Pour nombre de ses élus, il faut renforcer la Métropole et non la supprimer

En ces temps de coupes sombres sur les finances publiques et de nouvelle contribution du secteur public local à la réduction des déficits, l’idée, de nouveau agitée, d’une suppression de la Métropole provoque de vives réactions chez les élus du Grand Paris. Philippe Laurent (UDI, Sceaux), Geoffroy Boulard (LR, Paris), Sylvain Raifaud (EELV, Paris) ou Didier Gonzales (LR, Villeneuve-le-Roi), soulignent tout l’intérêt d’une construction métropolitaine qui offre aux élus locaux un espace précieux de partage et de rééquilibrage.

Un instrument de rééquilibrage socio-économique, un espace de concertation, d’échanges, vecteur d’une meilleure connaissance des réalités des uns et des autres, un soutien aux politiques communales ainsi qu’un puissant outil de prévention des inondations : alors que l’idée d’une suppression de la Métropole est furtivement réapparue dans le débat public dans le cadre de la recherche d’économies en cours, ses élus sont nombreux à rappeler tout l’intérêt de la construction métropolitaine. Ils soulignent en premier lieu qu’elle offre un espace de dialogue favorisant la connaissance, entre maires de la zone dense, des réalités de chacun. Le maire (UDI) de Sceaux, 2e vice-président de la Métropole, figure parmi les pionniers de sa construction. « La création de l’institution donne le formalisme nécessaire pour que vive cet esprit de connaissance réciproque, de recherche de cohésion », estime l’élu.

Sylvain Raifaud, Geoffroy Boulard, Philippe Laurent et Didier Gonzales. © Jgp

Le maire du 17e arrondissement de Paris, Geoffroy Boulard, tout comme celui de Villeneuve-le-Roi, Didier Gonzales (tous deux LR), rappellent que la Métropole exerce utilement des compétences stratégiques jusque-là délaissées. La Gemapi (gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations) en fournit un des meilleurs exemples. Patrick Ollier, président de la métropole du Grand Paris, qui préside également l’établissement public territorial de Bassin Seine Grands Lacs, a donné un indéniable coup d’accélérateur dans ce domaine. De six il y a trois ans, le nombre de zones d’expansion des crues qui préservent les villes des risques d’inondation est passé à plus de 150 aujourd’hui. La Métropole et Seine-Grands Lacs cofinancent par ailleurs le casier-pilote de la Bassée, un réservoir d’eau capable de stocker jusqu’à 10 millions de m³ prochainement mis en service.

Les élus de la MGP soulignent le rééquilibrage territorial opéré par la MGP, chiffres à l’appui : deux tiers de ses investissements se concentrent à l’est et au nord contre un tiers pour l’ouest. Un rééquilibrage qui mériterait d’être encore renforcé et non pas détricoté, jugent Philippe Laurent ou Sylvain Raifaud. L’élu écologiste de Paris regrette que la convergence des taux de la cotisation foncière des entreprises (CFE), prévue par la loi NOTRe, n’ait jamais été mise en œuvre. « Plutôt que d’évoquer la suppression de la MGP, cette convergence des taux et le transfert de la CFE à la MGP permettraient de mettre fin au dumping fiscal que se livrent encore les territoires tout en offrant à la Métropole de nouvelles marges de manœuvre pour corriger les inégalités », estime l’élu.

Les 1 300 projets locaux du FIM

Geoffroy Boulard rappelle les chiffres du fonds d’investissement métropolitain (FIM), qui a permis de financer 1 300 projets locaux dans 128 communes pour un montant de 265 millions d’euros. Il cite également le fonds d’innovation métropolitain (6 millions d’euros, 160 projets). Le vice-président de la Métropole chargé de la communication et de l’innovation numérique liste les grands projets d’investissements cofinancés par la Métropole : Centre aquatique olympique, Prisme (*), Cité de la gastronomie, etc. Il cite les huit ZAC qui lui ont été transférées au titre de l’intérêt métropolitain, les 800 points de charge pour véhicules électriques orchestrés par Métropolis, le soutien de la MGP à la rénovation thermique des bâtiments municipaux (470 projets, 160 millions d’euros). La revitalisation des cœurs de ville (Centres-villes vivants), avec 66 communes concernées, ou la création récente d’une foncière commerce pour éviter que les boutiques des centres-villes soient accaparées par les banques et les assurances, sont également citées parmi les politiques concrètes à mettre au crédit de l’instance. Tout comme la mise en place d’un réseau de pistes cyclables métropolitaines ou le financement des zones de célébration cet été, durant les JO, plébiscitées par la population. Intarissable, Geoffroy Boulard ajoute le plan piscine (22 millions d’euros) au bilan de la Métropole. « Les maires de ses communes membres défendent l’institution. Ce sont ceux des communes qui ne font pas partie de son périmètre qui la critiquent », observe-t-il

Les élus de la MGP soulignent la faiblesse de ses effectifs – « 156 équivalents temps plein pour 7 millions d’habitants, qui dit mieux ? », interroge Geoffroy Boulard –, et l’illusion des économies que sa suppression provoquerait. « Si les compétences de la Métropole étaient transférées à la Région, les agents qui instruisent les demandes des communes le seraient également », étaye Philippe Laurent. « La métropole du Grand Paris n’est pas une instance de gestion d’équipements et c’est très bien ainsi. C’est une métropole de projets, qui doit le rester », estime le maire de Sceaux. Le vice-président de l’Association des maires de France (AMF) cite au passage le schéma de cohérence territoriale (Scot), adopté en juillet 2023, définissant une stratégie commune à l’aire urbaine, parmi les succès de la jeune institution.

Pour une meilleure répartition des compétences

L’idée d’une concurrence ou d’une redondance entre les niveaux métropolitain et régional est battue en brèche. « La Région et la Métropole ont signé il y a quelques années une convention de coopération qu’il faut sans doute activer davantage, estime Philippe Laurent, mais la Métropole accorde dans sa gouvernance une place aux maires que la Région, qui regroupe plus de 1 200 communes, ne pourra jamais garantir », rappelle l’édile. « Les deux niveaux de collectivités ne partagent pas les mêmes compétences », ajoute Sylvain Raifaud. Geoffroy Boulard estime qu’une clarification accrue des champs de compétences des niveaux régional et métropolitain serait bienvenue. Par exemple sur les mobilités, pour lesquelles la MGP pourrait exercer une compétence de 2e rang.

Didier Gonzales estime pour sa part que si une strate doit être supprimée, c’est celle des établissements publics territoriaux (EPT). « C’est là que réside la vraie source d’économie », estime l’élu, qui considère que le périmètre des Territoires, souvent imposé à des élus récalcitrants, n’offre pas la superficie requise pour procéder à des véritables politiques de rééquilibrage. Une idée battue en brèche par Sylvain Raifaud qui souligne son admiration pour ce qu’ont accompli les Territoires les plus intégrés, à l’instar de Plaine Commune ou d’Est Ensemble en Seine-Saint-Denis.

« Nous avons besoin, plus que jamais, d’une intercommunalité au sein de la zone dense de l’Ile-de-France, conclut le maire de Villeneuve-le-Roi. Si vous supprimez la Métropole, c’est l’intercommunalité qui disparaît, alors qu’elle s’est imposée partout en France comme le bon niveau de gouvernance. On le voit avec le débat sur le périphérique. Ce dont nous avons besoin, c’est de dialoguer davantage et non de moins nous parler. »

(*) Pôle de référence inclusif et sportif métropolitain

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