Grand Paris aménagement est une fête

Alain Juppé, Jean-Louis Borloo, Emmanuelle Cosse, Olivier Klein, Valérie Pécresse ou Patrick Ollier figuraient parmi les personnalités présentes lors de la fête célébrant les 60 ans de Grand Paris aménagement, mardi 11 octobre. La révolution de la fabrique de la ville a cristallisé les échanges, avant que les convives investissent le dancefloor de la Manufacture des œillets, à Ivry-sur-Seine, jusque tard dans la nuit.

C’est donc vrai. Le film diffusé en ouverture des 60 ans de Grand Paris aménagement, mardi 11 octobre 2022 à la Manufacture des œillets, à Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), débute par des images d’archives du survol de l’Ile-de-France par Paul Delouvrier, alors préfet de l’Ile-de-France, lors duquel le général de Gaulle lui demanda de mettre de l’ordre dans le bordel qu’était alors l’agglomération parisienne. Les vues de l’habitat de l’époque justifient à elles seules l’intervention de l’Agence foncière et technique de la région parisienne. Une AFTRP dont la mission première fut d’acquérir le foncier nécessaire pour bâtir les grands ensembles et les villes nouvelles de l’Ile-de-France.

La manufacture des œillets, à Ivry. © Jgp

Cinq anciens présidents de Grand Paris aménagement étaient réunis pour l’occasion. De g. à dr. : François Delarue (2006-2013), Bernard de Korsak (1997-2002), Jean-Pierre Duport (1987-1989), Georges Constantin (1990-1993) et Thierry Lajoie (2013-2018). © Jgp

De g. à dr. : Olivier Klein, Stéphan de Faÿ, Jean-Philippe Dugoin-Clément, Emmanuelle Cosse, Philippe Bouyssou, (ainsi que Colette Barbier, qui œuvre chez GPA depuis 31 ans et fête ses 60 ans cette année et Florence Mintz, directrice de projet de GPA, née le 11 octobre) © Jgp

Dans ce même film d’ouverture de la soirée anniversaire de l’aménageur, Stéphane Beaudet, maire d’Evry-Courcouronnes, témoigne de son enfance dans la ville nouvelle d’Evry, eldorado d’une jeunesse profitant alors des aménités des villes construites selon les principes d’une charte d’Athènes désormais honnie. Un urbanisme de dalle, qui permettait aux enfants de jouer sur des espaces exempts de voitures. « Une époque à laquelle on remerciait les élus locaux d’être d’accord avec les plans de l’Etat », résume Stéphan de Faÿ, directeur général de Grand Paris aménagement dans ce court-métrage anniversaire.

L’histoire de l’AFTRP, devenue Grand Paris aménagement en 2015, est celle de la décentralisation et d’une évolution de la fabrique de la ville d’une commande de l’Etat sans débat à une co-construction avec les élus locaux. « C’était aussi l’époque où l’on pensait qu’il était possible de changer le monde grâce à une vision politique », ajoute Jean-Philippe Dugoin-Clément, président de Grand Paris aménagement, témoin lui aussi de ce film introductif.

L’administration administrante de l’Etat

Lors d’une première table ronde, cinq anciens présidents de l’Agence foncière et technique de la région parisienne ont confié leur fierté d’avoir œuvré pour aménager l’Ile-de-France, chacun narrant des anecdotes reflétant les obstacles, parfois toujours existants, à leur action. Ainsi Georges Constantin, président de l’AFTRP de 1990 à 1993 a raconté comment la commande de l’Etat de bâtir des logements sociaux sur 10 ha, dans Paris, sur des fonciers publics, se heurta à des levées de boucliers qui réduisirent cette ambition à une barre de logements située non loin de la tour Eiffel.

Bernard de Korsak, président de 1997 à 2002 et DGA de l’établissement au début des années 1990, a décrit le plan social qu’il dû orchestrer face à la crise immobilière de 1992. François Delarue est revenu quant à lui sur l’impact de la mise en concurrence des concessions d’aménagement qui s’imposa au mitan des années 2000, tandis que Thierry Lajoie a décrit la façon dont il conçut la transformation de l’AFTRP en Grand Paris aménagement « pour mettre l’établissement à la hauteur des ambitions du Grand Paris ».

