De Bagneux à Villejuif, de Montrouge à Cachan, comme dans toutes les villes du territoire, les maires de la Vallée scientifique de la Bièvre (VSB) mènent des politiques d’aménagement volontaristes dans une vision partagée des nouveaux défis à relever. Tous saluent le rôle de la conférence des projets de la VSB, structure de coopération souple, qui leur permet d’échanger et de coordonner leur action. Dossier réalisé en partenariat avec la Conférence des projets de la VSB.
Les 8e assises de la Vallée scientifique de la Bièvre se tiendront vendredi 22 novembre alors que les défis de l’aménagement de ce territoire ont fortement évolué. L’heure est à l’achèvement de grands projets nés il y a des années, à l’ouverture des nouvelles lignes de métro et aux mutations profondes exigées par le défi climatique et l’essor du télétravail.
Une dynamique urbaine forte, initiée dans les années 2010 voit les maires aujourd’hui confrontés aux retournements de la conjoncture, mais aussi à l’évolution des marchés, des pratiques, des stratégies d’entreprises. « Face à ces défis, les dynamiques de réseaux ville-ville, ville-entreprises, entreprises-entreprises, université-ville, université-entreprise, ville-acteurs associatifs, etc., sont ici fécondes, souligne François Loscheider, secrétaire général de la Vallée scientifique de la Bièvre. Elles accompagnent les projets urbains ; elles dessinent aussi le monde de demain, innovant et plus responsable… Le territoire de projets se positionne en creuset de partenariats… un modèle pour une dynamique métropolitaine ? », interroge-t-il.
« Les questions de la transition énergétique et écologique doivent être au cœur des nouvelles réflexions sur l’aménagement », souligne Marie-Hélène Amiable, maire PCF de Bagneux, qui figure parmi les piliers de la conférence des projets de la VSB. Bagneux connaît une accélération importante de son développement liée à l’arrivée de la ligne 4 du métro. Elle compte deux principaux secteurs de projet, la ZAC éco-quartier Victor Hugo d’une part (20 ha), dont 130 000 m2 dédiés à l’activité, et celle des Mathurins d’autre part (16 ha).
Si la ZAC Victor Hugo est en voie d’achèvement, Marie-Hélène Amiable indique que le développement de la ZAC des Mathurins est plus progressif. La ville travaille avec Ile-de-France mobilités (IDFM) pour obtenir un réseau de bus reliant directement ses habitants aux stations de métro. « L’enjeu est d’anticiper sur les nouvelles mobilités, en accompagnement des projets d’aménagement », souligne la maire.
Paris Saclay cancer cluster parmi les leaders mondiaux de l’oncologie
« Aujourd’hui, nous rediscutons avec les propriétaires du site des Mathurins », indique également Marie-Hélène Amiable. La ville a signé avec eux un projet urbain partenarial (PUP), répartissant entre la commune et ces investisseurs privés le financement d’une série d’équipements publics. « La question, c’est l’équilibre financier de l’opération, sans rogner sur la qualité des équipements et espaces publics ». La crise en cours pourrait favoriser des réflexions salutaires, estime Marie-Hélène Amiable, partisane d’une loi qui régule et encadre le prix du foncier.
L’élue réfléchit actuellement aux voies et moyens d’accueillir des activités industrielles innovantes, évitant une relégation de l’industrie et de l’artisanat de plus en plus loin de la petite couronne francilienne. Bagneux souhaiterait également être en capacité d’accueillir davantage de structures de l’économie sociale et solidaire (ESS), elles aussi souvent freinées dans leur développement par la cherté de l’immobilier. « La conférence des projets de la Vallée scientifique de la Bièvre (VSB) peut également servir de cadre à ces réflexions », souligne la maire.
A Villejuif, Campus Grand Parc, un des projets-phares du territoire, a connu une accélération foudroyante au cours des trois dernières années. Les premiers mètres carrés de laboratoires de recherche ont été livrés, ainsi que d’hôtellerie pour accueillir la patientèle de l’Institut Gustave Roussy (IGR) auxquels s’ajouteront des logements, afin de faire de ce site un vrai quartier de ville. « Il y a en l’occurrence un avant et un après Covid 19 », résume Pierre Garzon. « La donne a changé quand le gouvernement a réalisé que nous étions, en matière de santé, un colosse au pied d’argile », poursuit le maire (PCF) de la ville.
