Unisson(s) : pour que les architectes diffusent une esthétique bas carbone

La démarche et le manifeste « Unisson(s) » ont été lancés vendredi 23 septembre lors du Salon de l’immobilier bas carbone (Sibca). Objectif : encourager les architectes et, au-delà, tous les acteurs de l’immobilier à ne pas subir la Réglementation environnementale 2020 (RE2020) comme une contrainte mais à saisir son entrée en vigueur comme l’occasion d’inventer une nouvelle esthétique bas carbone. Unisson(s) se veut ainsi le versant français du New Bauhaus européen concernant la construction.

« Unisson(s) est le mouvement français du nouveau Bauhaus européen », se félicitait Maud Caubet vendredi en fin d’après-midi dans les allées de la première édition du Salon de l’immobilier bas carbone (Sibca), au Grand Palais éphémère. L’architecte figure parmi les initiateurs de cette démarche qui vise une transformation des contraintes de la RE2020 en opportunité de concevoir une nouvelle architecture bas carbone et du vivant.

Laurent Morel, président d’A4MT (action for market transformation) (à dr.) et Cédric Borel, directeur général d’A4MT. © Jgp

Dominique Boré, présidente d’honneur de la Maison de l’architecture et membre de l’Académie d’architecture, assure le commissariat général d’Unisson(s), porté également par A4MT, Construction 21 et l’Institut français pour la performance du bâtiment (Ifpeb). « La RE2020 donne un ensemble de règles techniques, il revient aux architectes d’en faire la synthèse et de les traduire en une nouvelle esthétique », résume Anne Rouzée, architecte, associée d’Ateliers 2/3/4/, qui fait partie du comité scientifique d’Unisson(s).

Encourager l’émergence d’une nouvelle architecture

« Nous souhaitons réunir les acteurs de la conception, de la construction, de l’aménagement, du paysage et de l’industrie afin d’encourager l’émergence d’une nouvelle architecture, socle de l’évolution des nouveaux enjeux dans un écosystème en mutation, pour concevoir, construire et rénover les grands projets urbains et les bâtiments de demain, dans un esprit de partage des solutions », a souligné Laurent Morel, président d’A4MT (action for market transformation), la société de conseil qu’il a fondée avec Cédric Borel, déjà engagée dans le Booster du réemploi.

Un film documentaire de 26 min, conçu par Annabelle Ledoux (agence Les grandes idées) et Maud Caubet, un livre, ainsi qu’un manifeste constituent déjà le dispositif. Celui-ci se complètera d’ateliers de design thinking thématiques « lors desquels les participants seront invités à questionner leur regard sur l’architecture du bas-carbone et du vivant ».

Consultez le manifeste

3 questions à Dominique Boré, commissaire générale d’Unisson(s)

– Pourquoi cette initiative ?

Parce que chaque secteur doit « faire sa part » et parce que ceux-là ont une contribution significative aux impacts environnementaux de l’humanité, l’immobilier et la construction sont nécessairement concernés par la transition vers une économie bas carbone.

Dominique Boré. © Jgp

– Ce n’est quand même pas un retour vers le passé ?

Évidemment pas, même si avant l’ère industrielle la construction fut bas carbone : le potentiel énergétique des fossiles n’était pas encore connu. Bien sûr, c’était une autre époque, bien sûr, les paradigmes de la conception architecturale de l’époque n’intégraient pas – entre autres – le niveau de confort, les technologies, les usages du temps présent. Cependant, les techniques préindustrielles ou l’utilisation de matériaux vernaculaires nous rappellent qu’il y a une alternative à nos pratiques massifiées, carbonées et de surconsommation.

Une conviction : si les matériaux doivent être revus aujourd’hui à l’aune de leur empreinte carbone et de leur impact sur les ressources naturelles (ou issus du réemploi), il existe un ensemble de solutions qui se déterminent à une échelle supérieure. Ce niveau supérieur est une nouvelle pensée architecturale, celle du mariage de l’ensemble des contraintes et des usages, dans une nouvelle écriture préservant et sublimant toute forme de ressource de matière première ou la somme des produits et matières bas carbone. Choix des matériaux à la fois géo et biosourcés, mixité fonctionnelle, construction légère, essentialisation, notion  de « building as a material bank »… les architectes et concepteurs font déjà preuve de créativité soit par engagement ou lorsque le maître d’ouvrage a une demande authentique.

– Qu’est-ce qui vous pousse aujourd’hui à l’optimisme ?

Un chemin opérationnel se dessine déjà vers la neutralité carbone dans la gestion du parc existant et la nouvelle Réglementation environnementale RE2020 instaure depuis le 1er janvier 2022 la contrainte carbone, par le calcul, de tous les projets neufs. La profession prend enfin le virage d’une architecture du bas carbone. Et elle aborde en même temps un nouveau défi : reconnecter le bâtiment avec son environnement vivant. Pourquoi le vivant ici ? Parce qu’une fois qu’on a bâti, il y a cette construction érigée et ce qui reste de nature autour, comme la matière et l’antimatière. Là également, c’est une question d’équilibre, d’intelligence et de bon sens.

Cette nouvelle architecture composera davantage avec la biodiversité pour permettre à la nature de reprendre force et permettre la préservation du vivant. Personne n’a encore décrit le champs des solutions de l’architecture pour le bas carbone et le vivant. C’est l’ambition du mouvement Unissons(S), que l’industrie immobilière guidée par les architectes et de façon exemplaire, engage ce « grand virage » que l’ensemble des activités humaines doit embrasser.

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