L. Grotto : « 65 % des entreprises de notre panel anticipent un développement de leur activité »

Lionel Grotto, directeur général de Choose Paris Region, souligne la vigueur de nombre de secteurs économiques clés de l’Ile-de-France. Il décrit les actions de Choose Paris Region pour développer l’attractivité régionale malgré le contexte de la pandémie.

– Comment se portent les entreprises que vous suivez ? 

Nous avons interrogé sur leurs perspectives de croissance 500 entreprises à capitalisation étrangère, de 43 nationalités, sur 12 filières-clés, implantées sur l’ensemble des territoires d’Ile-de-France. 180 ont répondu et 65 % d’entre elles anticipent un développement de leur activité au cours du second semestre 2020. Cela se traduira soit par du réinvestissement, de l’extension ou de la croissance. Il peut aussi s’agir de sociétés récemment installées qui sont en phase de déploiement de leur activité. C’est un panorama très positif.

Lionel Grotto. © Jgp

– Quels sont les secteurs les mieux orientés ?

Certains secteurs ont été d’une certaine façon renforcés par la conjoncture : il s’agit essentiellement du numérique, des infrastructures réseaux et télécoms, de l’électronique, de la santé ou de l’édition de logiciels. Les acteurs des mobilités douces et des éco-activités nous indiquent également percevoir des opportunités dans la sortie de crise.

– Quelles actions spécifiques avez-vous menées durant la crise ?

Nous accompagnons actuellement six projets, représentant 180 emplois, dans le domaine de la production de matériel sanitaire (masques, gel hydro-alcoolique). Nous avons numérisé de nombreux événements traditionnellement organisés en présentiel, en proposant une série de webinars, soit sur des thématiques sectorielles, soit dans le cadre de rencontres organisées entre grands groupes français et start-up internationales.

– Vous avez pris une initiative avec ADP ?

Nous avons lancé avec ADP un appel d’offres d’innovation international, « Save travel challenge », qui vient de s’achever. Cette démarche a su mobiliser, en moins de quatre semaines, des énergies créatives tout autour du monde : plus de 300 dossiers venant de 31 pays, 6 finalistes, 3 gagnants. Cela a généré une visibilité internationale extrêmement forte pour notre région, sur une thématique d’innovation, d’attractivité et d’ouverture internationale, qui nous permet d’accompagner la reprise du trafic aérien, et de redonner confiance aux voyageurs sur l’ensemble du parcours.

Cela donne une image agile de la France et c’est important de montrer que nous savons travailler de cette manière. Ce sont des choses qui correspondent parfaitement à notre vision, selon laquelle l’innovation, dans des périodes comme celle que nous traversons est essentielle.

– Vous avez adapté vos méthodes de travail ?

Nous sommes toujours quasi intégralement en télétravail, et ce depuis le début du confinement. La période de la crise a été très intense pour nous. Nous avons en effet digitalisé une large partie de notre activité, notamment évènementielle et de réunions régulières que nous organisons avec les partenaires des territoires ou ambassades. Par ailleurs, il faut bien noter que le flux de projets ne s’est pas arrêté : aujourd’hui, nous accompagnons 65 projets stratégiques d’entreprises internationales souhaitant se développer en Ile-de-France ce qui représente 12 000 emplois potentiels. La majorité poursuit son projet, certaines avec un délai supplémentaire, mais pas nécessairement : des entreprises souhaitent s’installer au plus vite et nous voyons arriver de plus en plus de projets, notamment industriels, avec des délais très courts.

– Vous vous occupez de relocalisation, dont on parle beaucoup ?

Nous sommes en première ligne sur ce sujet. La région Ile-de-France a bâti sur les dernières années un plan stratégique pour le développement de l’industrie en Ile-de-France, et annonce aujourd’hui des mesures dans le cadre d’un plan de relance très conséquent par les montants financiers engagés. Nous le déclinons opérationnellement.

L’Ile-de-France s’est fortement désindustrialisée au cours des 30 dernières années, avec des centaines de milliers d’emplois perdus. Néanmoins, aujourd’hui, l’industrie représente encore 500 000 emplois. Parmi les 65 projets cités plus haut, 12 sont des projets d’unités de production-réalisation, soit 1 700 emplois, essentiellement dans les secteurs de l’automobile, des mobilités, de la santé-biotech, de même que les éco-activités ou l’aéronautique.

– Quelles sont vos actions sur ce sujet ?

Nous travaillons à la fois sur le volet marketing de l’offre, et sur le développement de notre capacité à répondre aux demandes. Nous suivons actuellement un grand nombre de projets industriels entrants, souvent urgents, qui demandent des délais courts, avec des productions à lancer dans les 12 à 18 mois, des besoins de fonciers ou de bâtiments déjà prêts. Les porteurs de ces projets sont très sensibles à la qualité et quantité des personnels disponibles, et à la qualité de l’environnement pour la R&D. Si les coûts, notamment du travail, restent élevés, cela ne constitue pas un élément rédhibitoire.

– Vous développez des sites clés en main ?

Nous travaillons sur ces questions avec la région Ile-de-France, la préfecture, ainsi que l’ensemble des acteurs publics et privés, je pense notamment aux intercommunalités. Nous recensons à la fois des sites greenfield et brownfield, entre 0,5 et 50 ha, ainsi que des bâtiments prêts à construire et modulables, sur différentes zones.

– Où intervenez-vous ?

Nous œuvrons pour mettre en œuvre la vision que porte la région Ile-de-France d’une réindustrialisation dans un cadre de digitalisation et de décarbonation, afin de renforcer l’attractivité du territoire et de mieux résister aux chocs futurs. Par exemple dans le Val d’Oise, à Cergy-Pontoise ou Argenteuil, pour la production dans les secteurs numériques et électroniques, ou à Saclay-Versailles-Saint-Quentin pour l’industrie et les mobilités du futur. Nous travaillons aussi avec le territoire de Grand Orly Seine Bièvre et notamment Villejuif, avec le Génopole d’Evry, sans oublier la Vallée de la Seine. Cela nous permet de disposer d’une connaissance fine de ce que recherchent les investisseurs.

– Le sujet de la relocalisation des activités financières à Paris, compte-tenu du Brexit notamment, demeure d’actualité ?

Nous travaillons activement avec Paris Europlace et les professionnels du secteur financier de la place de Paris sur cette question, qui mérite aujourd’hui un coup d’accélérateur alors que la phase de déconfinement s’achève et que la question du Brexit reste une problématique réelle pour les entreprises britanniques qui peuvent être intéressées par une accélération de plans de développement vers notre région. Sur ces questions, nous montons actuellement des webinars ciblés vers les populations qui nous intéressent.

– Le développement durable est un élément d’attractivité ?

Nous intégrons chaque jour davantage les éléments liés au développement durable en Ile-de-France à notre stratégie d’attractivité. Notre objectif est d’attirer un nombre croissant de projets à impact environnemental fort pour les territoires et qui permettent d’accélérer les stratégies publiques locales de transformation. Pour cela il nous faut renvoyer une image de la métropole qui soit vue davantage comme une grande capitale durable : Paris peut être encore perçue comme une ville très dense et moins vivable que certaines de ses concurrentes, d’où l’importance de faire vivre l’idée du Grand Paris qui porte une autre image en termes de durabilité.

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