Les projets du Paris Saclay cancer cluster (PSCC) s’imposent autour de l’IGR compte tenu de la force de l’écosystème existant, avec un aménageur, Sadev 94, « pleinement engagé sur le sujet, des liens entre le politique, le monde de la recherche, de l’université, une articulation extrêmement fluide qui permet d’emporter la décision et d’être retenu par l’Etat », souligne Pierre Garzon. Avec la conviction qu’il se joue ici un bout de la réponse au fléau mondial qu’est le cancer.
L’idée de créer ce cluster est née de la volonté de Sanofi et de l’Institut Gustave Roussy (IGR) de capitaliser sur les atouts locaux, notamment un foncier disponible et des centres de recherche réputés tels que l’IGR, le CEA, Polytechnique et l’université Paris-Saclay, rappelle Christian Deleuze, directeur général délégué à l’innovation de Sanofi France.
Le Paris Saclay cancer cluster (PSCC) incarne une révolution dans la manière de faire la recherche, en mettant l’accent sur une collaboration étroite entre le public et le privé. « Il s’agit d’un cluster où chercheurs, biologistes, ingénieurs et médecins se croisent au quotidien pour répondre aux questions les plus complexes de l’oncologie », précise Christian Deleuze.
En effet, le PSCC repose sur un modèle innovant : rapprocher les laboratoires des patients pour une recherche clinique plus rapide et plus ciblée. « C’est ce qu’on appelle du “bench to bed”, passer du laboratoire au lit du patient », souligne-t-il. Ce rapprochement géographique et scientifique permet d’accélérer la mise au point de traitements, en particulier dans des domaines comme l’immunothérapie et la biologie des tumeurs.
Le maire de Villejuif évoque lui aussi les nouveaux défis de l’aménagement. « Quand on décide de ne pas rendre constructible des emprises, afin de préserver des superficies de pleine terre, on se prive de droits à construire et donc des recettes correspondantes », constate Pierre Garzon qui estime lui aussi que « la cherté excessive du foncier en Ile-de-France constitue une mécanique assez infernale ».
Comme ses collègues, il salue l’utilité du réseau que constitue la conférence des projets de la VSB : « J’ai eu l’immense chance, je le répète à l’envi, de m’inscrire dans une construction politique qui perdure. En devenant maire de Villejuif, la question a moins été de savoir comment je devais prendre mon baluchon pour aller à la rencontre de mes voisins afin de parler des sujets de santé que de m’inscrire dans un héritage déjà présent. Celui de la Vallée scientifique de la Bièvre, qui lie des maires, des entreprises, des chercheurs, des professeurs, des urbanistes, des universitaires. Cette dynamique permet, par des rencontres régulières, d’identifier, de repérer les besoins émergents ».
Cachan volontariste
« Nous, on fait la ville. On ne fait pas de l’argent, résume Hélène de Comarmond. En tant que maire, nous devons résister à une sorte de pression immobilière qui voudrait que l’on construise partout où c’est possible », souligne la maire de Cachan. « Nous avons toujours eu une politique foncière très dynamique et très ambitieuse, consistant à préempter les emprises stratégiques », poursuit l’élue.
En matière d’aménagement, les maires font face à des injonctions souvent contradictoires. Le projet de Campus Cachan initié par Jean-Yves Le Bouillonnec, ancien maire, à l’annonce du départ de l’École normale supérieure pour le plateau de Saclay, en fournit un exemple. « Notre volonté était de conserver un campus avec de l’enseignement supérieur et de la recherche », indique Hélène de Comarmond. Ce qui n’était pas forcément les intentions au départ de l’État qui était propriétaire du foncier et qui avait plutôt dans l’idée de faire du logement. Sur ce campus de 11 ha, avec 5 ha mis en chantier, Cachan souhaite également bâtir un quartier ouvert, alors que l’ENS constituait une enclave dans la ville. Avec l’objectif d’en faire un quartier démonstrateur de la ville durable, label obtenu dans le cadre de France 2030. Le programme se distingue par ses circulations douces, l’importance accordée à la désimperméabilisation des sols, la protection des espaces boisés, avec la création de 4 ha de parc. « Un espace paysager pensé pour les habitants, mais aussi pour restituer la biodiversité, la nature dans la ville », résume Hélène de Comarmond.
