Dominique Boré – A l’école de la rue

De Saïgon à Rabat, de Roanne à La Défense, Dominique Boré, directrice de la communication et des relations institutionnelles de l’EPA Paris-Saclay, a conduit sa carrière à toute berzingue, avec une extraordinaire énergie.

« A cinq ans je ne parlais pas un mot de français », raconte Dominique Boré. Sans la moindre plainte dans la voix. Avec gourmandise presque, et un art consommé du conte. Fille de militaire, née à Saïgon, la jeune fille est élevée par ses nounous. Et croise rarement ses parents. Puis c’est le Maroc. Même indépendance… « J’ai grandi dans la rue », poursuit-elle. Avec cette vivacité, cette tension qui la caractérise et qui s’interrompt fréquemment par de grands éclats de rire. Dominique Boré, c’est un regard, d’une vivacité et d’une expressivité extraordinaire. « Je suis explosive, se définit-elle elle-même, même si je me suis calmée. » La lenteur, les débats stériles, peuvent encore la mettre hors d’elle.

Dominique Boré

Dominique Boré. © DR

On ne plaisante pas chez ses parents, et plus généralement dans sa famille, qui compte nombre de militaires. « Un dimanche à la table du déjeuner familial, mes parents m’ont soudain entendu parler, découvrant avec stupeur mon accent pied-noir des faubourgs. » Elle est envoyée sans ménagement en France. Direction l’Ecole de la légion d’honneur − Légion dont son père a été décoré à l’âge de 25 ans −, à Saint-Germain-en-Laye. Dominique Boré s’y plaît. « Même s’il faisait froid, et que, sans nounou, j’étais un peu prise au dépourvu. Je ne savais pas m’habiller toute seule », poursuit-elle.

« L’affaire Sarkozy »

Elève brillante, prépa lettres au lycée Fénelon, elle devient ensuite professeur de lettres à Roanne, où son premier mari, polytechnicien, dirige l’Arsenal. « J’ai toujours été passionnée par ce que j’ai fait », résume-t-elle, de son air inclassable, oscillant toujours entre gravité, malice et bonhommie. Décisive, sa rencontre avec Jean Auroux, maire de Roanne, avec lequel elle vit un coup de foudre professionnel, la fait passer de l’enseignement à la vie publique. Elle intègre sa mairie, avec une flopée de trentenaires plein d’idées et d’énergie. La culture pour tous, la participation des habitants sont en vogue. Puis ses enfants grandissent. Ne serait-il pas temps de revenir à Paris ? Son nouveau mari, « l’homme de ma vie », dirige le théâtre de Roanne. Il prend alors les rênes de celui de Fontainebleau. Dominique postule à la direction de la communication du SAN du Val d’Europe. C’est le lancement de Disney. « J’étais hallucinée par l’ampleur de l’opération d’intérêt national. C’était une autre époque, se souvient-elle. Un délégué interministériel réunissait régulièrement les acteurs du projet. Personne ne mouftait. » Elle rejoint ensuite l’Association française des villes nouvelles, où elle se plaît dans des actions de lobbying. Manuel Valls ou Pierre Bédier figurent à son conseil d’administration. D’où un carnet d’adresses garni.

Sa carrière trépidante se poursuivra à l’ordre des architectes, où elle prend le secrétariat général et ordonne les archives depuis 1940. Son long passage à l’Epasa puis l’Epadesa, l’établissement public d’aménagement de La Défense, lui vaudra un arrêt cardiaque, provoqué par l’épuisement et le stress de l’« affaire » de la candidature de Jean Sarkozy. Puis ce sera Saclay, où elle dirige la com’ et les relations institutionnelles de l’Etablissement public d’aménagement. Un projet à la mesure de cette femme hors normes, unanimement appréciée pour son professionnalisme et son humanité. Même par les dirigeants d’Architecture studio, qu’elle a fui en courant après quelques mois à la direction générale, ne goûtant pas leurs spectaculaires engueulades quotidiennes. « Ils sont géniaux mais cinglés », résume-t-elle. « Elle est adorable », disent-ils d’elle, quelques années plus tard.

Sur le même sujet

Top