Cécile Maisonneuve – Sans étiquette

Inclassable mais multifacette, Cécile Maisonneuve a servi l’intérêt public comme les intérêts français à l’étranger. A la tête de la Fabrique de la cité, son nouveau défi : faire émerger un langage commun entre les acteurs de la ville.

« Je ne m’enfermerai jamais dans une étiquette, jamais. Mon moteur est programmé pour l’action. » Voilà qui est dit, d’un ton ferme mais d’une voix de velours. Depuis trois ans qu’elle dirige la Fabrique de la cité, think tank d’innovations urbaines créé par Vinci, cette ancienne administratrice de l’Assemblée nationale doit pourtant, comme dans l’hémicycle, jongler avec les étiquettes et les métiers.

Cécile Maisonneuve

Cécile Maisonneuve. © Bernard Martinez

« Cela demande du temps et de l’énergie de faire dialoguer des personnes issues de différentes disciplines, et qui n’ont pas le même vocabulaire », confie-t-elle, mordant dans une tartine beurrée. Pour ce complexe exercice d’interprétariat, cette « grande lectrice » a choisi « Dire presque la même chose » d’Umberto Eco comme lecture du moment. Livre qui ne s’éternisera pas sur la table de chevet de Cécile Maisonneuve, contrairement aux « Mémoires d’Hadrien » de Yourcenar, qu’elle dit « relire sans cesse, pour son style extraordinaire et ce personnage partagé entre la réflexion et l’action ».

Ce récit, qui prend place dans l’ère décliniste de l’Empire romain, renvoie cette Orléanaise de naissance à sa première passion, toujours entretenue, l’Histoire. Cette « pure littéraire » qui a consacré une deuxième année de master à la IVe République est surtout marquée par le personnage de Benjamin Franklin, auquel elle consacre une biographie. « Il était le seul des pères fondateurs à être issu d’un milieu modeste, avec une véritable curiosité intellectuelle et une volonté de servir l’intérêt général dans tout ce qu’il entreprenait. » En dédiant de longues années au service de l’Etat et de l’intérêt public, Cécile Maisonneuve perçoit dans les racines de Benjamin Franklin un écho à sa propre histoire familiale, s’inscrivant « dans un mouvement global de la France du XXe siècle qui, grâce à l’école de la République, permettait une certaine mobilité sociale et géographique ».

Ni modèle ni mentor

Après l’enfance « facile et heureuse » d’une jeune fille « rangée » qui dévorait « une vingtaine de livres chaque été », Cécile Maisonneuve transcrit son souci de l’intérêt général au 45 rue d’Ulm. Elle réussira avec brio le rude concours d’administrateur de l’Assemblée nationale qui, chaque année, n’offre que dix postes. « Et ce n’était pas le plus difficile », plaisante-t-elle, en référence au concours du cadre d’Orient – réussi – qui ne désigne qu’un lauréat. Au Palais-Bourbon, elle se plaira à « naviguer à travers la complexité de la loi », déployant son expertise en commission des affaires étrangères ou de défense de 1997 à 2007. Et de nouer les premiers contacts avec les think tank, qui la convaincront de rejoindre la Fabrique de la cité en 2015.

Mais avant, elle carburera avec son autre moteur « international » chez Areva, pour qui elle assure la présence à l’étranger. Au bout : cinq ans de carrière et un souvenir impérissable de sa rencontre avec Anne Lauvergeon. « Une femme très inspirante », confie posément celle qui avouait plus tôt n’avoir « ni modèle ni mentor ».

Forte de ce cheminement du public au privé, Cécile Maisonneuve porte désormais, pour la Fabrique de la cité, l’ambition d’un « MIT européen pluridisciplinaire ». Un « laboratoire original » qu’elle a ouvert au-delà du simple cercle franco-français. Et de rêver d’une ville de demain « qui s’inscrit dans son histoire, ne doit ni faire peur, ni susciter un enthousiasme délirant ».

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