PLU bioclimatique de Paris : la controverse de la Porte de Montreuil

Si le Parti communiste défend ses idées en louant la qualité du dialogue et du travail avec Emmanuel Grégoire, 1er adjoint parisien chargé de la révision du PLU, les Verts, qui rappellent qu’Anne Hidalgo n’a pas de majorité sans eux, font monter les enchères. Leur opposition au réaménagement de la Porte de Montreuil cristallise les tensions. L’adoption du 1er arrêt du PLU en conseil municipal, d’abord annoncée en février puis en avril, pourrait attendre encore.

Ce n’est pas gagné. A entendre Émile Meunier, élu vert du 18e arrondissement de Paris, président de la 5e commission (urbanisme – logement – Grand Paris – politique de la ville), les conditions d’un accord au sein de la majorité sur le PLU bioclimatique ne sont pas réunies. « Et sans le vote des Verts, Anne Hidalgo ne dispose pas de la majorité », rappelle l’élu, qui conduit les négociations en cours à ce sujet pour les écologistes. Ce lundi 30 janvier, une nouvelle réunion de trois heures a réuni les responsables des différentes composantes de la majorité parisienne à ce sujet, sans que les positions semblent avancer sensiblement.

Emile Meunier. © Jgp

Les questions de désimperméabilisation et de pleine terre, de la place laissée à la construction de bureaux ou de l’ampleur des efforts en faveur de la construction de logements animent les débats.

« Nous avons remporté au cours des derniers mois trois victoires culturelles », se félicite Émile Meunier. Il y a deux ans, lorsque l’on parlait de densité, on nous répondait qu’elle était constitutive de la beauté de Paris. Nous avons aujourd’hui obtenu que la constructibilité baisse dans la Capitale grâce au nouveau PLU, de 30 voire de 40 % », affirme l’élu. Ce dernier se félicite également d’avoir obtenu le principe de l’inscription dans le PLU d’un objectif de pleine terre à la fois dans Paris dans sa totalité et à la parcelle. Une augmentation de 300 ha de la superficie de pleine terre ferait ainsi consensus au sein de la majorité.

« Mais c’est une demi-victoire, concède l’élu écologiste, car pour l’heure, cet objectif n’est pas assorti d’un calendrier ». 300 ha de pleine terre en plus, c’est-à-dire d’espaces verts suffisamment profonds pour que des arbres puissent y prendre racine, équivaut à six fois la superficie du parc de la Cité des sciences et de l’industrie de la Villette, indique Émile Meunier. « Il faut faire des parcs au lieu de faire des ZAC », martèle-t-il.

C’est cette volonté de verdir davantage Paris, en développant notamment la ceinture verte l’entourant, qui explique l’opposition des Verts au projet de transformation de la Porte de Montreuil ou au programme « Mille arbres ». « Bien que ce projet ait été invalidé par la justice, la maire souhaite néanmoins l’inscrire dans le PLU », déplore l’élu écologiste, qui regrette qu’Emmanuel Grégoire ne souhaite une ceinture verte que sur 50 % de la circonférence de la ville.

Un PLU de recyclage et de transformation

Enfin, pour Émile Meunier, la troisième « victoire culturelle remportée » réside dans l’obtention d’un PLU de transformation et de recyclage et non plus de construction. « Quand nous disions il y a un an que nous ne souhaitions plus de nouvelles constructions dans Paris, on nous traitait de conservateur. Les choses évoluent », lâche-t-il. En précisant que les écologistes ne sont favorables à l’élévation des plafonds de construction que si elle est très modérée et limitée à quelques grands axes. « Il ne faut pas que ce que l’on gagne contre la densité au sol soit annulée par une densité en hauteur », lance l’élu, qui souligne enfin sa totale opposition à de nouvelles constructions de bureaux au sein de la Capitale. « Paris compte déjà 20 millions de m2 de tertiaire. Il faut arrêter de voler des emplois aux communes qui l’entourent », fait-il valoir.

