Alors que le Paris Saclay cancer cluster (PSCC) poursuit son développement à Villejuif (Val-de-Marne), l’avenir du site de la Redoute des Hautes-Bruyères demeure bloqué. Le maire, Pierre Garzon (PCF), dénonce l’absence de concertation et la volonté de l’Etat de tirer un maximum de valeur d’un foncier stratégique, au détriment des besoins du territoire. Une mobilisation politique et économique se met en place pour sortir de l’impasse.
Le torchon brûle au sujet de l’aménagement de la Redoute des Hautes-Bruyères, à Villejuif (Val-de-Marne), entre l’Etat, les élus locaux et les acteurs économiques concernés par le développement de cette zone stratégique. Cet ancien site militaire, situé au cœur du périmètre de la ZAC Campus Grand Parc, jouxte le parc départemental du même nom, l’autoroute A6, et surtout l’Institut Gustave Roussy (IGR), pivot du Paris Saclay cancer cluster (PSCC). Un centre destiné à devenir une référence mondiale de cancérologie, que l’aménagement de la Redoute des Bruyères doit venir utilement compléter.
« La Redoute n’est pas une boîte à cash ! », a déclaré Pierre Garzon, maire (PCF) de Villejuif, lors d’un déjeuner de presse organisé le 17 juin. A cette occasion l’élu a publiquement exprimé son mécontentement face à ce qu’il considère comme une forme d’inaction, voire de mépris, de l’Etat dans ce dossier.
« L’Etat, propriétaire des lieux, ne dit pas ce qu’il veut faire du site. Il cherche simplement à maximiser ses recettes, en envisageant 60 000 m2 de constructions. Ce n’est pas raisonnable. Je suis prêt à accepter 30 000 ou 35 000 m2, pas plus. Et surtout, pas sans concertation », indique l’édile, sans se départir de son habituelle équanimité, mais sans détour non plus. Derrière ce « coup de gueule », la lassitude face à un site qui, après avoir été occupé par des CRS, proposé à l’appel à projets Inventons la métropole du Grand Paris, puis brièvement pressenti pour accueillir des services du ministère de l’Intérieur, n’a toujours pas trouvé de vocation stabilisée.
Un blocage « incompréhensible »
Un blocage jugé d’autant plus incompréhensible par les acteurs locaux, donc, que ce foncier pourrait répondre à des besoins très concrets : ceux du PSCC, en plein essor, qui requiert bureaux et logements pour les professionnels de la recherche et de la santé. « Depuis des années, nous portons une ambition partagée avec l’EPT [établissement public territorial] Grand Orly Seine Bièvre, l’Université Paris-Saclay, l’IGR et le monde économique, souligne Pierre Garzon. Il est temps que l’Etat agisse en partenaire ».
Un courrier adressé le 7 mai 2025 au ministre de l’Economie, Eric Lombard, co-signé par 15 maires du Val-de-Marne et par Dominique Giry, président du conseil de développement du département, vient renforcer cette interpellation. Il plaide pour « une feuille de route pleinement partagée » et dénonce « les changements de pied réguliers de l’Etat », qui paralysent le projet, alors qu’un nouveau quartier est sorti de terre autour de l’IGR et que la station de la ligne 14 est en service depuis plusieurs mois.
Plusieurs millions d’euros ont d’ores et déjà été dépensés pour la sécurisation, le gardiennage (850 000 euros par an) et le nettoyage du site, devenu une décharge à ciel ouvert pendant la crise sanitaire. Le chantier de déblaiement a enfin commencé à l’automne 2023, mais la dépollution des sols, elle, reste en suspens. Et pour cause : tant que la programmation d’ensemble n’est pas définie, les normes de dépollution ne peuvent être fixées.
C’est cette incertitude que le maire de Villejuif dénonce. Et surtout l’attitude du préfet de région, Marc Guillaume, « venu plusieurs fois sur site sans jamais m’informer, ni m’associer ». Un fonctionnement que Pierre Garzon juge contre-productif : « Il continue de détricoter ce que nous essayons de construire collectivement, entre Ville, Territoire, Département, partenaires scientifiques et économiques. »
Une mobilisation collective
En mars dernier, comme le révélait Le journal du Grand Paris, le préfet du Val-de-Marne, Etienne Stoskopf, estimait quant à lui, sans excès de concertation non plus, qu’« évacuer complètement le sujet de la construction de logements sociaux sur le site n’est pas possible ». Une orientation que les élus locaux ne rejettent pas en soi, mais qu’ils estiment devoir être subordonnée aux besoins prioritaires du cluster.
Pour Dominique Giry, une mobilisation collective s’impose. Le président du Codev 94 entend, avec d’autres dirigeants économiques, porter publiquement le sujet dans les prochaines semaines, afin de « rompre l’attentisme » qui pèse sur un projet présenté comme d’intérêt national. « Il en va de notre souveraineté en matière de recherche en santé », prévient-il.
Reste à savoir si l’appel des élus et des acteurs du territoire sera entendu. Pour Pierre Garzon, « le bras de fer se durcit », mais il affirme vouloir encore croire à un dialogue possible. « J’ai accepté de monter à 35 000 m2. Il faut que l’Etat fasse le même geste ».

