Après 10 ans de travaux, l’église de Saint-Sulpice retrouve son lustre d’antan

La plus grande église de Paris, située dans le 6e arrondissement, à Saint-Germain-des Prés, fait l’objet de plusieurs chantiers de restauration sous le giron de la ville de Paris depuis 2015. Dernière action en date : l’entretien des décors de la chapelle de la Vierge, unique par son ampleur et son aura artistique, qui mobilise une quarantaine de restaurateurs.

Il fallait grimper plus de 11 étages d’échafaudage, dans le 6e arrondissement de Paris, mardi 21 juin 2023, pour accéder à la voûte de l’église de Saint-Sulpice, la plus grande de Paris. En ce lieu, art religieux et païen s’entremêlent depuis plus de 300 ans. François Lemoyne, Delacroix, Pigalle, Michel Ange, y ont tous apposé leur marque au fil des siècles. Sous les bâches protectrices, à plus de 29 m de haut, des petites mains s’affairent pour décrasser, recoller, restaurer les différentes fresques, peintures et décors qui composent le lieu. Un travail titanesque, sur plus de 14 mois, conduit par la ville de Paris pour un budget de 2,2 millions d’euros et financé par 1,5 million d’euros de mécénat (avec le soutien de la Fondation Avenir du patrimoine de Paris et la famille Pinault).

« C’est un travail continuel pour conserver ces œuvres, abonde Véronique Milande, conservatrice en cheffe et responsable de la COARC (conservation des œuvres d’art religieuses et civiles). La dernière rénovation de la voûte remonte à 1947. Mais les décors ont subi l’œuvre du temps, l’humidité et certaines parties gardent les stigmates d’un obus tombé sur l’église en 1870. Les peintures et dorures se sont quant à elles assombries et des fissures ponctuelles se sont manifestées. »

Après le portail sud et le système électrique, les chapelles de l’église Saint-Sulpice sont restaurées. © Jgp

Karen Taïeb (à g.) lors de la visite de l’église le 21 juin. © Jgp

En tout, 373 m2 de peinture de l’église Saint-Sulpice vont ainsi être restaurées. « François Lemoyne, qui a réalisé la fresque originelle en 1730, utilisait de l’enduit de chaux qu’il incisait de sorte à avoir les contours de son dessin, précise Delphine Burgart, restauratrice. Ensuite, il peignait directement, tout cela dans la même journée. C’était une technique très compliquée. Heureusement, nos techniques de restauration ont évolué et nos travaux vont permettre à la chapelle d’avoir un très bon vieillissement dans les prochaines années ».

Des restaurations en série

Mais les travaux de restauration ne s’arrêtent pas là. Bientôt, ce sera également au tour de la Chapelle Sainte-Jeanne d’Arc de faire peau neuve pour clôturer plus de dix ans de travaux sur le bas côté sud de la nef. La restauration de la chapelle Saint-Joseph s’est, en effet, achevée en avril dernier, dans la lancée des précédentes rénovations attachées à ce flan de l’église. Les décors peints de Charles Landelle (1821-1908) et le mobilier ont ainsi retrouvé de leur éclat et de leur lisibilité pour le bonheur des touristes et pratiquants. Auparavant, en 2016, les trois peintures monumentales de la chapelle des Saints-Anges de Delacroix, dont la « Lutte de Jacob avec l’ange », avaient également bénéficié d’une restauration d’ampleur.

Le choix des zones à restaurer s’effectue entre les services municipaux et le curé de l’église. “Ce sont des œuvres d’art majeures et un lieu très touristique. Il est important de conserver et transmettre ce patrimoine. Il faut parfois agir au plus vite quand les oeuvres sont en péril”, soulignait Karen Taïeb, adjointe à la maire de Paris en charge du patrimoine, de l’histoire de Paris et des relations avec les cultes.

Des petites mains s’affairent pour décrasser, recoller, restaurer les différentes fresques, peintures et décors. © Jgp

Des travaux de sécurisation des circulations dans les combles et sur les corniches hautes ont été menés par les charpentiers de Paris. © Jgp

Alors que la restauration des chapelles bat son plein, plusieurs projets de la ville de Paris viennent également de s’achever dans l’église. Le portail sud – une grande porte en bois surmontée d’une tour gravement endommagée dans un incendie en 2019 – a été reconstruit à l’identique. Enfin, dans le cadre des travaux d’entretien menés par la municipalité, l’ensemble du système électrique de l’église a entièrement été mis aux normes. Après des premiers travaux de sécurisation des circulations dans les combles et sur les corniches hautes, par les charpentiers de Paris, les installations ont été mises en conformité électrique pour un coût de 1,7 million d’euros. Près de 315 m2 de bois de chêne ont été utilisés, dont 260 m2 de platelage remplacé entre avril 2022 et juin 2023.

L’incendie de Notre-Dame en filigrane

« Nous avions déjà noté la nécessité de faire ces travaux avant l’incendie de Notre Dame, mais il se pose toujours la question de savoir comment prioriser les travaux. Il y a beaucoup à faire ici. C’est sûr que l’on a été d’autant plus attentifs à sécuriser les combles du risque d’incendie », relevait Christophe Couard, ingénieur de travaux.

Depuis 2006, date de début des travaux sur la tour Nord – entièrement réhabilitée en 2011 pour un budget total de 28 millions d’euros – la mairie de Paris poursuit la restauration de Saint-Sulpice. L’église, classée au titre des monuments historiques depuis 1915, est devenue un haut lieu du tourisme parisien. « C’est un véritable musée que nous devons nous efforcer de conserver », conclut Véronique Milande.

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