Berges rive droite : les réactions à la décision d’Anne Hidalgo

Medef Grand Paris, Fédération française du bâtiment Grand Paris, Verts, élus métropolitains, régionaux, l’annonce par Anne Hidalgo de sa décision de passer outre l’avis défavorable de la commission d’enquête provoque de nombreuses réactions, fort contrastées.

Le Medef Paris demande le report du projet

« Dans son rapport remis à l’issue de l’enquête publique qui s’est déroulée du 8 juin au 8 juillet 2016, la commission d’enquête conclut défavorablement à la poursuite du projet présenté par la mairie de Paris conduisant dès l’automne 2016 à la fermeture définitive d’une partie de la voie Georges Pompidou à la circulation automobile », rappelle en préambule le Medef Grand Paris.

L’organisation patronale « prend note que la commission d’enquête ait retenu que l’économie, l’emploi et l’attractivité de la métropole constituaient des enjeux tels que la décision de fermeture de la voie Georges Pompidou ne pouvait intervenir sans que soit examiné son impact sur un périmètre élargi à toutes les zones susceptibles d’en subir les conséquences. Il partage les conclusions sur le plan économique de la commission soulignant que les effets négatifs (heures perdues, baisse de fréquentation, difficultés d’accès …) l’emporteront largement sur les effets positifs modestes et incertains (création de commerces, activités fluviales) évoqués par la ville de Paris dans son projet ».

En ce qui concerne le bénéfice environnemental avancé par la maire de Paris pour maintenir sa décision, le Medef Grand Paris souligne « l’inefficacité du projet en matière de réduction des émissions de CO2 ». Il rappelle « que 80 % des déplacements dans Paris sont professionnels et que le seul allongement du temps de trajet aux heures de pointe dû à cette fermeture aura pour conséquence la perte d’un million d’heures de travail par an ».

Ce coût économique permettrait de financer des projets 100 fois plus efficaces que la fermeture de la voie Georges Pompidou pour réduire les émissions de CO2, indique le Medef.

Pour Jean-Louis Schilansky, président du Medef Paris et porte-parole du Medef Grand Paris, « en dépit des nombreuses demandes de concertation et de différé de la décision, en dépit également de son impact économique significatif et de son inefficacité en matière environnementale,  la ville de Paris a déclaré vouloir malgré tout poursuivre le projet de fermeture de la Voie Georges Pompidou. Le Medef Grand Paris réitère sa demande pour que cette décision soit reportée. »

La FFB pour un moratoire

La Fédération française du bâtiment (FFB) Grand Paris demande un moratoire sur le projet de piétonisation des voies sur berge rive droite. « Les voies sur berge représentent un axe essentiel de circulation pour notre activité. Il faut trouver ensemble des solutions conciliant respect de l’environnement et maintien de l’activité économique », déclare Patrick Aimon, président de la FFB Grand Paris.

La Région souhaite que la mairie de Paris « sursoie à sa décision »

« La Région avait alerté sur le fait que cette voie était une infrastructure d’intérêt régional, avec une circulation comparable à celle d’une route nationale et que les effets du report de circulation risquaient d’être très pénalisants en matière de pollution et d’embouteillage, particulièrement sur le Val-de-Marne et la Seine-et-Marne, dont les axes routiers sont déjà saturés, rappelle l’exécutif francilien. Elle se réjouit de voir que le commissaire enquêteur partage ce point de vue.

Un tel projet ne peut se traiter sans une étroite concertation entre Paris et sa banlieue, au risque d’accroitre les fractures territoriales et sociales de l’Ile-de-France.

Pietonni

L’exécutif régional demande que le projet de piétonisation de la voie G. Pompidou, entre les Tuileries et Bastille, soit réexaminé et assorti, le cas échéant, de mesures compensatoires. © Jgp

« Le temps de la concertation avec les Franciliens doit être pris, avec une enquête publique sur un périmètre régional, afin que ce projet puisse être réexaminé et accompagné de mesures compensatoires (parkings aux portes de Paris, protections phoniques, solutions alternatives de transport…) qui le rende acceptable pour tous. » La Région souhaite donc « que la mairie de Paris sursoie à sa décision, en attendant un nouveau projet qui réponde aux inquiétudes des parisiens et des habitants de la petite et grande couronne ».

« La commission a 30 ans de retard », estiment les Verts

« Malgré l’avis défavorable de la commission d’enquête, le groupe écologiste votera au Conseil de Paris de septembre en faveur de la piétonisation des berges rive droite, font valoir Anne Souyris et David Belliard, coprésidents du groupe écologiste de Paris. Contrairement à la commission, les élues écologistes suivront la volonté des Parisiennes et des Parisiens qui s’est manifestée à plusieurs reprises : d’abord en choisissant lors des élections municipales une majorité de gauche et écologiste qui portait clairement ce projet, puis en préférant massivement, il y a quelques mois, le projet de piétonisation le plus important (consultation organisée par la mairie sur internet, approuvée en Conseil de Paris en décembre 2015). Ce projet est en outre plébiscité par 60 % des Parisiens en avril dernier (sondage Ifop JDD – avril 2016) », poursuivent-ils. Pour les Verts, « si le rapport de la commission porte ses critiques, faiblement étayées voire étrangement contradictoires avec les études existantes, sur les reports de circulation et sur un soi-disant manque d’information à cet égard, les élues écologistes de Paris pointent, eux, les enjeux de mieux-vivre et de santé publique ».

