Sylvine Thomassin – Entre douceur et colère

Conseillère communautaire d’Est Ensemble, territoire du Grand Paris, ex-maire de Bondy, elle a œuvré pour la rénovation urbaine de sa ville tout en militant pour l’éducation populaire.

« Nos villes fracturées ont besoin des yeux et des mains de femmes, qui peuvent y apporter de la douceur », soutient cette sexagénaire volubile. Et de s’insurger contre la métropole du Grand Paris. « Les disparités économiques entre l’ouest et l’est se maintiennent. Si la MGP permettait de revenir sur ces inégalités, elle aurait eu du sens, mais elle n’en prend pas le chemin. Les villes riches de l’ouest n’ont aucune envie de partager. » Sylvine Thomassin ne croit pas à une métropole au rayonnement mondial, au sein de laquelle persisteraient des poches de pauvreté. Elle est également en désaccord avec le périmètre qu’elle aurait vu élargi à la région Ile-de-France, voire au-delà jusqu’au Havre, car « il n’y a pas de mégapole sans accès à la mer ». Désabusée, donc, de la tournure que prend la MGP, y compris dans son premier plan métropolitain de l’habitat et de l’hébergement (PMHH), adopté fin juin, qui maintient, selon elle, les déséquilibres entre logement social à l’est, et bureaux à l’ouest. « Nous avons failli à réconcilier les apeurés de l’ouest avec les humiliés de l’est, selon la formule de Claude Dilain », regrette-t-elle.

Sylvine Thomassin

Sylvine Thomassin. © Valerio Vicenzo

Une fois la colère passée, cette mère de quatre enfants avoue que son métier de sage-femme lui manque. « On dit que le maire accouche de projets pour ses habitants, mais lors de l’accouchement d’une femme, vous vivez des moments uniques, imprégnés de magie. » Issue d’une famille de « cathos de gauche », elle reste fidèle aux idéaux de ses parents. Elle milite tôt dans la vie associative, à Drancy et à Bondy. « J’ai toujours été engagée. Je ne crois pas qu’on se réveille un jour et qu’on devienne élu. »

En 1989, elle adhère au Parti socialiste, attirée surtout par le projet de Michel Rocard. Elle combat pour la parité hommes femmes. « Je suis féministe et je subis des critiques là-dessus. Mais je crois que le féminisme profite aussi aux hommes, leur permettant de ne pas se soumettre aux exigences de virilité et de dureté que la société leur impose. » Elue conseillère régionale en 1998 auprès de Jean-Paul Huchon, elle œuvre à la rénovation d’un grand nombre de lycées et découvre que l’action politique « peut faire bouger les choses ».

Partenariat avec Sciences Po

A partir de 2001, elle se consacre à Bondy, adjointe au maire en charge de l’éducation, puis de la rénovation urbaine. Le 14-juillet, Terre-Saint-Blaise, autant de quartiers qui retrouvent un nouveau visage, plus humain, plus accueillant. Puis la colère de nouveau, à propos du retard pris sur l’arrivée de la ligne 15 du Grand Paris express, qui devrait s’arrêter à Bondy seulement en 2030 au lieu de 2025. « On nous demande de construire des logements mais on ne fait rien pour la mobilité. » Une consolation pour celle qui ne baisse jamais les bras : le TZen devrait, lui, arriver en avance, en 2022.

Ces grands projets urbanistiques ne font pas oublier à l’édile son ADN : l’humain, l’éducation populaire. Et d’évoquer les partenariats liés avec Sciences Po, KPMG et autres écoles de commerce pour aider les jeunes de sa ville à ne pas s’autocensurer et à croire qu’ils sont capables de faire de longues études. « J’ai des convictions chevillées au corps », affirme-t-elle. Et d’avouer qu’en contrepartie, elle peut paraître têtue, cassante. « Je tolère tout sauf les mensonges, conclut-elle l’absence d’honnêteté intellectuelle ».

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