Comment ouvrir le campus sur la ville, à l’heure des réseaux sociaux, dans un climat de suspicion face à la science, et alors que le nomadisme transforme les usages. Tels furent les sujets des 1ers entretiens de Sceaux organisés mercredi 5 décembre 18 par la Vallée scientifique de la Bièvre.
Quels sont les ingrédients d’une vie scientifique, économique et urbaine mieux imbriquée et sur quels projets ou quelles démarches engager un partenariat fructueux entre ville et université ? Tel est le questionnement des Entretiens de Sceaux, dont la première édition s’est tenue mercredi 5 décembre 2018. Une initiative lancée par la Vallée scientifique de la Bièvre présidée par Jean-Yves Le Bouillonnec, ancien maire de Cachan et conseiller métropolitain, et orchestrée par Dominique Giry, président du Codev 94 et François Loscheider, délégué général de la VSB.
Pierre Veltz, grand prix 2017 de l’Urbanisme et ancien président directeur général de l’EPA Paris Saclay a rappelé à cette occasion les efforts entrepris sur le plateau de Saclay « pour transformer la zone universitaire en quelque chose de vivant, avec des commerces et des bistrots, qui font encore cruellement défaut ». Pour lui, le poids des universités dans l’économie locale, résidentielle, est souvent insuffisamment pris en compte alors qu’il pèse souvent autant que celui de l’hôpital.
Conservatisme excessif
Pierre Veltz a déploré le conservatisme excessif qui caractérise la France, en matière d’aménagement notamment, s’interrogeant sur la pertinence d’une séparation toujours aussi nette, sur les campus, entre les lieux d’enseignement et les logements étudiants, alors que le travail et la vie se mêlent désormais, à l’heure du nomadisme électronique. « Chacun a besoin de 25 m2 bien à lui, et de 1 000 m2 d’espaces partagés », a-t-il résumé.
Gilles Roussel, président de l’université Paris Est Marne-la-Vallée, a détaillé les transformations « qui percutent l’université ». L’autonomie, notamment, dont les facultés font l’apprentissage, avec un Etat dont les représentants « ne donnent ni une autonomie complète, ni les moyens correspondants ».
Le président de la Conférence des présidents d’Université a décrit comment l’Etat avait tendance à refuser aux cités universitaires les subventions accordées aux cités administratives pour la rénovation thermique des bâtiments. Il a souligné également la crise de conscience qui frappe aujourd’hui le monde universitaire quant à ses rapports au savoir, tant l’accès à la connaissance est facilité par internet. La montée en puissance des fake news, dans un climat de suspicion croissante par rapport à la science « qui ne relève pas de l’opinion », a-t-il rappelé, caractérise également l’époque. « L’université a la charge de l’élévation du niveau de formation des étudiants mais a également sa place dans la ville, auprès de tous les acteurs de territoires apprenants », a-t-il fait valoir. L’universitaire a regretté, également, que les collectivités respectent une logique de périmètre qui les conduit à ignorer un campus situé à proximité s’il ne relève pas de son ressort administratif.
Diffuser une culture scientifique
Sylvie Retailleau a détaillé la multiplicité des liens qui unissent l’université à la ville, sportifs, associatifs, culturels. « Il y a une révolution en cours, car l’université prend davantage conscience de sa responsabilité dans la diffusion d’une culture scientifique au-delà du cercle de ses étudiants », a indiqué la présidente de l’université Paris sud.
Philippe Laurent, maire de Sceaux et hôte de cette première conférence, a rappelé l’attention portée par sa ville à l’enseignement sous toutes ses formes. « Les campus doivent-ils devenir des villes ou les villes des campus ? Sceaux se place résolument dans cette seconde option », a-t-il indiqué, citant notamment l’exemple de la dissémination des logements étudiants dans la commune. Centralien, le maire de Sceaux s’est souvenu qu’il avait suivi sa scolarité sur le campus de Châtenay-Malabry sans mettre une seule fois les pieds dans le centre de cette commune, tant l’école, désormais transférée sur le plateau de Saclay, vivait recluse.