Laurence des Cars souhaite réenchanter le Louvre

Laurence des Cars, présidente-directrice du Louvre, a décrit les ambitions d’ouverture qu’elle nourrit pour le site touristique le plus visité au monde, lors d’un débat organisé en amont du dîner des maires du Grand Paris, lundi 19 septembre, auquel participaient également Jean-François Rial (Office de tourisme de Paris) et Emmanuel Launiau (groupe Quartus).

Réenchanter le Louvre. C’est l’ambition de Laurence des Cars, qui l’a présentée lors d’un débat organisé en amont du dîner des maires, lundi 19 septembre 2022, dans le cadre du Sommet du Grand Paris organisé par la Tribune, en partenariat avec la métropole du Grand Paris, le club des Acteurs du Grand Paris et les notaires du Grand Paris. L’ancienne directrice du musée d’Orsay a indiqué que cela passait par la limitation du nombre de ses visiteurs quotidiens et par l’élargissement de ses plages d’ouverture. Car le musée est victime de son succès. Sa fréquentation, de 2 millions de visiteurs par an avant la création de la pyramide de Leoh Ming Pei en 1988, n’a pas seulement doublé comme attendu. Elle atteignait 10 millions de visiteurs en 2018, faisant de l’établissement le site le plus visité au monde.

Laurence des Cars, présidente-directrice du Louvre. © Jgp

L’assistance attentive. © Jgp

Laurence des Cars, qui préside le musée depuis septembre 2021, effectuera prochainement une série d’annonces : le Louvre entend renouer avec l’accueil d’artistes créant au sein de ses ateliers, mais aussi avec le spectacle vivant, la musique, le théâtre ou la danse. « Nous voulons une programmation plus vivante, plus excitante, a-t-elle indiqué. Nous sommes encore trop souvent considérés comme un musée touristique, alors que nous sommes un musée national », a-t-elle souligné.

Une programmation polyphonique

La conservatrice a exprimé sa conviction que l’émotion saisissant les visiteurs, en contemplant un objet archéologique de 8 000 ans où La Liberté guidant le peuple d’Eugène Delacroix primait sur les débats esthétiques. De même, « si les conservateurs ont un regard précis sur les œuvres et les monuments qui les abritent, un regard érudit, les artistes seuls saisissent immédiatement l’exigence, la cohésion d’un lieu et de ses œuvres ».

Le Louvre est victime de son succès. © Jgp

Laurence des Cars souhaite développer une programmation polyphonique, utilisant à la fois l’auditorium Michel Laclotte de 450 sièges installé sous la pyramide, la Cour carrée ou le Jardin des Tuileries, « car tous les arts se répondent et tous les publics doivent se croiser ». « Je souhaite que le Louvre s’ouvre à la création contemporaine, à la pensée quotidienne, parce qu’il a toujours des choses à nous dire ».

Pourquoi faire du beau dans le Grand Paris ?

Lors de cette table ronde intitulée « Pourquoi faire du beau dans le Grand Paris ? », Emmanuel Launiau, président du groupe Quartus, et Jean-François Rial, président de Voyageurs du monde et de l’office du tourisme et des congrès de Paris, ont échangé sur leur vision de l’esthétisme.

Le président de Voyageurs du monde et de l’office de tourisme de Paris Jean-François Rial a dénoncé, lors d’une table ronde intitulée « Pourquoi faire du beau dans le Grand Paris ? », organisée en amont du dîner des maires, « un monde où dominent les utilitaristes ». « On doit mettre les bonnes personnes au bon endroit », a-t-il résumé, appelant à remplacer des dirigeants majoritairement insensibles à la beauté, par des responsables y étant plus attachés. Une beauté que Jean-François Rial estime « universelle ». « Il existe un grand débat entre ceux qui considèrent que le beau est universel et ceux qui ne le pensent pas. Je considère que notre regard sur le beau n’est pas suffisamment avancé, spirituel, divin pour voir son universalité ».

Jean-François Rial et Emmanuel Launiau. © Jgp

© Jgp

« Le Grand Paris est laid », a encore asséné le chef d’entreprise, regrettant « un prétexte permanent du coût ». Or, estime-t-il, « on peut faire du beau sans être cher et faire écolo ne veut pas dire faire laid », a-t-il poursuivi, prenant Voyageurs du monde, « qui possède à travers le monde quelques maisons à la fois magnifiques et écologiques », en exemple. Jean-François Rial a regretté la concentration des touristes sur un nombre réduit de sites, visitant tous Notre-Dame de Paris et dédaignant la basilique de Saint-Denis.

Prendre soin de l’espace public

Emmanuel Launiau, président du groupe Quartus, a décrit comment la beauté représentait pour lui une constante motivation. Le promoteur a regretté que le Covid ait créé « un désamour pour la ville », incarné dans le rejet de la densité. « Pourtant Paris est dense, mais sa beauté permet de le transcender », a-t-il ajouté, indiquant estimer que l’esthétique « ne se limitait pas aux façades, mais incluait ce qu’il y a derrière ». « La beauté d’une architecture, ce n’est pas seulement l’esthétique d’un projet, mais ce sont aussi les valeurs, de cohésion sociale par exemple, d’un bâtiment ou d’un quartier où il fait bon vivre ».

Le chef d’entreprise a plaidé pour « plus de liberté d’entreprendre ». « Concevoir une ville belle, durable et abordable, représente une équation impossible avec les valeurs d’hyper-compétitivité, d’hyper-mondialisation, d’hyper consommation des ressources de notre monde. Il faut entrer dans une ère de relocalisation des ressources, de frugalité », a-t-il également fait valoir, s’élevant au passage contre une tendance à l’uniformité architecturale, les réglementations actuelles faisant converger les projets « vers des façades en ossature bois, des balcons rapportés en bois » et une « architecture invisible » contre laquelle il s’est élevé. Emmanuel Launiau a confié son inquiétude, enfin, face à des collectivités locales « financièrement exsangues », ne pouvant plus prendre suffisamment soin de l’espace public. Il a regretté la cherté du foncier, qui expliquerait pourquoi « il ne reste plus beaucoup d’argent pour faire de l’architecture ».

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