« Plus loin, plus proche » : regard sur la pratique d’Une Fabrique de la ville

Dans l’ouvrage « Plus loin, plus proche », l’agence d’urbanistes impliquée dans le Village des athlètes ou le PLU bioclimatique de la ville de Paris fait le point sur l’évolution de sa pratique au cours des dernières années alors que le changement climatique bouleverse le secteur.

« Nous avons un peu le “nez dans le guidon” et nous ne prenons pas assez le temps d’écrire et de formuler nos convictions. Or cela fait 15 ans que la société a été créée, il est donc nécessaire de prendre du recul dans l’échange entre les quatre associés », explique au Journal du Grand Paris Guillaume Hébert, qui a créé Une Fabrique de la ville fin 2008 avec Jean-Louis Subileau. Une agence d’urbanisme qui s’est développée dans l’assistance à maîtrise d’ouvrage avant de s’intéresser, au milieu des années 2010, à la maîtrise d’œuvre urbaine puis à l’élaboration des documents d’urbanisme réglementaires. Un parcours qui l’a conduit notamment en Ile-de-France à travailler sur les « Réinventer », le Village des athlètes des Jeux de 2024, la ZAC Gare des Mines-Fillettes à Paris, le PLUI de Plaine Commune ou le nouveau PLU de la Capitale.

Au cœur des mutations urbaines, dans un secteur en pleine évolution pour intégrer les exigences du changement climatique, les quatre associés – Anna Cremnitzer et Sébastien Harlaux ont rejoint les deux fondateurs – ont pris le temps de faire un point sur leurs pratiques dans un ouvrage intitulé « Plus loin, plus proche ». Il contient une analyse des transformations récentes en matière d’urbanisme, des exemples d’opérations qui les reflètent – richement illustrés de photos, plans et perspectives – et des « contrepoints » (de Pierre Veltz, Emmanuelle Cosse ou Michel Desvigne) qui viennent apporter d’autres sons de cloche.

Autant d’éléments qui permettent d’aborder les différentes facettes de leur approche. « Construire la ville sur la ville est une ambition toujours d’actualité mais plus suffisante, tout comme éviter l’étalement urbain, il y a d’autres enjeux à prendre en compte comme l’impact carbone ainsi que la réversibilité du bâti notamment », observe Guillaume Hébert. Des défis qui remettent en cause les règles établies. « La ville européenne […] sera la même et pourtant tout autre. Cela interroge beaucoup notre métier. La transformation de notre imaginaire, de nos pensées, de nos pratiques est requise », écrit Jean-Louis Subileau en introduction de l’ouvrage.

« Fabriquer une ville et des territoires viables, résilients au changement climatique »

Un préambule qui rappelle quelques principes portés au cours de ces dernières années par Une Fabrique de la ville : la « juste place du public et du privé » dans l’aménagement urbain en poussant le public à garder la main sur les opérations, « ouvrir » la commande architecturale ou affirmer la place des paysagistes dans la maîtrise d’œuvre urbaine. « La priorité est de fabriquer une ville et des territoires viables, résilients au changement climatique, aux bouleversements technologiques et numériques », fait valoir Jean-Louis Subileau. Un prisme écologique qui ne doit pas, selon lui, laisser de côté les sujets d’équité territoriale et de beauté de la ville.

Depuis cinq ans, les choses se sont accélérées, les crises amplifiées. Les questions de santé environnementale ou le lien paysage-biodiversité sont devenues centrales et ne doivent pas reléguer au second plan les enjeux sociaux des territoires. La crise immobilière actuelle va nécessairement amener tout le monde à se questionner, notamment chez les promoteurs, ce qui doit indiscutablement faire évoluer les modèles, estime Guillaume Hébert.

Guillaume Hébert. © Anh de France

L’art de la mise en œuvre

Chacun des associés détaille dans l’ouvrage sa vision d’un volet de l’activité de l’agence. Sébastien Harlaux revient sur les « stratégies territoriales engagées », au travers notamment des travaux menés sur Plaine Commune. Anna Cremnitzer présente des « projets urbains porteurs de transitions », avec par exemple le rapport ville-nature de Versailles Gally. Enfin, Guillaume Hébert aborde « l’art de la mise en œuvre », l’ADN d’Une Fabrique de la ville, signale l’architecte-urbaniste.

L’urbanisme nécessite de mettre toutes les parties-prenantes autour de la table, relève-t-il. Pour parvenir à réaliser des projets ambitieux, il faut dépasser une vision financière dépenses/recettes trop étriquée, et valoriser les externalités environnementales ou sociales : carbone, biodiversité et espaces verts, prise en compte de l’évolution du climat, construction de logements sociaux et d’équipements… Pour que cela soit possible, la fiscalité et les modalités d’attribution des subventions sont à nos yeux à repenser.

Par cette publication, l’agence souhaite afficher ses principes et ses questionnements, mais aussi susciter des réactions. Elle organise d’ailleurs un débat sur le thème « Plus loin, plus proche – Comment planifier une ville durable et solidaire ? » le 6 novembre à 18h45 au Pavillon de l’Arsenal.

Sur le même sujet

Top