Exploitant majeur de parkings publics et résidentiels en Ile-de-France, la Saemes multiplie les innovations pour expérimenter de nouveaux usages et intensifier l’occupation de ses emprises. Malgré une réglementation obsolescente, qui bride ses possibilités.
Durée des concessions trop courte qui plafonne l’amortissement des investissements et réduit ses capacités à expérimenter de nouveaux modèles, réglementations souvent surabondantes, limitant également les innovations d’usage… Malgré les contraintes, que la Saemes tente de faire évoluer par le truchement de la Fédération nationale des métiers du stationnement (FNMS), l’opérateur de parkings, dont la Ville et Effia sont les actionnaires principaux (*), teste des nouveaux modèles pour s’adapter et relever les défis du temps.

Créée en 1979, Saemes accueille plus de 2,3 millions de clients chaque année, grâce à ses 65 parkings et ses quelque 25 000 places exploitées avec ses délégants publics et privés. © Jgp
Un appel d’offres récemment lancé avec Paris & Co, l’agence d’innovation de Paris et de la Métropole, a permis de sourcer plusieurs start-up. Deux partenariats permettent ainsi d’offrir des solutions de mobilité alternatives et décarbonées aux Parisiens. L’un avec Turtle, au sein du parking des Pyramides (Paris Centre), permet le déploiement de vélos-taxis, grâce à des tricycles à assistance électrique. 30 sont en service, 60 doivent être livrés cette année et 100 en 2024, pour atteindre à terme 400 vélos-taxis et 1 200 chauffeurs salariés.
« Nous sommes très attentifs au volet social de ces partenariats. Nous refusons par exemple que les opérateurs avec lesquels nous travaillons emploient leurs personnels sous le statut de l’auto-entrepreneuriat », souligne Ghislaine Geffroy, directrice générale de la Saemes. Troopy, qui loue des scooters électriques en free-floating, utilise par ailleurs plusieurs parcs de stationnement de la SEM comme base arrière pour ses véhicules.
Logistique du dernier kilomètre
Concernant la logistique du dernier kilomètre, l’opérateur de stationnement fête cette année les dix ans de son partenariat avec FedEx, qui gère 307 m2 d’espaces de logistique urbaine (ELU) dans le parking Pyramides. 307 m2, soit plus que les 200 m2 qui constituent la taille maximale des surfaces que les gestionnaires de parking peuvent dédier à la logistique, compte tenu de la réglementation en vigueur. Seuls les espaces créés avant 2006 et préexistant à ces règles peuvent y échapper. A Pyramides, cinq véhicules de FedEx assurent les transits quotidiens de 7 000 colis par mois. Une des limites au développement de cette activité est liée à la hauteur sous plafond des parkings, qui en interdit l’accès aux camions acheminant les articles en vue de leur dispersion en véhicules légers et décarbonés.
Cygogne, start-up spécialisée dans la logistique du dernier kilomètre grâce à des vélos-cargos zéro émission et qui permet le recrutement et l’accompagnement de personnes éloignées de l’emploi, occupe pour sa part 75 m2 au sein du parking Saint-Augustin, dans le 8e arrondissement. La Saemes a également conclu un partenariat avec la société Vélab (location de vélos, triporteurs et vélo-cargos électriques) et avec Pickup, filiale du groupe La Poste, pour l’installation de consignes.
Electrification du parc
La Saemes s’emploie par ailleurs à électrifier son parc afin d’offrir à ses clients des bornes de recharges en nombre suffisant. Un investissement de 3 millions d’euros a été consacré à cette fin depuis 2020. Il porte sur l’installation de réseaux de fourniture en électricité amont et aval, de poste de transformation ainsi que sur l’achat, la pose, la maintenance, l’exploitation et la supervision des bornes, dans le cadre d’un partenariat noué avec TotalEnergies. La Saemes dispose à ce jour de 1 300 points de charge répartis sur 15 parcs, ayant permis en 2022 près de 20 000 recharges, avec des puissances allant de 7 à 22 kVA.
« Le modèle de la concession des services publics doit évoluer », estime Ghislaine Geffroy, directrice générale de la Saemes et administratrice de la Fédération nationale des métiers du stationnement (FNMS). Ce modèle prévoit que les concessionnaires assument tout ou partie des investissements nécessaires au déploiement d’un service, perçoivent les recettes générées, et versent en contrepartie une redevance au maître d’ouvrage. Mais l’objet de la concession ne peut être modifié substantiellement, bridant considérablement les capacités d’innovations. « Nous souhaiterions créer des champignonnières, des lieux recevant du public, mais nous ne pouvons pas », constate le directrice générale.
Par ailleurs, la durée de la concession, limitée à dix ans en l’espèce, proscrit tous modèles économiques basés sur des durées, d’amortissement notamment, supérieures.
« Un rôle central dans le développement de la ville du ¼ d’heure décarbonée »
« Ces investissements propres ou partagés, pour démultiplier les usages et l’utilité du foncier de nos parkings, indispensables au déploiement de la mobilité décarbonée et nécessaires à l’accueil de nouvelles solutions pour les Parisiens, tant en termes de déplacements que de livraisons, démontrent le rôle central des parkings dans le développement de la ville du ¼ d’heure décarbonée ».
Créée en 1979, Saemes accueille plus de 2,3 millions de clients chaque année, grâce à ses 65 parkings et ses quelque 25 000 places exploitées avec ses délégants publics et privés. La solidité de ses finances lui a permis de faire face aux conséquences de la pandémie, et aux mutations consécutives. Si le nombre des véhicules accueillis s’est réduit faiblement au cours de la dernière décennie, de 1 % par an environ, le Covid a valu à l’opérateur des pertes d’ampleur, liées notamment au maintien de l’ouverture de l’ensemble de ses parcs durant les périodes de confinement. L’essor du télétravail, qui impacte structurellement son modèle économique, l’a conduit à développer de nouvelles offres, destinées au stationnement des deux roues, à l’entretien des vélos, etc. Aujourd’hui, la fréquentation des parkings de la Saemes n’a pas retrouvé, en moyenne, le niveau de 2019.
* avec la Caisse des dépôts, la RIVP, CDC habitat, Paris habitat et la CCI Paris Ile-de-France.