G. Lodetti (Linkcity) : « Les APUI requièrent d’intervenir sur toute la chaine de valeur de l’immobilier »

Gérard Lodetti, directeur général délégué de Linkcity France, en charge de la direction des projets urbains, décrit l’apport que représentent les appels à projets urbains innovants pour l’opérateur.

Quel regard porte Linkcity sur les appels à projets urbains innovants (APUI) ?

C’est avec Réinventer Paris I que la méthode a été lancée et que nous réalisons, dans le cadre du projet Ilot Fertile (19e arrondissement), le premier chantier. Les APUI ont eu un impact novateur indéniable, qui a poussé les acteurs à se questionner, repenser leur écosystème et faire preuve de créativité. Ils ont permis un dialogue constructif entre le public et le privé et de montrer que les acteurs privés, eux aussi, peuvent contribuer par leurs actions à l’intérêt général. Linkcity en a fait très tôt un positionnement stratégique. Les projets urbains agissent comme un révélateur de notre identité et de notre capacité à créer de la valeur sur toute la chaîne de l’immobilier, de l’aménagement à la gestion des services.

Gérard Lodetti, directeur général délégué de Linkcity France, en charge de la direction des projets urbains. © Jgp

Au-delà du Grand Paris, Linkcity est présent à travers toute la France sur ces appels à projets urbains innovants (APUI), pas seulement dans les grandes métropoles. Nous avons créé la direction projets urbains et nous avons ainsi rassemblé toutes nos compétences, savoir-faire et expériences pour accompagner, au mieux et au plus près, les territoires dans ces développements innovants.

Quels profils regroupe cette direction ?

Avant tout des collaborateurs, à l’écoute, créatifs, avec le sens du partenariat et responsables. Quatre qualités indispensables, selon moi, pour réussir le développement de ces grands projets. Elle rassemble des talents d’aménageur, qui ont souvent une expérience au sein de sociétés d’aménagement publiques, ainsi que des collaborateurs qui disposent de compétences en urbanisme, développement immobilier, RSE ou encore en marketing stratégique. Elle bénéficie également de l’ensemble des savoir-faire du groupe Bouygues construction, dont Colas et Bouygues énergies et services.

Cette direction nous a permis de capitaliser sur les opérations que nous réalisons aux quatre coins de la France. Nous privilégions un maillage territorial important avec des équipes présentes localement. Nous menons actuellement une quinzaine de projets de la sorte en France. Cinq projets supplémentaires sont à l’étude. Cela représente 2,7 milliards d’euros d’investissements cumulés à venir.

Quels impacts ont, selon vous, ces projets sur la fabrique de la ville ?

Ils sont importants, et très pertinents. Désormais, la fabrique de la ville s’effectue à plusieurs. C’est un élément fondamental. Lorsque nous intervenons sur des projets de cette taille, et de cette échelle temporelle, nous nous positionnons sur la totalité de la chaîne de valeur de l’immobilier. Nous ne pouvons et ne souhaitons pas le faire seul.

Ces appels à projets ont transformé les façons de faire. La culture et le sens du partenariat font désormais toute la différence. La capacité à travailler en équipe est déterminante. De nouveaux acteurs (start-up, exploitants, etc.) et de nouveaux métiers (concertation, urbanisme transitoire, gestion des services, etc.) contribuent à la réussite de ces projets. Linkcity est très avancé sur diverses formes de coopération avec ces acteurs qui nous accompagnent à tous les stades d’avancement.

Qui sont ces acteurs ?

Nous œuvrons avec des opérateurs qui nous accompagnent dans le portage du foncier. D’autres partenaires travaillent avec nous sur des programmations innovantes. Ces projets, pour Linkcity, sont l’occasion d’offrir à nos partenaires, investisseurs ou exploitants, la possibilité de mettre en œuvre leurs propres innovations. Avec le groupe Auchan et sa structure Nodi, nous avons mis en place un nouveau type de halle marchande, dans le nouveau quartier de La Maillerie que nous développons conjointement sur les communes de Villeneuve d’Ascq et Croix. Nous travaillons également en lien avec La Française, pour déployer son nouveau concept de Flexipropriété, ou encore avec in’li, pour développer la location-accession intermédiaire.

Ces différentes innovations ont été développées dans le cadre d’APUI ?