Avec la piétonisation, nous pouvons réduire les émissions de polluants de près de 40 % en moyenne sur le secteur, explique Anne Souyris, coprésidente du groupe écologiste de Paris.

“Quand on sait que la pollution atmosphérique tue 48 000 personnes chaque année en France, il y a urgence à agir et à améliorer la qualité de l’air, ce que permet notamment la piétonisation. La politique volontariste que nous avons menée depuis 2001 doit s’accélérer : elle a permis de diminuer de 28 % l’usage de la voiture à Paris – et d’améliorer la qualité de l’air ! Persévérer va dans le sens du bien commun”, poursuit Anne Souyris.

“On peut légitimement s’interroger sur les conclusions de la commission d’enquête, qui ne s’appuient pas, voire contredisent, les études sérieuses et cohérentes d’instituts aussi indiscutables qu’Airparif et Bruitparif , ajoute David Belliard, coprésident du groupe des élues écologistes. Toutes ces études montrent une réduction de 30 % au bas mot des émissions de gaz polluants sur la zone en question.”

Jacques JP Martin : « Le réalisme impose une concertation »

« Alors qu’avec plusieurs maires, en tant que président du territoire Paris Est Marne Bois, j’intervenais auprès de madame la maire de Paris pour que les habitants de la proche couronne ne soient pas exclus de l’enquête publique relative à l’aménagement des berges de la rive droite de Paris, les conclusions du commissaire enquêteur viennent de me donner raison par l’avis défavorable qu’il vient de rendre », indique Jacques JP Martin.

En réalité nous ne demandions pas une annulation de cette décision, mais bien un moratoire de deux ans destiné à améliorer la qualité de l’air, tant sur Paris que dans la proche couronne, et à étudier des solutions alternatives à la fermeture des berges (transports en commun, modes doux en matière de déplacements…).

« Monsieur le préfet de police m’écrivait, le 13 juillet dernier, que son avis, qui interviendra fin septembre, tiendrait compte des conclusions du commissaire enquêteur, poursuit Jacques JP Martin. A la lumière de cette décision, nous attendons plusieurs initiatives :

  • que madame la maire de Paris ne passe pas outre les résultats de la
    consultation qu’elle a elle-même souhaitée,
  • que madame la maire de Paris accepte que soit créé immédiatement un comité de pilotage mixte, Paris-banlieue, au sein, ou hors, de la métropole du Grand Paris.

Il est temps de raison garder et de revenir à un projet partagé qui tienne compte
des réalités quotidiennes de circulation Paris/Banlieue et destiné à faciliter les
liaisons est-ouest en matière de circulation, tout en améliorant la qualité de l’air
des communes de Paris et de sa proche banlieue. »

Gilles Carrez : « Paris s’entête dans un choix idéologique, au risque d’aggraver le clivage avec la banlieue »

« Depuis plusieurs mois, les élus de l’est parisien se battent pour surseoir au projet de piétonisation des voies sur berge de Seine rive droite à Paris, considérant que celui-ci :

  1. aura des répercussions bien au-delà des seuls arrondissements auxquels il est fait référence dans l’enquête publique
  2. et doit s’inscrire dans une réflexion plus large quant au développement d’alternatives au transport automobile auquel de nombreux franciliens sont contraints.

Lundi dernier, la mairie de Paris a décidé de passer outre l’avis de la commission d’enquête publique relative à ce projet. Or, cet avis fait précisément droit à ces deux revendications », estime Gilles Carrez, député-maire du Perreux, vice-président de la métropole du Grand Paris en charge des finances.

« Comme la métropole du Grand Paris (MGP) et la Région Ile-de-France l’avaient indiqué, la commission estime que le périmètre de l’enquête publique est insuffisant et que l’étude d’impact ne permet pas d’établir la réalité de la réduction de la pollution automobile induite par la fermeture de la voie sur berge, poursuit l’élu.

Dans ces conditions, je réitère le vœu formé par la MGP le 24 juin dernier afin que des études complémentaires tant en termes de développement économique que de déplacements urbains soient conduites à l’échelle métropolitaine.

Plus largement, je suis convaincu que l’objectif d’amélioration de la qualité de l’air poursuivi par ce projet ne pourra être atteint que dans le cadre plus ambitieux du Grand Paris express, seule perspective susceptible de développer des alternatives crédibles au transport automobile. »

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