Montrouge et la densité heureuse
A Montrouge, l’une des villes les plus denses de France, le maire (UDI) Etienne Lengereau défend une certaine idée de la densité. « La densité, si elle est équilibrée, permet d’avoir une certaine qualité de vie », résume-t-il. Les projets en cours à Montrouge visent à atteindre cet équilibre. Le campus de la faculté dentaire, par exemple, va se transformer pour accueillir de nouveaux logements, des espaces verts, des commerces et des équipements. Ce quartier, qui s’ouvrira au public, intégrera des espaces publics accessibles à tous les Montrougiens, renforçant ainsi la dimension urbaine de la ville.
Le maire insiste sur l’importance d’un urbanisme durable qui conjugue densification et réduction de l’impact écologique. La Ville, en réduisant la place de la voiture, choisit une mobilité douce et investit dans la végétalisation de l’espace public. « Comment avoir plus d’espace vert tout en construisant ?, s’interroge-t-il. Sa réponse : « nous achetons des bâtiments et les transformons en espaces verts », une démarche coûteuse, mais cruciale pour améliorer la qualité de vie des habitants. La VSB, pour le maire, représente un modèle de coopération transversale qui dépasse les frontières administratives. Cette coopération doit permettre à la région de rester compétitive face aux grands acteurs internationaux comme les États-Unis et la Chine. « La Vallée scientifique de la Bièvre est un atout fondamental », estime Etienne Lengereau, qui voit dans ce projet une occasion unique de dynamiser l’innovation et de transformer la recherche publique en création de valeur.
Les 8e assises de la Vallée Scientifique de la Bièvre comprendront un point d’étape sur les grands projets urbains qui animent la VSB, de Villejuif à Bagneux, de Montrouge à Cachan, des contributions sur les défis nouveaux notamment en matière de mobilités et de logements et un débat sur les vocations d’un territoire de projets dans le contexte métropolitain. Un protocole de partenariat avec l’Université Paris-Saclay sera engagé à cette occasion.
Vendredi 22 novembre, de 8h30 à 12h30 Espace Maurice Tubiana – Gustave Roussy – 20 rue du Docteur Pinel à Villejuif
La Vallée scientifique de la Bièvre, un territoire de projet
Dans le périmètre de la métropole grand-parisienne, la « conférence de projets de la Vallée scientifique de la Bièvre » veut être, depuis bientôt 30 ans, un espace de construction collective.
Entre Paris et le plateau de Saclay, ce « territoire de projet », espace de coopération souple, sans formalisme particulier, se situe au sud de l’agglomération parisienne. Il regroupe 11 communes à cheval sur le Val-de-Marne et les Hauts-de-Seine (pour partie sur le territoire Grand Orly Seine Bièvre et pour partie sur le territoire Vallée Sud Grand Paris).
« La démarche est partie de coopérations entre l’ENS de Cachan, l’Université Paris Sud 11 et les collectivités locales, sous l’égide du Conseil de développement du Val-de-Marne », rappelle sa présidente Hélène de Comarmond. « Si la création de la métropole du Grand Paris en 2016 a acté la réalité du fait métropolitain, la VSB a toujours été un projet non-formalisé, non-institutionnel, et finalement c’est peut-être sa force », poursuit la maire (PS) de Cachan.
Un modèle de fertilisation croisée
« Au cœur de cet écosystème, la VSB est un projet unique, fondé sur une collaboration entre les élus locaux, la société civile, les acteurs économiques et les universitaires, avec pour objectif la transformation urbaine, l’innovation scientifique, et le développement durable », souligne Dominique Giry, fondateur de la VSB. Ce chef d’entreprise, président du groupe Muvo, est également président du conseil de développement du Val-de-Marne (Codev 94).
« La VSB se distingue par son ambition de faire avancer un territoire déjà très urbanisé, avec une démarche positive, une forte ambition collective et une perspective de développement durable », souligne Dominique Giry. Parmi ces projets emblématiques figurent des campus universitaires et des parcs scientifiques : le Campus Cachan, les Mathurins à Bagneux ou encore le site du Panorama à Fontenay-aux-Roses, « soit une trentaine d’opérations d’aménagement qui s’étalent sur tout le territoire, avec la volonté d’introduire une mixité urbaine et fonctionnelle (logement, bureaux, commerces, espaces publics) », indique Dominique Giry.
