Chute de la production de résidences sociales en Ile-de-France

La baisse de production de résidences sociales généralistes atteint 55 % en 2020, alerte l’Union professionnelle du logement accompagné (Unafo). Celles-ci permettent pourtant de loger les travailleurs de première ligne, révélés comme essentiels par la crise sanitaire.

Alors que la secrétaire d’Etat chargée du Logement, Emmanuelle Wargon, a présenté, le 19 mai, une feuille de route 2021-2022 pour développer la production de résidences sociales, celle-ci est en chute libre en Ile-de-France. Ainsi, seuls 325 logements en résidences sociales généralistes ont été produits en 2020, contre 728 en 2019. Le plan de traitement des foyers de travailleurs migrants (FTM), visant à les transformer en résidences sociales, accuse également un retard, avec une baisse d’environ 10 %. La production des autres types de structures du logement accompagné, elle, se maintient ou progresse, tandis que celle des pensions de famille, qui permettent de loger des personnes en situation de grande exclusion, se stabilise (280 logements agréés). Seule celle des foyers jeunes travailleurs (FJT) progresse de 19 % pour atteindre 489 logements agréés.

Loger les publics fragiles

« Les résidences sociales généralistes permettent de loger des personnes seules, isolées, précaires, ayant un emploi, en somme celles que la crise a révélé comme les travailleurs essentiels de première ligne », observe Arnaud de Broca, délégué général de l’Unafo. En effet, 76 % des personnes ayant emménagé en résidence sociale en Ile-de-France en 2019 avaient un emploi (contre une moyenne nationale de 52 %) et 36 % étaient en CDI. Les résidences consacrées aux jeunes (FJT, résidences jeunes actifs, résidences étudiantes conventionnées) permettent aux moins de 30 ans d’accéder au logement mais répondent également à leur besoin de mobilité. Par ailleurs, 60 % des entrants dans l’ensemble de ces dispositifs avaient des revenus inférieurs au seuil de pauvreté.

La production de pensions de famille, qui permettent de loger des personnes en situation de grande exclusion, s’est stabilisé en 2020 (280 logements agréés). © Jgp

Enfin, l’ensemble des structures a permis de loger 3 650 sans-abri, objectif n°1 du plan quinquennal « Le logement d’abord » (37 % dans les résidences sociales généralistes, 42 % en FTM, 33 % en pension de famille).

Convaincre les élus locaux

L’enjeu principal est de persuader des élus locaux, souvent frileux, d’accueillir sur leur territoire une résidence sociale. « On y arrive mieux pour les résidences jeunes ou les pensions de famille, mais nous avons beaucoup de mal avec les résidences généralistes. Les édiles ont peur de voir débarquer sur leur territoire des travailleurs pauvres. Or, en Ile-de-France les besoins sont colossaux », estime Arnaud de Broca. Les annonces d’Anne Hidalgo sur la politique de logement parisienne confirment cette tendance – elles concernent surtout les logements pour les jeunes et les étudiants, et les pensions de famille.

La feuille de route d’Emmanuelle Wargon vise à « lever les appréhensions des acteurs locaux pour renforcer le développement de résidences sociales ». « Il faut savoir que chaque résidence a un projet social élaboré avec les élus. On travaille sur les besoins du territoire. Il y a quand même un accompagnement, les personnes ne sont pas seules dans leur logement », argumente le délégué général de l’Unafo.

Même lorsque la volonté politique des élus locaux est au rendez-vous, le défi de dénicher du foncier dans la région francilienne reste de taille. La feuille de route gouvernementale vise donc notamment à renforcer l’implication de l’ensemble des acteurs (préfectures, EPCI, communes) pour la mise à disposition effective de foncier. Dans les zones tendues, « il sera demandé dès 2021 aux préfets d’être force de proposition auprès des collectivités pour accompagner les gestionnaires dans leur recherche ».

Financer l’accompagnement

Les résidences sociales proposent à leurs locataires un accompagnement social, très variable en fonction du type de la structure. A titre d’exemple, deux « hôtes » accompagnent les résidents des pensions de familles, qui comptent en moyenne 20 à 25 logements. En revanche, les résidences sociales généralistes, accueillant en moyenne 150 logements, proposent un accompagnement occasionnel.

Arnaud de Broca, délégué général de l’Unafo. © DR

Ce dernier est financé par l’aide à la gestion locative sociale (AGLS), dont les montants sont fixés par la circulaire du 30 mai 2013. « Tous les ans, l’Assemblée nationale vote une enveloppe d’environ 26 millions d’euros pour l’AGLS. Et pourtant, tous les ans, seuls 18 millions parviennent aux gestionnaires, avec de grandes disparités territoriales, notamment en Ile-de-France. Nous souhaitons non seulement que l’ensemble des moyens nous parviennent, mais également que l’enveloppe soit réévaluée », réclame Arnaud de Broca. La feuille de route d’Emmanuelle Wargon annonce qu’à la rentrée, à la suite d’un état des lieux des disparités de la répartition de l’AGLS, une actualisation de la circulaire de 2013 « pourra être engagée ».

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