Anne Souyris, adjointe à la maire de Paris chargée de la santé, explique pourquoi la Ville a entamé, dès lundi 6 avril 2020, des tests systématiques dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes. Pour la maire du 5° Florence Berthout, ces mesures demeurent insuffisantes.
La mairie de Paris a devancé le gouvernement qui, par la voix du ministre de la Santé Olivier Véran, vient d’indiquer qu’il changeait de doctrine en la matière, annonçant un « vaste plan de dépistage dans les Ehpad ». La Ville a procédé, dès lundi 6 avril, à des tests de dépistage systématiques du Covid-19 dans deux Ehpad, situés dans le 5° et le 13° arrondissement, dont celui du Jardin des plantes, au sein duquel 19 résidents sur 98 accueillis sont décédés du Covid-19.
Jusqu’à présent, la règle édictée par l’Etat consistait à considérer que l’ensemble de ses résidents et de son personnel soignant était contaminé, dès lors que trois tests s’étaient révélés positifs dans un établissement. Dans ce cas, chaque personne âgée était confinée dans sa chambre, repas compris. « Ce qui est inhumain pour des personnes qui vont souvent mal, déjà privées de la visite de leurs proches », souligne Anne Souyris, maire adjointe de Paris chargée de la santé.
Au contraire, un dépistage systématique permet de séparer résidents et personnels en deux zones, l’une étant réservée aux personnes contaminées. Ce qui présente à la fois l’avantage de rétablir un minimum de circulation au sein des établissements, mais aussi d’éviter que des soignants contaminés mais asymptomatiques diffusent le virus. « Nous avons dû mettre le pied dans la porte », résume Anne Souyris, qui raconte les nombreux contacts pris avec les laboratoires pour se procurer les précieux tests.
Des tests dans les centres Covid-19 pour SDF
La ville de Paris, qui va généraliser ce dépistage systématique à l’ensemble des Ehpad, ne compte pas en rester là. Une brigade d’une vingtaine de personnels médicaux de la municipalité, dont des médecins scolaires, sillonnent la Capitale pour pratiquer des tests, sur les populations les plus fragiles en priorité. Ainsi, par exemple, les deux centres Covid-19 créés pour accueillir des SDF, boulevard Ney (18°) et à La Rochefoucauld (14°) ont-ils pu être peuplés grâce à ces tests. « Sans eux, on ne pouvait savoir qui était malade », indique l’élue. Les migrants et les sans-abri accueillis dans les gymnases ouverts par la mairie bénéficieront également de ces tests.
Florence Berthout : « 8000 tests, c’est notoirement insuffisant ! »
La maire du 5e arrondissement (DVD), Florence Berthout, a partagé avec les personnels de l’Ehpad du Jardin des plantes, situé rue Poliveau, dans le 5° arrondissement de Paris, « son immense tristesse ». « Cette situation critique nécessite des mesures exceptionnelles pour endiguer la propagation du virus dans l’établissement », estime-t-elle. Florence Berthout remercie la Ville « d’avoir enfin retenu sa proposition d’un dépistage généralisé aux soignants, personnels et résidents des Ehpad ». « Le nombre de 8 000 annoncé, est toutefois notoirement insuffisant, les tests PCR (rhinopharyngés) devant être réalisés à plusieurs reprises compte tenu notamment de la mobilité des personnels dans ces établissements, estime l’élue. Ils devront être complétés par une phase de tests sanguins dès que ces derniers seront disponibles, poursuit-elle. Les moyens humains et matériels devront être immédiatement adaptés en conséquence », ajoute Florence Berthout.
« Le chiffre de 8000 cité par Mme Berthout correspond au nombre de personnes accueillies dans les Ehpad de Paris et absolument pas au nombre de tests dont nous disposons. Nous en avons d’ores et déjà obtenu 600 par jours après d’un des laboratoires avec lesquels nous travaillons, ainsi que des milliers auprès d’autres labos, souligne Anne Souyris. Nous pourrons donc réaliser plusieurs tests sur chaque pensionnaire ».
L’élue (LREM) regrette également « que la maire de Paris ait supprimé en mai 2019 la direction de l’Ehpad Jardin des plantes au profit d’une direction mutualisée sur trois établissements (Ehpad Jardin des plantes, Ehpad Annie Girardot et Les Cantates) qui se révèle particulièrement inadaptée en situation de crise. Il est également inconcevable de mutualiser le poste d’infirmière de nuit sur les deux Ehpad, estime-t-elle. La Ville doit augmenter de manière significative les équipements des soignants : masques, sur-blouse, sur-chaussures, charlottes, gants, etc. », estime également La maire du 5e arrondissement qui demande « que le fonctionnement des Ehpad à Paris fasse l’objet d’un rapport circonstancié de l’agence régionale de santé afin de tirer toutes les conséquences de cette situation dramatique en termes d’organisation et de moyens ». « Nous n’éluderons aucun sujet, indique Anne Souyris, s’il faut à l’issue de la crise, revoir à la hausse le personnel des Ehpad, nous y sommes prêts », ajoute l’élue.
Près de 5 millions de masques distribués par Paris
« Depuis le 16 mars, la ville de Paris a mise à la disposition des médecins généralistes, infirmiers et personnels de santé parisiens une partie de ses stocks stratégiques de masques en assurant leur distribution gratuite, indique Anne Hidalgo dans un courrier adressé à l’ensemble des 527 élus de la ville. En tout, 2,5 millions de masques ont été donnés aux hôpitaux de l’AP-HP. Un lot de 2 millions de masques a été donné aux structures accueillant des publics fragiles. La mairie a également distribué plus de 150 000 masques chirurgicaux aux Ehpad privés, en complément des distributions réalisées par l’Etat, dans l’objectif de permettre un port systématique du masque par le personnel », indique l’élue.