« Ces transformations ont pour objectif de renforcer le rôle de la VSB en tant que pôle scientifique de premier plan, notamment dans le domaine de la lutte contre le cancer, avec des infrastructures de recherche à la pointe de la technologie. La VSB devient un pôle de référence en France, voire en Europe, pour la recherche en santé, affirme le président du Codev 94. Nous voulons faire de ce territoire un modèle de fertilisation croisée entre sciences, entreprises et recherche ». L’une des priorités de ce projet est aussi d’assurer que la transformation du territoire bénéficie directement aux habitants. « Ce n’est pas une ville nouvelle, c’est une ville en évolution, qui prend en compte les besoins de ses habitants », souligne également Dominique Giry.
DÉVELOPPEMENT LOCAL, PROJET DU GRAND PARIS, ACCOMPAGNEMENT DES TRANSITIONS : 3 PÉRIODES, 3 DÉFIS POUR LA VSB
De 1996 à 2006 : Insuffler une dynamique de développement local
Initiée en 1996, par l’ENS de Cachan et le Codev du Val-de-Marne, avec les maires, la
Vallée scientifique de la Bièvre se constitue pour nouer des liens, porter des projets à
l’échelle d’une géographie physique, universitaire et sociale. Il s’agit notamment
de réagir à la tendance observée dans les années 1980 et 1990 de pertes d’activités
(fermeture de sites industriels, délocalisation d’établissements…) et d’habitants.
Jalons – 1999 : création du conseil du développement de la Vallée scientifique et technologique de la Bièvre.
2000 : Après la création de la Communauté d’agglomération de Val de Bièvre (CAVB) puis des Communautés d’agglomération des Hauts-de-Bièvre, Sud-de-Seine et de la Communauté de communes Châtillon-Montrouge, la VSB demeure
un cadre de coopération inter-territorial.
2006 : élaboration de la « charte de développement » de la Vallée scientifique de la Bièvre.
De 2006 à 2015 : Construire sa place sur la carte des projets du Grand Paris
Entre 2006 et 2015, la conférence des projets de la VSB entend placer son action en rebond au projet Saclay (à l’opération campus, qui a conduit à la relocalisation de plusieurs établissements de la VSB vers le plateau de Saclay) et à la volonté de l’Etat et de la Région de concentrer les stratégies de développement du Grand Paris sur quelques sites fortement polarisés.
La conférence multiplie les rencontres avec l’Etat, la Région, la RATP… Ses membres se mobilisent pour l’inscription du territoire sur le réseau du Grand Paris express (neuf gares).
La VSB accompagne le développement de l’Institut Gustave Roussy et l’émergence
d’une génération de grands projets urbains.
Jalons – 2007, 2009, 2011 : initiatives des rencontres régulières Paris-VSB-Essonne (les « conférences du cône sud francilien de l’innovation »).
2010 : élaboration du « schéma de référence pour l’aménagement et le développement » de la Vallée scientifique de la Bièvre.
2013 : signature du premier Contrat de développement territorial (CDT) « campus sciences et santé ».
2016 : signature du Contrat d’intérêt national (CIN) « santé ».
De 2015 à aujourd’hui : Accompagner les transitions et les transitions
« Dans un contexte marqué par les transformations des projets initiés dans les
années 2010, en lien avec le Grand Paris express, l’objectif est de préserver une
culture et une capacité commune à partager les évolutions du territoire, à débattre, à
prendre des initiatives… », indique Dominique Giry, cofondateur de la VSB et président du Conseil de développement du Val-de-Marne.
« La crise Covid en 2020-2021, les crises économiques, sociales, immobilières des
dernières années, mais aussi la disparition des outils métropolitains de débats qui
existaient dans les années 2010, ont renforcé ce besoin de créer du commun, de
pouvoir se projeter… », ajoute François Loscheider, secrétaire général de la conférence territoriale de la VSB.
Jalons – 2015 : « conférence des projets »
2016 : Après la création des EPT en 2016, l’association de la conférence territoriale de la Vallée scientifique de la Bièvre est renommée « Conférence des projets de la Vallée scientifique de la Bièvre ».
2017 : assises « La VSB, un campus urbain ».
2021 : actualisation du schéma de référence ; ateliers-projets…
2021, 2022, 2023 : Conférence des acteurs du campus santé Paris-Saclay dans la VSB.