De leurs côtés, les élus communistes indiquent tout d’abord qu’ils se félicitent « de la qualité des échanges et du travail orchestrés par Emmanuel Grégoire », selon les termes de Jacques Baudrier. L’élu du 20e, adjoint à la maire de Paris en charge de la construction publique, du suivi des chantiers, de la coordination des travaux sur l’espace public et de la transition écologique du bâti, estime que le PLU bioclimatique doit « concilier les impératifs de verdissement et de transition écologique et environnementale avec ceux de construction de logement, notamment social ».

Un jardin public à Matignon

Les communistes ont plusieurs points de convergence avec les écologistes, sur la pleine terre notamment. Ils souhaitent eux aussi que le nouveau PLU ajoute 300 ha de réserves pour accueillir des parcs par rapport à l’existant. Avec l’objectif de passer de 28 à 40 % de terres désimperméabilisées d’ci à 2050. Le PC propose par exemple, dans cet esprit, que les jardins de l’hôtel Matignon, rue de Varenne, soient pour partie transformés en parc ouvert au public.

Jacques Baudrier, dans son bureau de l’hôtel de ville de Paris. © Jgp

Concernant les bureaux, les élus PCF souhaite également ne plus voir Paris en construire de nouveaux, « sauf s’ils concourent au rééquilibrage de la Capitale entre l’est et l’ouest », précise toutefois Jacques Baudrier, qui rappelle en revanche que les communistes demeurent très attachés à la construction de logements.

Dans ce cadre, les élus du groupe PCF semblent plus favorables que les écologistes à une élévation des plafonds de hauteur, permettant de créer des logements sans artificialiser de terres ni densifier au sol, souhaitant néanmoins limiter ce déplafonnement à certaines grandes artères de la ville, à l’image du cours de Vincennes. Le groupe PC, comme les écologistes, demande que le compte foncier logement, qui permet à la Ville d’acquérir des sites pour bâtir des logements passe de 200 millions à 500 millions d’euros par an, intégrant dans ce calcul les mannes qui seront dégagées pour la foncière logement abordable en cours de création sous l’égide de Ian Brossat.

« Nous souhaitons également que Paris double le nombre de ses gymnases grâce à 17 « anneaux olympiques », indique Jacques Baudrier. 100 gymnases de plus verraient ainsi le jour dans les prochaines années. L’adjoint indique que ces anneaux olympiques sont des gymnases en hauteur, de plusieurs niveaux, à l’image du projet de Python-Duvernois. L’élu estime que le PLU doit aussi prévoir d’importantes réserves foncières pour bâtir des équipements éducatifs et culturels.

L’aménagement de la Porte de Montreuil fait débat

Si le PCF et les Verts convergent donc sur la plupart de ces sujets, c’est l’opposition des seconds au projet de transformation de la Porte de Montreuil qui cristallise les tensions au sein de la majorité. Les écologistes sont désormais opposés à ce projet, qu’ils soutenaient encore il y a quelques mois, estiment les communistes. « Ce n’est pas un caprice. Ce projet est contraire à la réalisation d’une ceinture verte autour de Paris », répond Émile Meunier.

Vue de la porte de Montreuil réaménagée. © DR

Le réaménagement de la Porte de Montreuil prévoit notamment de construire trois immeubles de bureaux avec commerces (de R+4 à R+6, 22 000 m2) en bordure de périphérique. Dans une lettre adressée à Emmanuel Grégoire le 16 janvier 2023, les élus du groupe Les Écologistes demandent au premier adjoint à la maire de Paris l’annulation de la vente de cinq emprises foncières sur les six cédées à la Semapa, concessionnaire de l’opération d’aménagement de la Porte de Montreuil afin de permettre la future construction du projet lauréat de « Reinventing cities » porté par Nexity.

Lire la réaction d’Emmanuel Grégoire :

Emmanuel Grégoire : « Avec ce PLU, nous voulons tourner Paris vers le futur »

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