compensées par des infrastructures revues à la baisse.

Dans tous les cas, le modèle repose sur des financements exclusivement privés. « Et est validé par tous les services », selon le maire de Neuilly. En visite à Saclay ou lors de la semaine des ambassadeurs, Emmanuel Macron a par ailleurs défendu cette candidature à plusieurs reprises. Difficile donc, pour l’élu, de comprendre le revirement du gouvernement qui pointe aujourd’hui « les faiblesses structurelles du modèle économique » et un projet qui ne pourrait prospérer sans garanties de l’Etat.

Ligne 18 : le « mobile du crime »?

« Colère, déception et incompréhension », voilà la palette de sentiments affichée par François Durovray face « à une décision solitaire sur un projet collectif ». Le président (LR) du conseil départemental de l’Essonne s’est également dit « choqué par les arguments avancés ». « Prétexter le défaut de modèle économique est profondément mensonger, la réalité est en fait très politique », assure l’élu.

Je crains que la réponse ne soit donnée dans les prochains jours avec les annonces sur le Grand Paris express. La ligne 18 est nécessaire sans l’Exposition universelle, mais c’est aussi elle qui a permis le projet. Je ne vois pas comment on pourrait la remettre en cause mais si le gouvernement le faisait, nous aurions le mobile du crime, considère François Durovray.

En plus de remettre en cause les arguments de fond, les élus se sont aussi attaqués à la méthode et au symbole. Laurent Lafon a ainsi dénoncé « la brutalité de l’annonce, de manière autoritaire, sans dialogue. C’est une façon de prendre des décisions qui relève d’un autre temps », a poursuivi le sénateur (UDI) du Val-de-Marne. Comme François Durovray ou Jean-Christophe Fromantin, ce dernier a par ailleurs souligné « l’incohérence de ce retrait avec les projets du président de la République sur la place de la France à l’international ». Selon eux, au-delà des retombées économiques, il s’agissait aussi de donner une nouvelle force à la voix de la France dans le concert des nations.

« Sonnés mais pas KO », les élus laissent la porte ouverte à un nouveau projet, sur les mêmes bases, qui ne serait pas une Exposition universelle officielle, mais dont les contours restent vagues.

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