A Saint-Ouen, la Région réinvente l’art de travailler ensemble

Ce n’est pas de la com’. En quittant Paris pour leurs nouveaux locaux de la ZAC des Docks, dessinés par Jacques Ferrier, les agents du conseil régional ont quitté également le management de l’ancien monde.  

Le déménagement de la Région à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis) a eu un effet bœuf : celui de métamorphoser la vie de bureau des agents, de révolutionner les méthodes managériales et l’art de vivre au travail. Il faut visiter le siège de l’institution régionale au cœur de la ZAC des Docks, à deux pas de la mairie de Saint-Ouen, pour s’en rendre compte. Jardins intérieurs, baby-foots, salle de fitness, mais aussi et surtout, open space à tous les étages symbolisent ce changement d’ère.

La Région vit désormais à l’heure de l’open space, du télétravail et du flex-office. © Jgp

« Nous sommes passés d’un management du contrôle à un management d’objectifs et de résultats », résume Marie-Carole Ciuntu, vice-présidente de la Région chargée de ces questions. © Jgp

La façade en résille du conseil régional, signée Jacques Ferrier. © Jgp

Désormais, tous les agents qui l’acceptent travaillent en flex-office. Pas de bureaux attitrés, mais un casier nominatif comme seul point d’ancrage permanent. Et la possibilité, pour tous ceux qui le souhaitent également, de télétravailler deux jours par semaine. « Si les missions ne le permettent pas, comme c’est le cas pour l’accueil par exemple, les agents concernés se voient proposer partiellement de nouvelles missions, compatibles avec le télétravail », souligne Fabienne Chol, directrice générale adjointe du conseil régional en charge des ressources humaines, intarissable sur les bienfaits de ce changement d’ampleur inédite.

10 ans de gagnés

« Nous aurions pu le faire sans déménager, mais je considère que cela nous a fait gagner dix ans », résume la dirigeante territoriale. Les vastes bureaux aux façades en résilles blanches, dessinées par l’architecte Jacques Ferrier, n’ont pas été conçus pour la Région. Mais à la demande de Valérie Pécresse, il a été décidé de conserver l’organisation en open space.

Ce qui n’allait pas de soi. « Certains agents avaient les mêmes collègues de bureau depuis 15 ans, avec les photos de leurs enfants de la naissance à la majorité collées au murs », raconte Fabienne Chol. Au départ, les syndicats ont exprimé leur désaccord, redoutant des conditions de travail moins confortables, fruit de mesures qu’ils estimaient guidées par le seul souci de réaliser des économies.

Mais la qualité des bureaux, leur acoustique, la mise à disposition de multiples espaces dédiés, isolant les tâches bruyantes, ou permettant des réunions à différentes échelles, sont rapidement, semble-t-il, venus à bout des réticences.

« Nous sommes passés d’un management du contrôle à un management d’objectifs et de résultats », résume Marie-Carole Ciuntu, vice-présidente de la Région chargée de ces questions, qui loue le portage politique indéfectible de la présidente en l’espèce. Et pour ce changement de culture managériale, le télétravail constitue un atout, indique-t-on également.

Le management visuel a son espace dédié. © Jgp

« Le déménagement nous a permis de gagner 10 ans », estime Fabienne Chol. © Jgp

La salle de fitness du conseil régional. © Jgp

Les missions des agents ont dû être passées au crible afin de bâtir des indicateurs permettant d’évaluer leurs performances. « Le télétravail, pour lequel 71 % des agents se sont déclarés volontaires, c’est 10 % de temps de travail en plus, 20 % de productivité en plus, et cinq jours de congés maladie par an en moins », fait valoir Fabienne Chol. Et des outils de téléconférences permettent de conserver une bonne fluidité du workflow.

Le même traitement pour tous

Autre révolution copernicienne, qui va avec le flex-office, chaque agent, de l’adjoint administratif de catégorie C à l’administrateur en fin de carrière, dispose désormais du même ordinateur portable, du même espace de travail, du même bureau. « Nous avons misé sur l’exemplarité de la hiérarchie », indique Marie-Carole Ciuntu. Les managers intermédiaires, de proximité, ont fait l’objet de formations, de séminaires, particuliers, afin de vaincre leur potentielle résistance. A la région Ile-de-France, désormais, les problèmes se règlent par des séances de management visuel, à coup de post-it et de jeux de rôles, affirme-t-on également, sur la base d’une charte managériale déclinée en trois valeurs cardinales : autonomie, confiance et sens du collectif.

C’est l’organisation de la sécurité sociale belge, visitée à plusieurs reprises par les dirigeants de la Région en amont de cette réforme, qui a servi de modèle. « Les élus eux-mêmes ont redécouvert le travail en collaboration avec les services, alors que nous étions enfermés chacun dans des sites distants et mal commodes », poursuit la VP, qui rappelle que le conseil régional d’Ile-de-France était auparavant disséminé dans plus d’une dizaine de sites différents. « Chaque service avait eu tendance à créer ses propres fonctions supports », poursuit Fabiennne Chol, qui vante également les vertus d’innovation que permettent la multiplication des rencontres entre les agents, dans des locaux modernes et adaptés à l’air du temps. On n’ose imaginer le degré de bonheur collectif qui prévaudra quand, à la ligne 13, vécue pour beaucoup comme une punition dans cet océan de bonheur au travail, se substituera la ligne 14 en cours d’achèvement.

Sur le même sujet

Top