L’esprit de bande

Une seconde table ronde, également animée par Cécile Maisonneuve (Decysive), a réuni notamment Alain Juppé, ancien Premier ministre et maire de Bordeaux, Jean-Louis Borloo, créateur de l’Anru, ou Emmanuelle Cosse, ancienne ministre du Logement désormais présidente de l’Union sociale de l’habitat (USH). Par un paradoxe inattendu lors de l’anniversaire d’un établissement public d’Etat, c’est le procès de « l’administration administrante de l’Etat » qui a fait consensus lors de ces échanges, les intervenants déplorant par ailleurs l’incapacité du législateur à adapter les lois aux nécessités de la transition écologique en général et de la rénovation thermique des bâtiments en particulier.  « Le problème, c’est que quand les aménageurs se gourent, il y en a pour longtemps », a estimé Jean-Louis Borloo.

L’inventeur de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine a loué l’efficacité de « l’esprit de bande » qui contribua selon lui au succès de l’Anru durant ses premières années. Emmanuelle Cosse s’est félicitée de la création des opérations de requalification des copropriétés dégradées d’intérêt national (Orcod-In), qui a permis de coordonner l’action de la pluralité d’acteurs concernés au sein d’un projet commun et auxquelles Grand Paris aménagement continue de prendre toute sa part.

Le maire (PCF) d’Ivry-sur-Seine Philippe Bouyssou a dit sa conviction de la nécessité, en matière d’aménagement, de ne pas « laisser agir seule la main invisible du marché ». © Jgp

Valérie Pécresse. © Jgp

Jean-Louis Borloo, entouré de l’architecte Carmen Santana (Archikubik) et de Cécile Maisonneuve. © Jgp

Jean-Philippe Dugoin-Clément, avec l’ancien maire de Bordeaux Alain Juppé. © Jgp

« L’aménagement est une affaire de confiance, qui suppose une forme de générosité », a notamment déclaré le ministre de la Ville et du Logement Olivier Klein. © Jgp

Jean-Louis Borloo, avec Damien Robert, président d’In’li, et Thierry Lajoie (Quartus). © Jgp

« Les nouvelles exigences de la fabrique de la ville augmentent les coûts », a constaté Stéphan de Faÿ en présentant le nouveau socle d’exigences de l’établissement. « Nous sommes à un tournant », a indiqué l’aménageur, en insistant sur la place que jouent désormais les collectivités dans la gouvernance de Grand Paris aménagement. « Nous sommes de plus en plus au service des collectivités territoriales », a poursuivi Stéphan de Faÿ, qui se fixe comme objectif stratégique « de réinventer le métier d’aménageur et d’entrainer les autres acteurs dans la transformation de la fabrique de la ville, en restant fidèle à la mission confiée par l’Etat ».

Intelligence collective

Le directeur général de Grand Paris aménagement a également remercié Thierry Lajoie, son prédécesseur, « d’avoir transmis un établissement en bonne santé financière », louant les vertus de l’intelligence collective. « Nous avons la conviction que chaque territoire est unique et qu’il nous faut respecter la singularité de chacun », a-t-il affirmé, soulignant la nécessité d’inscrire l’industrie immobilière dans une transformation ambitieuse, requérant une trajectoire de long terme. « Il nous faut réapprendre à construire pour des siècles, ce que nous avons eu tendance à oublier au cours des dernières années », a-t-il ajouté.

« Il nous faut mieux accompagner les élus, avoir une vision holistique de l’aménagement, intégrant tous les sujets de fond, parce que l’on a plus le temps de sérier les problématiques, a-t-il encore fait valoir. Il faut traiter la question du cadre de vie, celle du pouvoir d’achat, de la biodiversité, des circuits courts, de la décarbonation en profondeur de l’industrie. Derrière chacun de ces sujets, nous allons rendre publics nos engagements ».

« La question du faire avec est primordial », a ajouté l’aménageur, citant notamment l’Établissement public foncier d’Ile-de-France, la Société du Grand Paris, Choose Paris Region, l’Atelier parisien d’urbanisme (Apur) ou les bailleurs sociaux au nombre de ses partenaires. « Ce partenariat passe aussi par les promoteurs, les constructeurs ou les architectes », a ajouté Stéphan de Faÿ. « Il nous faut trouver de nouvelles coopérations, pour accélérer la fabrique de la ville », a-t-il conclu. Avant que s’ouvre le bal.

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