Jean Nouvel, Dominique Perrault ou Christian et Elizabeth de Portzamparc, entre autres starchitectes, étaient aux côtés de Valérie Pécresse et de François de Mazières pour l’inauguration, à Versailles, de la première Biennale d’architecture et de paysage, vendredi 3 mai 2019. Mais la vedette de l’événement fut incontestablement Nicolas Sarkozy.
« Comme vous le savez, je ne fais plus de politique », a déclaré l’ancien président de la République, décrochant le prix de l’antiphrase en ouvrant un discours aux accents de stand-up. Car de politique, il en fut question lors des différentes allocutions d’inauguration de la première Biennale d’architecture et de paysage (Bap!) organisée à Versailles par la région Ile-de-France. Avec une récompense, à leur issue : une déambulation dans la galerie des sculptures et des moulages, l’une des plus belles réserves de sculptures du château de Versailles et du musée du Louvre, espace minéral d’une beauté spectaculaire conçu par le premier architecte de Louis XIV, ordinairement fermée au public.
Pour ce qui est de la politique, Valérie Pécresse a conclu son discours par un appel solennel au président de la République : « Monsieur le président, pendant plusieurs semaines, nous allons ici, à la biennale, ensemble, inventer et faire vivre le Grand Paris de demain, a déclaré la présidente de Région. Ces projets, nous pouvons les mener ensemble pour faire de l’Ile-de-France une métropole phare qui inspirera toutes les autres, un modèle unique pour le monde entier, a-t-elle poursuivi. Monsieur le président, il vous appartient aujourd’hui de reprendre le flambeau, de relever l’étendard du Grand Paris […]. Il devra être créatif, résilient et fertile à la fois pour construire une région-métropole attractive, écologique et solidaire, une métropole à visage humain. »
Grands prix régionaux de l’architecture
Avant cette conclusion en forme d’appel, la présidente du conseil régional avait égrainé les grands axes de sa politique en faveur d’une région qui « réconcilie l’homme, la nature et la ville ». L’ancienne ministre de la Recherche et de l’Enseignement supérieur a annoncé la création de grands prix régionaux de l’architecture, « pour des réalisations dans le domaine du logement, des équipements publics, ou de l’écoconstruction ».
La Région entend également nouer une relation privilégiée avec les écoles d’architecture et de paysage, décernant à l’avenir trois prix de diplôme pour chaque école, allant aux meilleurs projets de fin d’étude portant sur des problématiques régionales. Patrick Bouchain, Grand Prix d’urbanisme 2019, présent à Versailles vendredi 3 mai, se voit confier une mission « pour donner un cadre à cette ambition », a également annoncé Valérie Pécresse.
Après 17 ans de délaissement, j’ai l’ambition de porter en Ile-de-France un plan inédit pour le patrimoine, qui, au-delà de son volet financier, développera la formation et la visibilité des métiers du patrimoine, ainsi que la valorisation touristique des lieux, a fait valoir la présidente de l’Ile-de-France.
Citant le discours prononcé il y a dix ans, le 29 avril 2009, par Nicolas Sarkozy à la Cité de l’architecture, que présidait alors François de Mazières, commissaire général de la Bap !, Valérie Pécresse a déclaré que l’exigence du Grand Paris était « de penser le développement de Paris dans une perspective beaucoup plus large que les limites du périphérique, que les limites de la petite couronne, beaucoup plus large que celles de l’Ile-de-France ». « Malheureusement, vos successeurs n’ont pas été au rendez-vous, a poursuivi l’élue. Eh bien moi, le souffle de votre discours, l’évidence de votre vision, je les ai puissamment ressentis et, à la place qui est la mienne, je veux les incarner », a-t-elle déclaré.
Disparition de l’Occident
« Je ne veux pas cacher mon inquiétude sur une forme de disparition de l’Occident dans l’état du monde, a estimé Nicolas Sarkozy en ouverture de son allocution. Le Grand Paris est à ce niveau-là. Pendant des siècles, l’axe du monde était occidental, il est aujourd’hui oriental, a poursuivi l’ancien président de la République. Si j’ai eu l’idée du Grand Paris, c’est parce que le monde s’effondrait », a-t-il ajouté, célébrant la prise d’initiatives comme le meilleure des antidotes à la crise.
L’idée selon laquelle la priorité devait être donnée au projet, devant les contraintes budgétaires, a émaillé le discours de l’ancien président, ce dernier alternant entre l’éloge du génie français, notamment celui de ses grands architectes – nombreux à être présents ce vendredi matin dans l’amphithéâtre de l’école d’architecture de Versailles -, et la critique d’un pays « dans lequel les forces de blocage l’emportent généralement sur celles de la création ».
Prenant à témoin Frédéric Mitterrand, ancien ministre de la Culture, présent également, Nicolas Sarkozy a dit son attachement à la culture : « Je n’ai jamais accepté que l’on touchât à son budget, au prétexte de la crise, parce que pour moi, en temps de crise, le budget de la culture doit augmenter », a-t-il fait valoir. « Non seulement la crise n’empêchait pas le Grand Paris, mais bien au contraire, elle lui donnait toute sa légitimité », a également déclaré l’ancien maire de Neuilly-sur-Seine.
« Je ne peux renoncer à l’ambition française »
« Je ne fais plus de politique, mais je ne peux pas accepter de renoncer à l’ambition française, or le Grand Paris est une formidable ambition française », a-t-il encore fait valoir. « Si quelqu’un avait l’idée de construire la tour Eiffel, qu’est-ce que les associations viendraient dire, s’est-il interrogé, et le château de Versailles, est-il conforme au PLU ? », a-t-il poursuivi, dans l’hilarité générale. « Je suis pour les tours qui sont belles et contre celles qui sont moches, a-t-il poursuivi dans le même esprit, comme si le mitage pavillonnaire était l’ambition que l’on devait porter. »
Enfin, Nicolas Sarkozy a réaffirmé sa conviction du caractère insoluble de l’organisation administrative du Grand Paris, et de la nécessité de donner la priorité à l’accélération de ses projets.
6 expositions sont organisées dans le cadre de la biennale, du 4 mai au 13 juillet.
– Augures, laboratoire des nouvelles pratiques architecturales – Petite écurie – Ecole nationale supérieure d’architecture – Commissariat : Djamel Klouche
– Le goût du paysage – Potager du roi – Ecole nationale supérieure de paysage – Commissariat : Alexandre Chemetoff
– Echappées belles – Exposition photo – Grilles de l’hôtel de ville – Mur des petites écuries – Commissariat : Nicolas Gilsoul
– Horizon 2030 – les projets et les ambitions du Grand Paris express – Ancienne poste – Commissariat : Groupe 2030 (Ruedi Baur, designer – Frédéric Chartier et Pascale Dalix, architectes – José-Manuel Gonçalvès, directeur artistique et culturel du Grand Paris express – Jean-Christophe Nani, paysagiste – Arnaud Passalacqua, historien – Pierre-Alain Trévelo, architecte et urbaniste – Corinne Vezzoni, architecte)
– Versailles, ville nature, permanence et création – Espace Richaud – Commissariat : Christine Desmoulins
– Versailles. Architectures rêvées 1660-1815 – Château de Versailles – Commissariat : Elisabeth Maisonnier