Les APUI ont permis de tester ces différentes innovations, parce qu’il s’agit de sites en devenir, porteurs, de grande taille, notamment autour du Grand Paris. Cela permet d’imaginer effectivement des choses que l’on ne fait pas sur des opérations de taille plus courante. C’est notamment le cas pour deux des grands projets gagnés dans le cadre d’Inventons la métropole du Grand Paris, avec une vague de surf artificielle à Sevran et le temple du e-sport à Orly-Thiais.

La vague Grand Paris, à Sevran. © DR

Au départ, pourtant, les promoteurs voyaient plutôt ces projets d’un mauvais œil ?

Pas Linkcity ! Il est vrai que ces projets nécessitent des ressources importantes. Mais cela a été, pour nous, un vrai choix, que ce soit dans le cadre des opérations d’ »Inventons la métropole du Grand Paris », de « Réinventer Paris » ou d’autres métropoles françaises. Nous avons remporté à Marseille, en collaboration avec Bouygues immobilier, dans le cadre d’un appel à manifestations d’intérêt, un projet de 200 000 m², piloté par l’établissement public d’aménagement Euroméditerranée. Il s’agit d’un véritable partenariat public-privé, avec un opérateur d’Etat qui nous a délégué la programmation urbaine d’une grande partie de la ZAC.

Ces projets, nous les anticipons et, dans ce cadre, avons à cœur de participer à la construction de la ville. La collaboration avec le public peut ne pas être simple, mais elle est toujours très riche, compte tenu de nos complémentarités. Nous menons ainsi, actuellement, plusieurs projets en codéveloppement avec des acteurs publics.

Qu’est-ce que ces projets changent dans le partage des rôles entre public et privé ?

En premier lieu, agilité et souplesse sont les maîtres-mots ! Tout ce qui relève de l’aménagement public relève généralement de nos partenaires publics, qui en ont la charge et la responsabilité, et le font très bien. Au travers de ces APUI, par la question posée et la taille de ces opérations, les collectivités élargissent notre champ d’action habituel. Au-delà du fait de répondre aux nouveaux besoins de services à l’échelle de l’habitant, ils nous incitent à appréhender les enjeux d’aménagement à l’échelle de la ville ou d’un quartier.

C’est en cela que le partage des rôles entre le public et le privé évolue principalement. Sur ces sujets d’aménagement, les opérateurs privés se retrouvent donc très impliqués. Ces projets nous confèrent des rôles qui peuvent être très différents à chaque fois. Dans le partage des rôles avec le public, nous pouvons intervenir en position d’aménageur, en direct avec le propriétaire foncier – à l’image du projet Antonypole que nous réalisons dans les Hauts-de-Seine – ou en position d’ensemblier urbain aux côtés d’un aménageur public, ce qui est le cas du projet des Ardoines à Vitry-sur-Seine.

Cela change également la nature de votre intervention dans le temps ?

Nous réfléchissons aussi, sur ces grand projets, à demeurer présent lors de l’exploitation des quartiers concernés. Cette ambition nous pousse également à réfléchir à la façon dont seront conçus les usages, et notamment les services. Dans le quartier de La Maillerie par exemple, nous travaillons à la création d’une société coopérative, qui regroupe les propriétaires des immeubles : bailleurs et particuliers. Elle bénéficiera de 300 m² de locaux en rez-de-chaussée, mis à disposition par les promoteurs, afin d’en faire le cœur du quartier. Nous restons actionnaires de cette structure, pour suivre la vie de ses services. Il s’agit, dans ces cas-là, de nous assurer que ce que nous avons imaginé fonctionne, vit bien. L’ambition de nous inscrire durablement dans le quartier nous incite à réfléchir différemment en phase de développement.

Vous êtes également présent à l’international ?

Linkcity bénéficie de l’implantation du groupe Bouygues construction dans différents pays. Par exemple, nous nous sommes inspirés de la filiale suisse, qui a été précurseure dans la création d’écoquartiers associant public et privé. A travers des projets déjà livrés, nous pouvons mesurer l’impact de ce que nous avons mis en place. Nous sommes d’ailleurs en train de créer un observatoire des usages, afin de vérifier le bon fonctionnement de ces ensembles. Et cette façon de faire va se diffuser sur l’ensemble de nos opérations.

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